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30 juillet 2012 1 30 /07 /juillet /2012 07:17

le 29 Juillet 2012

Les JO de Londres enchaînent les bourdes diplomatiques

La délégation indienne a adressé une plainte samedi au comité d'organisation des jeux Olympiques de Londres.

 

En cause, la présence d'une parfaite inconnue en tête du défilé des athlètes lors de la cérémonie d'ouverture vendredi soir. Pour Londres 2012, il s'agit de la troisième bourde diplomatique en quatre jours.


Mais qui est cette dame en haut rouge et pantalon turquoise qui défile au côté de Sushil Kumar, le porteur du drapeau de la délégation indienne? Les officiels du comité olympique d'Inde ont demandé la veille des éclaircissements aux organisateurs anglais. Le chef de mission aux Jeux Muralidharan Raja a expliqué: "Elle n'avait rien à faire là. C'est une intrusion pure et simple. On a soulevé la question auprès des organisateurs. On ne sait pas qui elle est ni comment elle est parvenue là. C'est une honte. On demande des excuses."

 

Une volontaire "trop enthousiaste"


Enquête réalisée, Sebastian Coe, président du LOCOG (comité d'organisation) a expliqué ce dimanche que l'intruse faisait partie des 7.500 volontaires qui ont participé à la cérémonie d'ouverture dans le Stade olympique. "Il est clair qu'elle était trop enthousiaste. Elle n'aurait pas du (entrer sur la piste où défilaient les athlètes), elle n'aurait pas être là", a-t-il ajouté, soulignant qu'il allait parler de cet incident avec le chef de la délégation indienne.

 

Devant un milliard de téléspectateurs


Le mal est fait pour les athlètes indiens: cette intrue a pris toute la lumière médiatique. Elle était en tête du cortège lorsque les sportifs du sous-continent ont fait leur entrée dans le stade olympique, juste au moment où les caméras (et les yeux d'un milliard de téléspectateurs estimés) étaient pointés du eux. Il s'agissait pourtant d'un moment historique pour le sport indien, qui présente à Londres son plus grand contingent d'athlètes (81).

 

 

Les Indiens sont d'autant plus choqués qu'ils continuent par ailleurs de protester contre la présence parmi les parraineurs des JO de Londres du géant de l'industrie chimique, Dow Chemical, propriétaire de l'usine du groupe Union Carbide qui a causé le pire accident industriel de l'histoire à Bhopal en 1984. Des enfants handicapés vivant près de l'usine indienne de Bhopal, d'où s'était échappé un nuage de gaz toxique en 1984, ont manifesté jeudi dernier contre le sponsor des JO.

 

Gallois et Nord-Coréens fâchés

Les Indiens rejoignent les Gallois et les Nord-Coréens au rang des nations fâchées par le comité d'organisation. Après avoir provoqué un mini incident diplomatique mercredi en affichant le drapeau sud-coréen avant un match de football féminin de la Corée du Nord, les organisateurs des Jeux olympiques ont dû s'infliger jeudi une deuxième séance de contrition publique en moins de 24 heures.

 

Cette fois, comble du sacrilège sur les terres de sa Gracieuse majesté, ils ont dû s'excuser d'avoir attribué la nationalité anglaise à un joueur gallois de l'équipe de Grande-Bretagne dans le programme officiel du match du tournoi de football masculin contre le Sénégal à Manchester. Les Jeux olympiques, auxquels la sélection britannique de football n'avait plus participé depuis ceux de Rome en 1960, est la seule grande compétition internationale où la Grande-Bretagne aligne une équipe composée de joueurs anglais et gallois, les fédérations écossaise et nord-irlandaise ayant repoussé l'invitation.

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29 juillet 2012 7 29 /07 /juillet /2012 20:46
« Portrait du Journaliste en Sarkozyste » (extraits de Profession : Elkabbach)

par Vincent Quivy, le 26 juillet 2012

Nous publions ci-dessous, avec l’accord de son auteur des extraits du premier chapitre de son livre, Profession : Elkabbach [1] dont nous avons rendu compte par ailleurs.

Pour comprendre ce qui suit, un rappel de quelques épisodes d’une longue carrière, commencée avant 1968 peut être utile. PDG de France Télévisions de 1993 à 1996, contraint de démissionner en raison des contrats faramineux qu’il avait consentis à des animateurs-producteurs, Jean-Pierre Elkabbach revient alors à Europe 1 (où il avait déjà trôné de 1981 à 1988). Il en deviendra animateur d’antenne puis président, alors qu’il est administrateur au sein du groupe du propriétaire, Arnaud Lagardère, président de Lagardère Media. L’annonce par erreur de la mort de Pascal Sevran lui vaudra de perdre son poste de président d’Europe 1 en juin 2008, mais il est nommé à la direction de Lagardère News et maintenu à l’antenne de la radio pour son interview matinale. Cumulard, de 2000 à 2009, il est président de la chaîne parlementaire Public Sénat. (Acrimed)

« Portrait du Journaliste en Sarkozyste  » (extraits)

 


Avril 2008 : Jean-Pierre Elkabbach est à son apogée, pilier incontournable de l’univers audiovisuel, commandeur voué par le temps à imposer sa morgue et son la au petit univers politico-médiatique français. Soutien et ami d’un président de la République, Nicolas Sarkozy, aux allures de Roi soleil, exécuteur de confiance d’un baron d’industrie, Arnaud Lagardère, devenu maître d’un empire médiatique sans équivalent dans l’Hexagone, homme lige des parlementaires français qui l’ont choisi, dans une belle unanimité, pour diriger leur chaîne télévisée, Public Sénat, il est aussi un animateur écouté, un intervieweur recherché, un patron de radio, Europe 1, craint et donc respecté.

 

Respecté ? Hum, le mot paraît fort. Car la radio privée qu’il dirige alors, « fleuron du groupe Lagardère », devient en 2007 dans la bouche de beaucoup « Radio Sarko ». Un surnom qui n’a rien de gratifiant pour une vieille maison qui s’est longtemps voulu « reine de l’info », réactive et « objective », indépendante. Un surnom qui doit justement beaucoup à Jean-Pierre Elkabbach dont les liens et le soutien au ministre de l’Intérieur devenu président de la République sont anciens et connus et dont les saillies verbales et les interventions maladroites font jaser.

 

Car Jean-Pierre Elkabbach n’est pas un patron ordinaire, pas du genre à s’investir dans la gestion et la direction des affaires, dans l’administration silencieuse et prenante d’une grande entreprise. Non, son truc à lui, c’est « l’antenne » et plus précisément l’interview politique qu’il anime chaque matin sur Europe 1 depuis des années. Rares sont en effet les patrons de l’audiovisuel qui sont à la fois président et journaliste, ont leur « case » et leurs émissions. Comment concilier les obligations prenantes que suppose la direction d’une grande entreprise de plus de 250 employés et une activité

 

d’intervieweur toujours sur la brèche, posé derrière un micro chaque matin de semaine ? « Ce qui le fait se lever le matin, c’est l’antenne, c’est ça son truc, confirme un ancien d’Europe 1. Honnêtement, on sentait bien que le boulot de pdg ne l’intéressait pas. Ce qui l’intéressait c’étaient les attributs du pouvoir, l’apparence, le titre. »

Une double casquette un brin encombrante. Car les remarques et les questions de l’éditorialiste-intervieweur qui d’ordinaire n’engagent que lui ont un autre écho quand elles émanent du big boss. Elles donnent le ton et la ligne de la station, définissent son identité et sa couleur.

