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7 janvier 2013 1 07 /01 /janvier /2013 09:42

 

SOCIAL-ECO

 

SOCIAL-ECO -  le 3 Janvier 2013

Enquête 2013

Entreprises : celles qui vivent sont celles qui luttent... Toujours

 

 

Pour la plupart, nos lecteurs les connaissent bien. Leurs mots, leurs visages, leurs combats s’étalent souvent dans nos colonnes. L’Humanité revient ici sur quelques luttes emblématiques de ces salariés qui n’ont pas baissé les bras face au pire avenir promis à leur entreprise en 2012. Rien d’exhaustif dans cet inventaire : d’autres, comme Electrolux à Revin dans les Ardennes, auraient pu y figurer. 2013 est déjà là, tous sont toujours sur la brèche. Pour sauver les emplois, les savoir-faire, mais aussi l’avenir des territoires, ces mobilisations ont permis de changer 
le cours de l’histoire.

Fralib à gémenos,
la scop TI, c’est parti. L’année 2012 aura été pour les Fralib, dont la production de thé a été délocalisée en Pologne, celle de tous les entretiens. Entretien de l’espoir pendant la campagne présidentielle avec la visite de tous les candidats de gauche qui tous ont repris le mot d’ordre des salariés de l’usine de Gémenos près d’Aubagne et de leurs syndicats CGT et CFE-CGC : « Éléphant est français, en Provence, il doit rester. » Entretien de la campagne de boycott des produits Lipton et des machines enfin cédées par Unilever pour l’euro symbolique à la communauté urbaine de Marseille, nouveau propriétaire des terrains sur lesquels devrait cette année, en lieu et place de Fralib, démarrer la Société coopérative ouvrière provençale de thé et d’infusions (Scop TI). Entretiens aussi avec les ministres Arnaud Montebourg et Benoît Hamon qui approuvent la constitution de cette coopérative dont la naissance officielle a été annoncée en décembre dernier à l’Assemblée nationale par les syndicalistes et par André Chassaigne, le député communiste coprésident du comité national de soutien. Entretien enfin avec le nouveau président de la République à l’Élysée : après avoir passé leur troisième réveillon de lutte, les Fralib se tournent à nouveau vers François Hollande afin qu’il mette ses actes en accord avec ses bonnes paroles. Et fasse enfin plier la multinationale qui devra payer cher pour tous les dégâts humains commis au pays de Pagnol !

Pilpa. Les salariés tiennent
les murs de leur boîte. Le 5 juillet 2012, le groupe R&R annonçait vouloir se séparer rapidement du site de fabrication de glaces Pilpa de Carcassonne (Aude) racheté au glacier 3A à peine neuf mois auparavant. Ce sont 122 salariés qui décident alors de se battre pour garder outil de travail et emplois dans ce département où l’industrie se meurt. La filière laitière souffrirait également de ce gâchis. Ce rachat par R&R n’avait qu’un objectif, selon eux : récupérer les licences pour les glaces Oasis et Disney, les savoir-faire et se débarrasser d’un concurrent. R&R est aux mains du fonds d’investissement américain Oaktree Capital Management, qui perçoit des intérêts exorbitants atteignant 11 %. Mais le site de Carcassonne est rentable et viable. En atteste une étude du cabinet Progexa. Les salariés, emmenés par la CGT, ont multiplié les actions publiques, participant notamment à la Fête de l’Humanité à La Courneuve en septembre dernier, et ont saisi la justice.

Le 11 décembre, le juge des référés de Carcassonne a considéré que le plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) présenté par la direction était « manifestement insuffisant dans les mesures de reclassement proposées au regard des moyens du groupe », le licenciement collectif prévu constituant « un trouble manifestement illicite ». Le juge a ordonné la suspension de cette procédure de licenciement collectif. La direction doit présenter un nouveau PSE. Durant les fêtes qui se traduisent par un arrêt des activités jusqu’au 3 janvier, les salariés se sont relayés sur un piquet de garde devant l’entrée du site pour surveiller l’entreprise. Pas question de voir les machines partir à leur insu. Tout en espérant qu’un repreneur se présente, ils travaillent eux-mêmes à un projet de reprise de l’activité en coopérative (Scop).