 

« Vous n’êtes pas de l’UMP, Jean-Pierre Elkabbach ! »


Or en ces temps très sarkozystes, le pdg d’Europe 1 n’est pas des plus neutres et laisse percer un attachement très fort au plus puissant, témoin ce dialogue entendu en pleine campagne électorale. Nous sommes le 28 janvier 2007, à quelques semaines de l’élection présidentielle, Jean-Pierre Elkabbach reçoit au micro d’Europe 1 un des proches de la candidate Ségolène Royal, Jean-Louis Bianco. Le socialiste, très énervé par un discours de Nicolas Sarkozy dans lequel l’homme de droite s’est emparé de Jean Jaurès, figure historique de la gauche, fait part de son indignation. Une indignation que notre patron de radio ne partage pas et qui le pousse, comme souvent, à passer du rôle d’intervieweur à celui de juge très affirmatif : « Mais par exemple, intervient-il agacé, Mitterrand pouvait parler de Maurras, de Chardonne… De la gauche, de Blum… » Jusque là rien de grave mais la partie de ping-pong connaît une étrange tournure quand Jean-Louis Bianco s’en prend à « l’inspirateur » supposé du discours, « Franck Tapiro, vous le savez, le conseiller en communication, l’un des nombreux conseillers en communication de Monsieur Sarkozy. »

  Suite du dialogue :

 

Jean-Pierre Elkabbach : « Oui, mais enfin, notre inspirateur, ce n’est pas monsieur »


Jean-Louis Bianco : « C’est l’inspirateur... »


Jean-Pierre Elkabbach : « Comment il s’appelle ? »


Jean-Louis Bianco : « Tapiro ! »


Jean-Pierre Elkabbach : « Non, ce n’est pas notre inspirateur. »


Jean-Louis Bianco : « Mais pourquoi vous dites “notre” inspirateur ? »


Jean-Pierre Elkabbach : « Ce n’est pas nos... nos... On n’a pas besoin... »


Jean-Louis Bianco : « Vous n’êtes pas de l’UMP, Jean-Pierre Elkabbach ! »


Jean-Pierre Elkabbach : « Non, non, ni à l’UMP, ni... »


Jean-Louis Bianco : « “Notre” inspirateur »…

 

Un « lapsus » parmi d’autres qui a laissé des traces dans les mémoires des journalistes de la station et dans le petit monde des médias parisiens. Difficile en effet après ce « notre » très UMP de ne pas assimiler Europe 1 à Nicolas Sarkozy.

C’est qu’en plus des lapsus, il y eut le ton et la manière d’interroger les uns ou les autres. Cette façon de faire la leçon aux syndicalistes qui ne comprennent pas l’importance que lui, baron d’Empire lucide et progressiste, sait accorder aux réformes du gouvernement ; cet art d’interroger Nicolas Sarkozy en intégrant dans ses questions les lignes force de la pensée du président comme s’il les faisait siennes ; ce « Bravo ! » lancé avec naturel au socialiste Éric Besson après son ralliement en pleine campagne présidentielle au panache du candidat de l’UMP [2].

 

Au delà, il y a ces relations entretenues avec assiduité avec un ministre puis un candidat puis un Président. Ainsi prend-on l’habitude de le voir dans l’ombre de Nicolas Sarkozy au cours de multiples voyages, non pas, comme le note l’éditorialiste Jean-Michel Aphatie qui en a pourtant vu d’autres, du côté des journalistes mais parmi la « délégation officielle », au milieu des ministres et des « invités personnels » de l’homme d’État. « N’était-il pas, géographiquement et donc professionnellement, passé de l’autre côté de la barrière, c’est-à-dire exactement à l’endroit où les journalistes ne devraient pas être ? » se demande le confrère avant d’avouer que poser la question c’est déjà y répondre [3]. Ainsi le patron d’Europe 1 apparaît-il sur nombre de photos juste derrière le président, ombre fidèle parmi les fidèles, « officiel » perdu parmi les personnalités, loin de la « meute » des journalistes repoussée en périphérie. […]

 

Un fils (pas très) spirituel


« Ce qui a profondément changé avec Sarkozy, estime un journaliste politique, c’est que Elkabbach a participé à son ascension, à son éclosion, il l’a repéré et aidé. De sorte que les rapports ne sont plus du tout les mêmes qu’avec Chirac ou Mitterrand. » Les relations avec les deux prédécesseurs de M. Sarkozy, si elles étaient amicales et suivies, n’en étaient pas moins marquées par une certaine distance qui sépare le journaliste du politique. Avec eux, même s’il en fut proche, Elkabbach est resté de l’autre côté de cette « barrière » qu’évoquait Jean-Michel Aphatie. Avec Sarkozy, ce ne sont plus réellement des relations de journaliste à politique. Une question d’âge peut-être : Mitterrand et Chirac étaient plus vieux que Jean-Pierre Elkabbach, Nicolas Sarkozy est presque de vingt ans son cadet. Quand les deux premiers se sont lancés dans la « carrière », notre baron n’était pas encore journaliste ou si jeune, dans le cas de Chirac, qu’il ne pouvait qu’être spectateur. Quand Nicolas Sarkozy entre dans l’arène, Elkabbach est un personnage important du petit univers médiatico-politique, il en a l’assurance et les certitudes, l’entregent et le bagout, il est en position de pouvoir conseiller et valoriser quelques jeunes ambitieux dont il sait repérer le talent.

 

« Il est très content d’avoir connu Sarko quand il avait dix-huit ans, raconte un journaliste d’Europe 1. Très jeune en effet, Sarko le harcèle pour être son invité. Et Elkabbach sent le mec qui a du potentiel. »

De cette rencontre ancienne, entre celui qui n’est encore personne mais cherche à devenir quelqu’un et celui qui est déjà quelqu’un mais aspire à être encore plus, naissent les prémices d’une complicité qui s’appuie sur les intérêts bien compris de l’un et de l’autre et qui va prendre forme à mesure que le jeune Sarkozy va se faire un nom.

« Elkabbach a toujours été à l’affût des “nouveaux talents” de la politique, analyse un journaliste, les gens dont il perçoit qu’ils ont un avenir et, plus prosaïquement, des personnes qui aient le talent et la carrure pour être des “bons clients” de ses émissions politiques. » C’est que, comme l’explique un ex-journaliste d’Europe 1, « il sait qu’un bon interview repose bien sûr sur le talent de l’intervieweur mais aussi sur le charisme de l’interviewé. » […]

 

« Télé Sarko »


[…] Sous la présidence de Jean-Pierre Elkabbach, Nicolas Sarkozy est l’invité à de nombreuses reprises du journal de 20 heures de France 2, une place enviée qui lui permet de se faire connaître et d’imposer son personnage à une large partie des Français. Une présence qui répond, certes, au fait que le jeune Sarkozy est aussi porte-parole du gouvernement mais pas seulement. Ainsi quand, en février 1994, il fait paraître une biographie du personnage un peu oublié qu’est Georges Mandel, il a droit aux honneurs de la « grande messe du 20 heures » qui assure à son ouvrage une publicité des plus sympathiques. Peu d’écrivains ont bénéficié d’un tel traitement. […]

 

Dans l’optique d’Elkabbach, il y a donc aussi la conscience d’avoir affaire à une « bête médiatique », un brillant interlocuteur, accrocheur, séducteur, comme il les aime et avec lesquels il peut mener des entretiens vifs et remarqués. « Sarkozy, explique un journaliste d’Europe 1, a tout compris de l’art de la communication. Il sait ce qu’attend un type comme Elkabbach : un interview rapide, enlevé, avec du rythme et surtout des infos. Il faut toujours réserver une annonce, un petit scoop qui permettra à l’interview d’Elkabbach d’être reprise ou évoquée par les autres médias dans la journée. Tout le monde vous le dira : Elkabbach fonctionne “à la dépêche” ». Autrement dit, si un ministre ou une personnalité a la bonne idée de réserver l’exclusivité d’une information ou d’un projet au micro de Jean-Pierre Elkabbach, les agences de presse se feront un devoir de rédiger une ou plusieurs dépêches dans lesquelles elles rappelleront le nom de l’intervieweur et de son émission. Dépêches qui elles-mêmes seront reprises par la presse, les radios et les télés. De quoi flatter son ego et s’assurer une bonne publicité.

Car l’intérêt pour le journaliste dans ce jeu de relations avec le politique ne se limite pas à l’espoir de facilités de carrière ou de privilèges divers. Être l’ami de Nicolas Sarkozy, c’est être au cœur du pouvoir, être informé en permanence, bénéficier avant les confrères de la teneur des décisions et des projets. Et pouvoir, dans la guerre sans répit qu’est la course aux infos, « griller » les concurrents. Ainsi se noue un rapport dont chacune des deux parties profite à tous niveaux, en terme d’information comme en terme de carrière. […]

 

 

« Radio Sarko »


[…] « Clairement, dit une journaliste politique d’une radio concurrente, pour Sarkozy, Europe 1 était un enjeu considérable. Autant il était peu concerné par une radio comme France Inter qui traditionnellement est écoutée par un public plutôt à gauche, autant il était à fond sur Europe, attentif au moindre commentaire, mettant une “pression” incroyable sur les journalistes [politiques] de la station. »


« C’est vrai que les choses ont changé avec le départ de [Jérôme] Bellay, analyse un ancien d’Europe, pas parce que Sarkozy intervenait davantage ou plus directement, moi personnellement je ne l’ai pas vu et je n’ai rien entendu dans ce sens, mais parce que Bellay était dans la rédaction, tout le temps, à préparer les éditions, les journaux. Ça avait des inconvénients mais ça avait un avantage : il servait de paravent, il était solidaire et s’il y avait des retours, c’est par lui que ça passait. Avec Elkabbach, c’était différent. Il était rarement là, et quand il y était c’était surtout pour son interview du matin, le reste du temps, il déléguait. Parfois, simplement, il donnait des infos, en disant : “tiens, j’ai dîné avec tel ministre, il paraît que…” Parfois on le croisait à des réceptions ou des conférences de presse. On ne savait pas trop au nom de quoi il était là. C’était bizarre. »


« Quand j’étais rédac chef, se souvient un autre ancien, jamais il ne m’a donné une instruction, jamais. Alors c’est vrai, maintenant que j’y réfléchis, je pense qu’il y avait beaucoup d’autocensure, de ma part et de la part des autres. Par peur du groupe Lagardère, de lui, des retombées. Tout un contexte qui faisait que j’étais moins libre qu’aujourd’hui, qu’on n’avait pas les c… de balancer des trucs sur Sarko. Sans doute qu’il n’y avait pas ce même rapport qu’avec Bellay, ce côté patron solidaire et uni dont on savait qu’il serait là pour nous défendre. Avec Elkabbach, franchement, ce n’était pas le cas. On se demandait en cas de clash avec Sarko, dans quel camp il se mettrait… »

Autocensure, peur, retombées, autant d’éléments qui ne poussent pas à trop enquêter ou critiquer le futur président ? Jean-Pierre Elkabbach affirme qu’il n’est jamais intervenu. Le « contexte » se suffisait à lui-même. […]

 

« Comme jadis à Versailles »


C’est que Jean-Pierre Elkabbach n’a pas pour ami, on l’aura compris, que Nicolas Sarkozy. Ses relations avec le chef de l’État ne sont pas un accident de parcours, un hasard ou une nécessité due à un quelconque « coup de foudre de l’amitié », non, elles sont, au contraire, la partie immergée de l’iceberg, de toute une vie professionnelle passée dans l’antichambre du pouvoir.

 

« Le salon des Ambassadeurs est la pièce centrale, côté jardin, du Château [de l’Élysée], écrit Saïd Mahrane. Y accèdent uniquement ceux qui ont un petit point rouge sur leur carton d’invitation. Soit une centaine de personnes sur les 8 000 conviées ce jour-là. C’était le 14 juillet 2008. Dans le salon des Ambassadeurs, les “choses de la cour” se jouaient à huis clos. Comme jadis à Versailles, entre les pilastres du salon d’Hercule, quand Louis XIV recevait. Étienne Mougeotte, Jean-Pierre Elkabbach et Catherine Nay se disent maintes choses à voix basse. [4] » Là au milieu des gens qui comptent, dans les salons dorés de la République, il est à son aise, chez lui, allant de l’un à l’autre, personnage familier de la cour, baron bien connu ayant survécu à nombre de souverains, maréchal émérite des médias ayant servi tous les régimes. De droite ou de gauche, du centre ou de la périphérie.

 

« Au fond, analyse Christian Guy, ex-journaliste télé qui a travaillé avec Jean-Pierre Elkabbach, il a toujours eu une relation bizarre avec le politique. Ça a dû à un moment se mélanger dans sa tête. Bien sûr, quand on est journaliste politique, on est amené à avoir des relations avec les dirigeants mais il y a une limite, une barrière que l’on perçoit très vite. Lui cherchait à aller au-delà, entretenait des relations qui n’étaient plus professionnelles, ça nourrissait une ambition, la volonté d’appartenir à leur monde, d’être admis parmi eux. Je me suis demandé s’il n’allait pas franchir le pas et finir par abandonner le journalisme pour la politique. » […]

 

Il fréquente l’Élysée et les ministères, il est de ces « clubs » très parisiens où se côtoie la fine fleur des décideurs français. Il fut de la « Fondation Saint-Simon », créée par François Furet puis dissoute en 1999, regroupant intellectuels, grands patrons, hommes de médias et hauts responsables politiques. Il est du « Siècle », le « club des clubs », le « réseau des réseaux », « la quintessence du pouvoir politique, économique et médiatique » où se retrouvent des gens comme Patrick Poivre d’Arvor, Dominique Strauss-Kahn, Thierry Breton, Claude Bébéar ou Nicole Notat. « Tous sont membres du Siècle, le plus prestigieux des cercles de décideurs hexagonaux. [5] ».Un cercle qui comptait en 2007, selon son secrétaire général Etienne Lacour, outre Nicolas Sarkozy et François Fillon, quinze membres du gouvernement [6].

[…] Une fréquentation assidue qui ne semble pas lui peser pourtant et qu’il assume avec entrain à soixante-dix ans passés. Du petit monde de la politique française, il connaît tous les rouages, les visages et les usages. Il s’y est fait des amis de longues dates, des complices et des intimes : Jacques Attali, Julien Dray, Thierry Breton, Dominique Strauss-Kahn… Il petit-déjeune, déjeune et dîne avec tout ce monde important.