Petroplus. une fiducie toujours à disposition. Ils ont déplacé des montagnes, convaincus de l’emporter à la fin... Pour les 480 salariés de la raffinerie Petroplus (ex-Shell) de Petit-Couronne (Seine-Maritime), pas question de laisser tomber Mémé, comme ils surnomment affectueusement leur outil de travail : alors qu’une bonne dizaine de raffineries ont disparu en deux décennies, la France ne peut, selon eux, tabler sur les importations de pétrole produit dans des conditions qui favorisent un dumping social et environnemental. Alors, les Petroplus continuent le combat. À plusieurs reprises, ils ont cru leur heure arrivée devant le tribunal de commerce, mais les repreneurs, d’autant plus sérieux à leurs yeux que l’intersyndicale avait réussi à mettre en place une fiducie couvrant quoi qu’il arrive les salariés, ne sont jamais parvenus à convaincre les juges. La raffinerie a été mise en liquidation il y a deux mois, mais rien n’est fini : les syndicalistes maintiennent la pression sur Shell ainsi que sur François Hollande et sur le gouvernement Ayrault.

Les Lilas. et la lutte accoucha d’une nouvelle maternité. Jusqu’à il y a un an, les personnels de santé craignaient le pire pour la maternité des Lilas (Seine-Saint-Denis). Tant d’établissements de proximité ont déjà été fermés ces dernières années, ou sont encore menacés. Créée au début des années 1960, Les Lilas, c’est, bien plus qu’une simple maternité, un établissement non lucratif qui fut pionnier pour l’accouchement sans douleur, qui a accueilli les avortements avant la loi Veil de 1975, et se distingue encore par un moindre recours à la péridurale ou à la césarienne. Handicapée par des locaux trop exigus, la maternité devait s’agrandir pour continuer de pratiquer quelque 1 700 accouchements et 1 300 IVG par an. Mais sous divers prétextes, l’agence régionale de santé (ARS) a longtemps suspendu le projet de rénovation. Une ardente bataille mobilisant professionnels de santé, anciennes patientes, élus de gauche, personnalités, amènera finalement l’ARS à donner, fin janvier 2012, son feu vert à la reconstruction.

My ferry Link. Ne l’appelez plus 
jamais seafrance ! « J’ai ressenti beaucoup de plaisir à reprendre la mer. C’est une délivrance. C’est quelque chose qu’on attendait depuis longtemps qui se concrétise. Tout le monde s’est investi à fond. On travaille pour nous, c’est dix fois plus motivant », confiait un des ex-SeaFrance, filiale de la SNCF, le lundi 20 août dernier, dans son costume de steward de la Scop My Ferry Link, tandis que les rotations entre la France et l’Angleterre reprenaient après neuf mois d’arrêt. À l’issue d’une bataille juridique au long cours, cette Scop initiée par des syndicalistes CFDT et adossée à Eurotunnel a permis d’engager plus de trois cents personnes. L’enjeu était de sauver des emplois et de garder des navires sous pavillon français dans le Pas-de-Calais. Le combat des marins et des sédentaires, maintenant ? Reconquérir une clientèle. My Ferry Link table sur 12 à 14 % de parts de marché pour l’activité marchandises et 8 à 10 % pour l’activité passagers, dans un contexte de concurrence rude sur le détroit, où l’anglais P&O a renforcé sa flotte, tandis que le consortium associant Louis-Dreyfus Armateurs (LDA) et le danois DFDS vient de s’implanter.

TRW. au forceps, les vosgiens contraignent renault et psa à sauver leur usine. Fin juillet 2012, TRW, poids lourd de l’équipement automobile, décide de pousser son usine de Ramonchamp (Vosges) vers le redressement judiciaire, après l’avoir mis artificiellement en cessation de paiement en détournant ses commandes vers une autre usine du groupe. Le procédé est classique : en asséchant l’une de ses filiales, le groupe espère licencier ses 313 salariés vosgiens à moindres frais en laissant les AGS, le régime de garantie des salaires en cas de défaillance des entreprises, supporter le coût du plan de casse sociale.