 

Part-il en vacances ? Il y retrouve Jacques Chirac, adepte comme lui d’un luxueux hôtel de l’île Maurice : « Les promenades [avec Chirac] à travers l’île, les dîners, les conversations, assis à la même table, légère ou graves, souvent personnelles, sont d’ordre privé et le resteront », écrit Jean-Pierre Elkabbach dans un des ses livres. Rentre-t-il de ses vacances ? Il court retrouver le président de l’époque : « François Mitterrand à qui rien ne pouvait rester caché avait aussi appris ces rencontres de vacances. Il m’accueillait parfois à mon retour, d’un souriant : “Comment va votre ami mauricien ? [7]  »

A-t-il besoin de prendre une décision importante ? Il dîne avec un ancien ministre de ses amis : « Je connaissais depuis longtemps cet homme politique [Charles Millon] sincère et réaliste [il sera un des rares présidents de région à accepter de s’allier au Front National], doté de fortes convictions qu’il met en œuvre depuis longtemps dans sa région. […] Ambitieux, il n’était ni candide, ni cynique. Je lui exposai toutes les hypothèses, j’avais confiance en son exigence et son pragmatisme. » L’ex-ministre lui dit alors : « Il faut […] tenter l’aventure. C’est probablement le sens de ton destin, saisis-le ! » Et notre journaliste indépendant de conclure : « Ce soir-là, je décidai de présenter ma candidature au poste de président de France Télévision. [8] »


L’homme qui murmurait à l’oreille des politiques


[…] Dans le microcosme, on sait l’intérêt stratégique de faire entendre sa voix à une heure de grande écoute et à une époque où les émissions politiques se font de plus en plus rares. On sait aussi les retombées positives d’une émission où, de l’avis général, on « ne se sent jamais piégé », on n’est « jamais pris au dépourvu ».

 

Un « travail à l’ancienne », selon l’expression d’un journaliste : les interviews sont préparées et les questions font l’objet de « négociations ». Il ne s’agit pas de passer à côté du sujet brûlant, l’info polémique que tout le monde attend, mais il ne s’agit pas non plus de coincer l’invité. Un jeu d’équilibriste dans lequel Jean-Pierre Elkabbach se montre toujours brillant, quitte à, avant de passer à l’antenne, convaincre avec insistance l’interviewé d’aborder des thèmes dont il ne veut pas entendre parler. « Il y a toujours un deal, explique un ancien d’Europe 1, poser une seule question sur le sujet qui fâche et promettre ensuite de passer à autre chose. “Jean-François Copé, on est obligés de parler de votre appartement de fonction, je ne vous pose qu’une question mais on ne peut pas passer à côté”. Il va lui poser la question qui dérange mais l’autre sait qu’Elkabbach n’ira pas trop loin, qu’il va pouvoir répondre, qu’il va même être briefé pour répondre : “Répondez court, n’en faites pas des tonnes, 30 secondes pas plus, sinon on ne comprend rien.” Il est étonnant. »

place à la limite de l’intervieweur et du conseiller : “tu devrais faire ça, tu devrais dire ceci… Est-ce que tu as quelque chose à dire ? Qu’est-ce que tu me donnes ?” Et qui ensuite met en scène son interview par rapport à ces éléments. C’est un metteur en scène. » […]

 

Du haut de son trône médiatique, l’homme sélectionne en fonction de ses propres critères. Il a des inimitiés, tel le socialiste Arnaud Montebourg qu’il trouve bien trop « jusqu’au-boutiste » ou Ségolène Royal, une des rares à avoir refusé son invitation, il a des idées fixes : avoir la carrure et les compétences, ne pas dépasser les lignes du politiquement acceptable. « Il m’a invité un jour à déjeuner, confie un député de premier plan, et il m’a posé toute une série de questions. J’avais l’impression de passer un examen. C’était d’autant plus étrange qu’il rétorquait à mes points de vue, comme si nous étions deux hommes politiques face à face. Il m’a exposé ses idées. À la suite de quoi, j’ai été invité à son émission. » L’homme conçoit son interview comme une émission importante de la vie politique, pas question donc d’y convier des sans-grade ou des médiocres. Certains ministres attendent toujours d’y être invités, sans résultat. Pas question non plus de procéder à l’interview sans un peu de cérémonial. Quand Jean-Pierre Elkabbach reçoit, il est bon de montrer qu’il ne s’agit pas d’un rendez-vous banal ou d’une interview comme on en fait sur les chaînes concurrentes. […]

 

Une visite « historique »


Plus que la double casquette de « journaliste indépendant » et de faire-valoir des sénateurs, c’est avant tout le cumul privé-public dont use Jean-Pierre Elkabbach qui suscite la critique. « Comment trouver normal, interroge par exemple l’ancien homme fort du Monde, Edwy Plenel, que le responsable d’une radio privée, propriété d’un groupe médiatique dominant, Lagardère, soit en même temps celui d’une télévision publique, celle du Sénat ? Que nos sénateurs, droite et gauche confondues, assurent en la personne de Jean-Pierre Elkabbach la présence à demeure auprès de l’une des deux assemblées parlementaires d’un représentant dévoué des intérêts d’un industriel est un évident mélange des genres. [9]  »

Quand en 2000, il prend la présidence de Public Sénat, notre « baron d’Empire » n’est pas encore patron d’Europe 1 mais déjà « conseiller spécial pour la stratégie médias du Groupe Lagardère ». « J’ai l’assentiment de Jean-Luc et Arnaud Lagardère », se justifie notre journaliste. On les comprend. À l’heure où se discute à l’Assemblée et au Sénat une nouvelle loi sur l’audiovisuel et au moment où le groupe privé se réoriente justement pour devenir un poids lourds du paysage médiatique français, les deux hommes d’affaire ne peuvent pas voir d’un mauvais œil leur « conseiller » en « stratégie médias » pénétrer le cœur de la République. Combien de grandes sociétés rêveraient en effet de bénéficier d’un tel appui et s’économiseraient ainsi les frais d’une coûteuse politique de lobbying ?

 

« Il est dans une confusion des rôles, estime un ancien d’Europe 1. C’est clairement quelqu’un qui travaille pour Lagardère, qui en est le lobbyiste. Il a un bureau rue de Presbourg [siège de la société Lagardère], un rue François Ier [siège d’Europe 1], un à Public Sénat. Il est relation avec les cercles médiatiques, politiques, économiques, dans la confusion permanente. C’est un homme qui est capable de se transformer en promoteur de l’Airbus A380 parce qu’il est fabriqué par EADS dont Lagardère est actionnaire ou d’accompagner Nicolas Sarkozy à Alger en tant qu’ami parce qu’il a des liens particuliers avec Bouteflika [président algérien]. »

 

Une critique que l’on balaie du côté du Sénat arguant que les parlementaires se félicitent du travail fait par ce « grand professionnel » de l’audiovisuel qui a su donner une visibilité, une cohérence et une certaine notoriété à la chaîne. Ses liens avec le groupe Lagardère ? Faut-il vraiment se plaindre d’avoir avec soi un homme haut placé dans un groupe qui possède des radios, des journaux, des magazines dans lesquels il est si important d’apparaître quand on fait de la politique ?

Seuls les journalistes d’Europe 1 trouvent à redire à cet étrange mélange de fonction. En 2008, ils ont jugé un peu saumâtre qu’à quelques mois du renouvellement de son mandat à la tête de Public Sénat, le double président impose en plein journal une interview du… président du Sénat justement. Et de s’interroger sur l’actualité et l’acuité de ce brave Christian Poncelet que d’ordinaire les médias ne se disputent pas. C’est que, répond Jean-Pierre Elkabbach, l’homme est le « deuxième personnage de l’État » et effectuait, avec toute une délégation de sénateurs, une visite capitale en Chine qui, à n’en pas douter, restera dans l’histoire. Ce qui est sûr c’est qu’Elkabbach lui-même faisait partie de cette délégation en tant que président de Public Sénat et que le président d’Europe 1 était donc aux premières loges pour juger de l’intérêt du voyage de… son patron.

 

Vincent Quivy

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27 juillet 2012 5 27 /07 /juillet /2012 22:31

Social-Eco - le 27 Juillet 2012

Les délocalisations du STIF posent la question de l’attribution des marchés publics

Alors que le Syndicat des Transports d’Île de France (STIF) va délocaliser deux centres d’appels vers le Maroc, le sénateur socialiste Luc Carvounas demande la « refonte générale » du code régissant l’attribution des marchés publics. La règlementation impose d’accorder tout marché au mieux disant, ce qui peut désavantager les entreprises françaises. Problème : les directives européennes risquent d’empêcher toute réforme allant vers plus de protectionnisme.


Le sénateur-maire d’Alfortville, Luc Carvounas, réclame ce vendredi une « refonte générale du code des marchés publics » après que le STIF a attribué, au terme d’un appel d’offre classique, une partie de ses services de relations client à un sous-traitant marocain. Cela provoque la délocalisation pour 2013 de deux centres d’appels jusque là situés dans l’hexagone, mais Luc Carvounas explique que le Syndicat n’avait pas le choix : il a dû choisir, « conformément à la règlementation, l’offre la plus avantageuse économiquement ».

 

La loi empêche de privilégier les entreprises françaises


Les règles, issues des directives européennes, imposent en effet d’attribuer tout marché public au prétendant le moins coûteux, ce qui empêche les pouvoirs publics de privilégier les entreprises nationales. Cela peut aboutir à des délocalisations involontaires, comme l’illustre aujourd’hui l’affaire du STIF, et pose donc la question de la réforme des mécanismes d’attribution : Jean-Paul Huchon, président du Syndicat, écrit dans un courrier adressé au Ministre du Redressement productif son souhait de lancer « une véritable réflexion à ce sujet » qu’il qualifie « d’importance », et le sénateur Luc Carvounas émet ce vendredi les premières idées.

 

Un protectionnisme sur le modèle américain ?


Il demande une « refonte générale » de la règlementation en vigueur, afin de pouvoir « assumer pleinement d’avantager nos entreprises ». Prenant l’exemple du modèle américain, qui impose par le biais du Buy American Act (une loi fédérale de 1933) que « toutes les marchandises destinées à l'usage public doivent être produites aux Etats-Unis », il souhaite que des dispositions similaires puissent être prises en France pour garantir l’attribution des marchés publics à des entreprises françaises en priorité.

 

L’obstacle des règlementations européennes


Mais une telle réforme pourrait s’avérer impossible à mettre en œuvre en raison des règlementations européennes qui régissent le sujet, auxquelles le droit français doit se plier. Si François Hollande a exhorté aujourd’hui les responsables publics à « faire autant qu’il est possible prévaloir le travail en France » à chaque fois qu’ils en ont la possibilité, il a clairement rappelé qu’ « il y a aussi des contraintes qui existent au plan européen et qui doivent être respectées ».

« Je ne suis pas favorable à ce que nous entrions dans une surenchère protectionniste », a-t-il ajouté, exprimant ainsi son hostilité à l’idée d’une réforme allant dans le sens prôné par Luc Carvounas.

 

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27 juillet 2012 5 27 /07 /juillet /2012 22:29

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27 juillet 2012 5 27 /07 /juillet /2012 19:37

 

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26 juillet 2012 4 26 /07 /juillet /2012 21:25
« Portrait du Journaliste en Sarkozyste » (extraits de Profession : Elkabbach)

par Vincent Quivy, le 26 juillet 2012

 

Nous publions ci-dessous, avec l’accord de son auteur des extraits du premier chapitre de son livre, Profession : Elkabbach [1] dont nous avons rendu compte par ailleurs.

Pour comprendre ce qui suit, un rappel de quelques épisodes d’une longue carrière, commencée avant 1968 peut être utile. PDG de France Télévisions de 1993 à 1996, contraint de démissionner en raison des contrats faramineux qu’il avait consentis à des animateurs-producteurs, Jean-Pierre Elkabbach revient alors à Europe 1 (où il avait déjà trôné de 1981 à 1988). Il en deviendra animateur d’antenne puis président, alors qu’il est administrateur au sein du groupe du propriétaire, Arnaud Lagardère, président de Lagardère Media. L’annonce par erreur de la mort de Pascal Sevran lui vaudra de perdre son poste de président d’Europe 1 en juin 2008, mais il est nommé à la direction de Lagardère News et maintenu à l’antenne de la radio pour son interview matinale. Cumulard, de 2000 à 2009, il est président de la chaîne parlementaire Public Sénat. (Acrimed)

« Portrait du Journaliste en Sarkozyste  » (extraits)


Cet animateur télé qui bouge encore


Avril 2008 : Jean-Pierre Elkabbach est à son apogée, pilier incontournable de l’univers audiovisuel, commandeur voué par le temps à imposer sa morgue et son la au petit univers politico-médiatique français.

 

Soutien et ami d’un président de la République, Nicolas Sarkozy, aux allures de Roi soleil, exécuteur de confiance d’un baron d’industrie, Arnaud Lagardère, devenu maître d’un empire médiatique sans équivalent dans l’Hexagone, homme lige des parlementaires français qui l’ont choisi, dans une belle unanimité, pour diriger leur chaîne télévisée, Public Sénat, il est aussi un animateur écouté, un intervieweur recherché, un patron de radio, Europe 1, craint et donc respecté.

 

Respecté ? Hum, le mot paraît fort. Car la radio privée qu’il dirige alors, « fleuron du groupe Lagardère », devient en 2007 dans la bouche de beaucoup « Radio Sarko ». Un surnom qui n’a rien de gratifiant pour une vieille maison qui s’est longtemps voulu « reine de l’info », réactive et « objective », indépendante.

 

Un surnom qui doit justement beaucoup à Jean-Pierre Elkabbach dont les liens et le soutien au ministre de l’Intérieur devenu président de la République sont anciens et connus et dont les saillies verbales et les interventions maladroites font jaser.

 

Car Jean-Pierre Elkabbach n’est pas un patron ordinaire, pas du genre à s’investir dans la gestion et la direction des affaires, dans l’administration silencieuse et prenante d’une grande entreprise.

 

Non, son truc à lui, c’est « l’antenne » et plus précisément l’interview politique qu’il anime chaque matin sur Europe 1 depuis des années. Rares sont en effet les patrons de l’audiovisuel qui sont à la fois président et journaliste, ont leur « case » et leurs émissions.