C’était sans compter la mobilisation exceptionnelle de l’ensemble des salariés, allant jusqu’à manifester au siège européen de TRW à Düsseldorf, et la détermination de leur avocat Me Ralph Blindauer et du procureur de la République d’Épinal, bien décidés à faire assumer à l’équipementier le coût de la casse sociale. Résultat : TRW se voit contraint de mettre une enveloppe de 18 millions d’euros sur la table, pas seulement pour payer des indemnités dignes de ce nom aux salariés, mais également pour leur permettre de reprendre l’usine et de pérenniser une partie des emplois.

Seule condition : que les principaux donneurs d’ordres, les puissants constructeurs français PSA et Renault, s’engagent sur un volume de commandes suffisant pendant la période de transition, ce que les constructeurs rechignent à faire. Au final, c’est encore au forceps que les salariés obtiennent gain de cause fin décembre : suite à une manifestation devant le siège de Renault à Billancourt et à des interpellations au ministère du Redressement productif, Renault et PSA promettent de fournir un chiffre d’affaires de 15,5 millions d’euros à l’usine de Ramonchamp. Le projet de reprise devrait donc voir officiellement le jour lors d’une prochaine audience, le 17 janvier, au tribunal de commerce d’Épinal.

Continentale nutrition. tout à reconstruire ! Une première victoire qui en appelle une autre, définitive : le réaménagement du site de Vedène avec un plan de formation pour les salariés licenciés et la création de 120 emplois, dont 40 réservés aux Conti qui se sont battus de bout en bout. Un résultat obtenu après 431 jours de lutte dont, en 2012, 315 jours d’occupation de leur usine d’aliments pour animaux abandonnée par la direction de Continentale Nutrition au profit d’une concentration, aidée par des fonds publics, autour de la maison mère de Boulogne-sur-Mer (Nord). Sur le terrain cédé à un prix raisonnable, la société APRC Développement d’Aix-en-Provence, démarchée par l’agence de développement économique du conseil général, devrait édifier des locaux dans lesquels pourraient s’installer des entreprises de logistique industrielle en 2014. L’année à venir sera donc pour ces Conti-ci celle de la reconstruction du site, de leurs vies et, pour beaucoup, de l’apprentissage d’un nouveau métier.

m-Real. quand la fatalité est mise en déroute. Il en aura fallu, de la sueur et de la salive, pour vaincre. Journées portes ouvertes, marches pour l’emploi, visites de candidats à la présidentielle, sièges des ministères, constitution, à l’initiative du maire PCF d’Alizay (Eure), d’un large front politique pour les défendre, bataille pour l’expropriation pour des raisons d’utilité publique, etc. Pendant plus de trois ans, les ouvriers de M-Real, fleuron de l’industrie papetière, ont imaginé des alternatives à la fermeture pure et simple de leur usine décidée par leurs propriétaires finlandais : un de leurs projets les associait avec leurs voisins de la raffinerie Petroplus. Début décembre, ils ont gagné ! Si l’État a reculé devant la nationalisation à Florange, le département de l’Eure a porté un projet de « départementalisation » : le 10 décembre, le conseil général s’est porté acquéreur de l’usine de papier d’Alizay par une décision unanime. Il se fait l’intermédiaire d’une transaction entre le vendeur M-Real et les acheteurs, un groupe thaïlandais associé à une filiale du groupe Direct Énergie. À terme, près de deux cent cinquante emplois devraient être recréés sur place.

sobrena. Une lutte le vent en poupe à Brest. Au printemps dernier, en pleine campagne présidentielle, les 210 salariés de la Sobrena, entreprise de réparation navale de Brest (Finistère), obtiennent la sauvegarde de leurs emplois, après 6 mois de lutte et d’actions quotidiennes avec le soutien de la population locale, des élus, de la presse. Alors que l’entreprise avait été placée en redressement judiciaire en décembre 2011, le tribunal de commerce valide fin mars la reprise par le néerlandais Damen, qui s’engage à garder tous les salariés, alors qu’Eiffage voulait reprendre l’activité mais en supprimant cent emplois. Pour marquer cette victoire, les salariés démontent l’étrave qu’ils avaient érigée face à l’hôtel de ville de Brest pour symboliser leur lutte, vers un rond-point à l’entrée de la ville.

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BRUNO FORNACIARI

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