 

Comment concilier les obligations prenantes que suppose la direction d’une grande entreprise de plus de 250 employés et une activité d’intervieweur toujours sur la brèche, posé derrière un micro chaque matin de semaine ? « Ce qui le fait se lever le matin, c’est l’antenne, c’est ça son truc, confirme un ancien d’Europe 1. Honnêtement, on sentait bien que le boulot de pdg ne l’intéressait pas. Ce qui l’intéressait c’étaient les attributs du pouvoir, l’apparence, le titre. »


Une double casquette un brin encombrante. Car les remarques et les questions de l’éditorialiste-intervieweur qui d’ordinaire n’engagent que lui ont un autre écho quand elles émanent du big boss. Elles donnent le ton et la ligne de la station, définissent son identité et sa couleur.

 

« Vous n’êtes pas de l’UMP, Jean-Pierre Elkabbach ! »


Or en ces temps très sarkozystes, le pdg d’Europe 1 n’est pas des plus neutres et laisse percer un attachement très fort au plus puissant, témoin ce dialogue entendu en pleine campagne électorale. Nous sommes le 28 janvier 2007, à quelques semaines de l’élection présidentielle, Jean-Pierre Elkabbach reçoit au micro d’Europe 1 un des proches de la candidate Ségolène Royal, Jean-Louis Bianco. Le socialiste, très énervé par un discours de Nicolas Sarkozy dans lequel l’homme de droite s’est emparé de Jean Jaurès, figure historique de la gauche, fait part de son indignation. Une indignation que notre patron de radio ne partage pas et qui le pousse, comme souvent, à passer du rôle d’intervieweur à celui de juge très affirmatif : « Mais par exemple, intervient-il agacé, Mitterrand pouvait parler de Maurras, de Chardonne… De la gauche, de Blum… » Jusque là rien de grave mais la partie de ping-pong connaît une étrange tournure quand Jean-Louis Bianco s’en prend à « l’inspirateur » supposé du discours, « Franck Tapiro, vous le savez, le conseiller en communication, l’un des nombreux conseillers en communication de Monsieur Sarkozy. » Suite du dialogue :

Jean-Pierre Elkabbach : « Oui, mais enfin, notre inspirateur, ce n’est pas monsieur »
Jean-Louis Bianco : « C’est l’inspirateur... »
Jean-Pierre Elkabbach : « Comment il s’appelle ? »
Jean-Louis Bianco : « Tapiro ! »
Jean-Pierre Elkabbach : « Non, ce n’est pas notre inspirateur. »
Jean-Louis Bianco : « Mais pourquoi vous dites “notre” inspirateur ? »
Jean-Pierre Elkabbach : « Ce n’est pas nos... nos... On n’a pas besoin... »
Jean-Louis Bianco : « Vous n’êtes pas de l’UMP, Jean-Pierre Elkabbach ! »
Jean-Pierre Elkabbach : « Non, non, ni à l’UMP, ni... »
Jean-Louis Bianco : « “Notre” inspirateur »…

Un « lapsus » parmi d’autres qui a laissé des traces dans les mémoires des journalistes de la station et dans le petit monde des médias parisiens. Difficile en effet après ce « notre » très UMP de ne pas assimiler Europe 1 à Nicolas Sarkozy.

 

C’est qu’en plus des lapsus, il y eut le ton et la manière d’interroger les uns ou les autres. Cette façon de faire la leçon aux syndicalistes qui ne comprennent pas l’importance que lui, baron d’Empire lucide et progressiste, sait accorder aux réformes du gouvernement ; cet art d’interroger Nicolas Sarkozy en intégrant dans ses questions les lignes force de la pensée du président comme s’il les faisait siennes ; ce « Bravo ! » lancé avec naturel au socialiste Éric Besson après son ralliement en pleine campagne présidentielle au panache du candidat de l’UMP [2].

 

Au delà, il y a ces relations entretenues avec assiduité avec un ministre puis un candidat puis un Président. Ainsi prend-on l’habitude de le voir dans l’ombre de Nicolas Sarkozy au cours de multiples voyages, non pas, comme le note l’éditorialiste Jean-Michel Aphatie qui en a pourtant vu d’autres, du côté des journalistes mais parmi la « délégation officielle », au milieu des ministres et des « invités personnels » de l’homme d’État. « N’était-il pas, géographiquement et donc professionnellement, passé de l’autre côté de la barrière, c’est-à-dire exactement à l’endroit où les journalistes ne devraient pas être ? » se demande le confrère avant d’avouer que poser la question c’est déjà y répondre [3].

 

Ainsi le patron d’Europe 1 apparaît-il sur nombre de photos juste derrière le président, ombre fidèle parmi les fidèles, « officiel » perdu parmi les personnalités, loin de la « meute » des journalistes repoussée en périphérie. […]

 

Un fils (pas très) spirituel


« Ce qui a profondément changé avec Sarkozy, estime un journaliste politique, c’est que Elkabbach a participé à son ascension, à son éclosion, il l’a repéré et aidé. De sorte que les rapports ne sont plus du tout les mêmes qu’avec Chirac ou Mitterrand. » Les relations avec les deux prédécesseurs de M. Sarkozy, si elles étaient amicales et suivies, n’en étaient pas moins marquées par une certaine distance qui sépare le journaliste du politique. Avec eux, même s’il en fut proche, Elkabbach est resté de l’autre côté de cette « barrière » qu’évoquait Jean-Michel Aphatie.

 

Avec Sarkozy, ce ne sont plus réellement des relations de journaliste à politique. Une question d’âge peut-être : Mitterrand et Chirac étaient plus vieux que Jean-Pierre Elkabbach, Nicolas Sarkozy est presque de vingt ans son cadet. Quand les deux premiers se sont lancés dans la « carrière », notre baron n’était pas encore journaliste ou si jeune, dans le cas de Chirac, qu’il ne pouvait qu’être spectateur. Quand Nicolas Sarkozy entre dans l’arène, Elkabbach est un personnage important du petit univers médiatico-politique, il en a l’assurance et les certitudes, l’entregent et le bagout, il est en position de pouvoir conseiller et valoriser quelques jeunes ambitieux dont il sait repérer le talent.

 

« Il est très content d’avoir connu Sarko quand il avait dix-huit ans, raconte un journaliste d’Europe 1. Très jeune en effet, Sarko le harcèle pour être son invité. Et Elkabbach sent le mec qui a du potentiel. »


De cette rencontre ancienne, entre celui qui n’est encore personne mais cherche à devenir quelqu’un et celui qui est déjà quelqu’un mais aspire à être encore plus, naissent les prémices d’une complicité qui s’appuie sur les intérêts bien compris de l’un et de l’autre et qui va prendre forme à mesure que le jeune Sarkozy va se faire un nom.

 

« Elkabbach a toujours été à l’affût des “nouveaux talents” de la politique, analyse un journaliste, les gens dont il perçoit qu’ils ont un avenir et, plus prosaïquement, des personnes qui aient le talent et la carrure pour être des “bons clients” de ses émissions politiques. » C’est que, comme l’explique un ex-journaliste d’Europe 1, « il sait qu’un bon interview repose bien sûr sur le talent de l’intervieweur mais aussi sur le charisme de l’interviewé. » […]

 

« Télé Sarko »


[…] Sous la présidence de Jean-Pierre Elkabbach, Nicolas Sarkozy est l’invité à de nombreuses reprises du journal de 20 heures de France 2, une place enviée qui lui permet de se faire connaître et d’imposer son personnage à une large partie des Français. Une présence qui répond, certes, au fait que le jeune Sarkozy est aussi porte-parole du gouvernement mais pas seulement. Ainsi quand, en février 1994, il fait paraître une biographie du personnage un peu oublié qu’est Georges Mandel, il a droit aux honneurs de la « grande messe du 20 heures » qui assure à son ouvrage une publicité des plus sympathiques. Peu d’écrivains ont bénéficié d’un tel traitement. […]

 

Dans l’optique d’Elkabbach, il y a donc aussi la conscience d’avoir à faire à une « bête médiatique », un brillant interlocuteur, accrocheur, séducteur, comme il les aime et avec lesquels il peut mener des entretiens vifs et remarqués. « Sarkozy, explique un journaliste d’Europe 1, a tout compris de l’art de la communication. Il sait ce qu’attend un type comme Elkabbach : un interview rapide, enlevé, avec du rythme et surtout des infos. Il faut toujours réserver une annonce, un petit scoop qui permettra à l’interview d’Elkabbach d’être reprise ou évoquée par les autres médias dans la journée. Tout le monde vous le dira : Elkabbach fonctionne “à la dépêche” ». Autrement dit, si un ministre ou une personnalité a la bonne idée de réserver l’exclusivité d’une information ou d’un projet au micro de Jean-Pierre Elkabbach, les agences de presse se feront un devoir de rédiger une ou plusieurs dépêches dans lesquelles elles rappelleront le nom de l’intervieweur et de son émission. Dépêches qui elles-mêmes seront reprises par la presse, les radios et les télés. De quoi flatter son ego et s’assurer une bonne publicité.

 

Car l’intérêt pour le journaliste dans ce jeu de relations avec le politique ne se limite pas à l’espoir de facilités de carrière ou de privilèges divers. Être l’ami de Nicolas Sarkozy, c’est être au cœur du pouvoir, être informé en permanence, bénéficier avant les confrères de la teneur des décisions et des projets. Et pouvoir, dans la guerre sans répit qu’est la course aux infos, « griller » les concurrents. Ainsi se noue un rapport dont chacune des deux parties profite à tous niveaux, en terme d’information comme en terme de carrière. […]

 

« Radio Sarko »


[…] « Clairement, dit une journaliste politique d’une radio concurrente, pour Sarkozy, Europe 1 était un enjeu considérable. Autant il était peu concerné par une radio comme France Inter qui traditionnellement est écoutée par un public plutôt à gauche, autant il était à fond sur Europe, attentif au moindre commentaire, mettant une “pression” incroyable sur les journalistes [politiques] de la station. »


« C’est vrai que les choses ont changé avec le départ de [Jérôme] Bellay, analyse un ancien d’Europe, pas parce que Sarkozy intervenait davantage ou plus directement, moi personnellement je ne l’ai pas vu et je n’ai rien entendu dans ce sens, mais parce que Bellay était dans la rédaction, tout le temps, à préparer les éditions, les journaux. Ça avait des inconvénients mais ça avait un avantage : il servait de paravent, il était solidaire et s’il y avait des retours, c’est par lui que ça passait. Avec Elkabbach, c’était différent. Il était rarement là, et quand il y était c’était surtout pour son interview du matin, le reste du temps, il déléguait. Parfois, simplement, il donnait des infos, en disant : “tiens, j’ai dîné avec tel ministre, il paraît que…” Parfois on le croisait à des réceptions ou des conférences de presse. On ne savait pas trop au nom de quoi il était là. C’était bizarre. »


« Quand j’étais rédac chef, se souvient un autre ancien, jamais il ne m’a donné une instruction, jamais. Alors c’est vrai, maintenant que j’y réfléchis, je pense qu’il y avait beaucoup d’autocensure, de ma part et de la part des autres. Par peur du groupe Lagardère, de lui, des retombées. Tout un contexte qui faisait que j’étais moins libre qu’aujourd’hui, qu’on n’avait pas les c… de balancer des trucs sur Sarko. Sans doute qu’il n’y avait pas ce même rapport qu’avec Bellay, ce côté patron solidaire et uni dont on savait qu’il serait là pour nous défendre. Avec Elkabbach, franchement, ce n’était pas le cas. On se demandait en cas de clash avec Sarko, dans quel camp il se mettrait… »


Autocensure, peur, retombées, autant d’éléments qui ne poussent pas à trop enquêter ou critiquer le futur président ? Jean-Pierre Elkabbach affirme qu’il n’est jamais intervenu. Le « contexte » se suffisait à lui-même. […]

 

« Comme jadis à Versailles »


C’est que Jean-Pierre Elkabbach n’a pas pour ami, on l’aura compris, que Nicolas Sarkozy. Ses relations avec le chef de l’État ne sont pas un accident de parcours, un hasard ou une nécessité due à un quelconque « coup de foudre de l’amitié », non, elles sont, au contraire, la partie immergée de l’iceberg, de toute une vie professionnelle passée dans l’antichambre du pouvoir.

 

« Le salon des Ambassadeurs est la pièce centrale, côté jardin, du Château [de l’Élysée], écrit Saïd Mahrane. Y accèdent uniquement ceux qui ont un petit point rouge sur leur carton d’invitation. Soit une centaine de personnes sur les 8 000 conviées ce jour-là. C’était le 14 juillet 2008. Dans le salon des Ambassadeurs, les “choses de la cour” se jouaient à huis clos. Comme jadis à Versailles, entre les pilastres du salon d’Hercule, quand Louis XIV recevait. Etienne Mougeotte, Jean-Pierre Elkabbach et Catherine Nay se disent maintes choses à voix basse. [4] » Là au milieu des gens qui comptent, dans les salons dorés de la république, il est à son aise, chez lui, allant de l’un à l’autre, personnage familier de la cour, baron bien connu ayant survécu à nombre de souverains, maréchal émérite des médias ayant servi tous les régimes. De droite ou de gauche, du centre ou de la périphérie.

« Au fond, analyse Christian Guy, ex-journaliste télé qui a travaillé avec Jean-Pierre Elkabbach, il a toujours eu une relation bizarre avec le politique. Ça a dû à un moment se mélanger dans sa tête. Bien sûr, quand on est journaliste politique, on est amené à avoir des relations avec les dirigeants mais il y a une limite, une barrière que l’on perçoit très vite. Lui cherchait à aller au-delà, entretenait des relations qui n’étaient plus professionnelles, ça nourrissait une ambition, la volonté d’appartenir à leur monde, d’être admis parmi eux. Je me suis demandé s’il n’allait pas franchir le pas et finir par abandonner le journalisme pour la politique. » […]

 

Il fréquente l’Élysée et les ministères, il est de ces « clubs » très parisiens où se côtoie la fine fleur des décideurs français. Il fut de la « Fondation Saint-Simon », créée par François Furet puis dissoute en 1999, regroupant intellectuels, grands patrons, hommes de médias et hauts responsables politiques. Il est du « Siècle », le « club des clubs », le « réseau des réseaux », « la quintessence du pouvoir politique, économique et médiatique » où se retrouvent des gens comme Patrick Poivre d’Arvor, Dominique Strauss-Kahn, Thierry Breton, Claude Bébéar ou Nicole Notat. « Tous sont membres du Siècle, le plus prestigieux des cercles de décideurs hexagonaux. [5] ».Un cercle qui comptait en 2007, selon son secrétaire général Etienne Lacour, outre Nicolas Sarkozy et François Fillon, quinze membres du gouvernement [6].

[…] Une fréquentation assidue qui ne semble pas lui peser pourtant et qu’il assume avec entrain à soixante-dix ans passés. Du petit monde de la politique française, il connaît tous les rouages, les visages et les usages. Il s’y est fait des amis de longues dates, des complices et des intimes : Jacques Attali, Julien Dray, Thierry Breton, Dominique Strauss-Kahn… Il petit-déjeune, déjeune et dîne avec tout ce monde important.

 

Part-il en vacances ? Il y retrouve Jacques Chirac, adepte comme lui d’un luxueux hôtel de l’île Maurice : « Les promenades [avec Chirac] à travers l’île, les dîners, les conversations, assis à la même table, légère ou graves, souvent personnelles, sont d’ordre privé et le resteront », écrit Jean-Pierre Elkabbach dans un des ses livres. Rentre-t-il de ses vacances ? Il court retrouver le président de l’époque : « François Mitterrand à qui rien ne pouvait rester caché avait aussi appris ces rencontres de vacances. Il m’accueillait parfois à mon retour, d’un souriant : “Comment va votre ami mauricien ?” [7]  »

A-t-il besoin de prendre une décision importante ? Il dîne avec un ancien ministre de ses amis : « Je connaissais depuis longtemps cet homme politique [Charles Millon] sincère et réaliste [il sera un des rares présidents de région à accepter de s’allier au Front national], doté de fortes convictions qu’il met en œuvre depuis longtemps dans sa Région. (…) Ambitieux, il n’était ni candide, ni cynique. Je lui exposai toutes les hypothèses, j’avais confiance en son exigence et son pragmatisme. » L’ex-ministre lui dit alors : « Il faut (…) tenter l’aventure. C’est probablement le sens de ton destin, saisis-le ! » Et notre journaliste indépendant de conclure : « Ce soir-là, je décidai de présenter ma candidature au poste de président de France Télévision. [8]  »


L’homme qui murmurait à l’oreille des politiques


[…] Dans le microcosme, on sait l’intérêt stratégique de faire entendre sa voix à une heure de grande écoute et à une époque où les émissions politiques se font de plus en plus rares. On sait aussi les retombées positives d’une émission où, de l’avis général, on « ne se sent jamais piégé », on n’est « jamais pris au dépourvu ».

Un « travail à l’ancienne », selon l’expression d’un journaliste : les interviews sont préparées et les questions font l’objet de « négociations ». Il ne s’agit pas de passer à côté du sujet brûlant, l’info polémique que tout le monde attend, mais il ne s’agit pas non plus de coincer l’invité. Un jeu d’équilibriste dans lequel Jean-Pierre Elkabbach se montre toujours brillant, quitte à, avant de passer à l’antenne, convaincre avec insistance l’interviewé d’aborder des thèmes dont il ne veut pas entendre parler. « Il y a toujours un deal, explique un ancien d’Europe 1, poser une seule question sur le sujet qui fâche et promettre ensuite de passer à autre chose. “Jean-François Copé, on est obligés de parler de votre appartement de fonction, je ne vous pose qu’une question mais on ne peut pas passer à côté”. Il va lui poser la question qui dérange mais l’autre sait qu’Elkabbach n’ira pas trop loin, qu’il va pouvoir répondre, qu’il va même être briefé pour répondre : “Répondez court, n’en faites pas des tonnes, 30 secondes pas plus, sinon on ne comprend rien.” Il est étonnant. »

« C’est quelqu’un, confie un autre ancien, qui va toujours discuter avec son invité avant de l’interroger et se place à la limite de l’intervieweur et du conseiller : “tu devrais faire ça, tu devrais dire ceci… Est-ce que tu as quelque chose à dire ? Qu’est-ce que tu me donnes ?” Et qui ensuite met en scène son interview par rapport à ces éléments. C’est un metteur en scène. » […]

 

Du haut de son trône médiatique, l’homme sélectionne en fonction de ses propres critères. Il a des inimitiés, tel le socialiste Arnaud Montebourg qu’il trouve bien trop « jusqu’au-boutiste » ou Ségolène Royal, une des rares à avoir refusé son invitation, il a des idées fixes : avoir la carrure et les compétences, ne pas dépasser les lignes du politiquement acceptable. « Il m’a invité un jour à déjeuner, confie un député de premier plan, et il m’a posé toute une série de questions. J’avais l’impression de passer un examen. C’était d’autant plus étrange qu’il rétorquait à mes points de vue, comme si nous étions deux hommes politiques face à face. Il m’a exposé ses idées. A la suite de quoi, j’ai été invité à son émission. » L’homme conçoit son interview comme une émission importante de la vie politique, pas question donc d’y convier des sans-grade ou des médiocres. Certains ministres attendent toujours d’y être invités, sans résultat. Pas question non plus de procéder à l’interview sans un peu de cérémonial. Quand Jean-Pierre Elkabbach reçoit, il est bon de montrer qu’il ne s’agit pas d’un rendez-vous banal ou d’une interview comme on en fait sur les chaînes concurrentes. […]

 

Une visite « historique »


Plus que la double casquette de « journaliste indépendant » et de faire-valoir des sénateurs, c’est avant tout le cumul privé-public dont use Jean-Pierre Elkabbach qui suscite la critique. « Comment trouver normal, interroge par exemple l’ancien homme fort du Monde, Edwy Plenel, que le responsable d’une radio privée, propriété d’un groupe médiatique dominant, Lagardère, soit en même temps celui d’une télévision publique, celle du Sénat ? Que nos sénateurs, droite et gauche confondues, assurent en la personne de Jean-Pierre Elkabbach la présence à demeure auprès de l’une des deux assemblées parlementaires d’un représentant dévoué des intérêts d’un industriel est un évident mélange des genres. [9]  »

Quand en 2000, il prend la présidence de Public Sénat, notre « baron d’Empire » n’est pas encore patron d’Europe 1 mais déjà « conseiller spécial pour la stratégie médias du Groupe Lagardère. » « J’ai l’assentiment de Jean-Luc et Arnaud Lagardère », se justifie notre journaliste. On les comprend. À l’heure où se discute à l’Assemblée et au Sénat une nouvelle loi sur l’audiovisuel et au moment où le groupe privé se réoriente justement pour devenir un poids lourds du paysage médiatique français, les deux hommes d’affaire ne peuvent pas voir d’un mauvais œil leur « conseiller » en « stratégie médias » pénétrer le cœur de la république. Combien de grandes sociétés rêveraient en effet de bénéficier d’un tel appui et s’économiseraient ainsi les frais d’une coûteuse politique de lobbying ?

 

« Il est dans une confusion des rôles, estime un ancien d’Europe 1. C’est clairement quelqu’un qui travaille pour Lagardère, qui en est le lobbyiste. Il a un bureau rue de Presbourg [siège de la société Lagardère], un rue François Ier [siège d’Europe 1], un à Public Sénat. Il est relation avec les cercles médiatiques, politiques, économiques, dans la confusion permanente. C’est un homme qui est capable de se transformer en promoteur de l’Airbus A380 parce qu’il est fabriqué par EADS dont Lagardère est actionnaire ou d’accompagner Nicolas Sarkozy à Alger en tant qu’ami parce qu’il a des liens particuliers avec Bouteflika [président algérien]. »

 

Une critique que l’on balaie du côté du Sénat arguant que les parlementaires se félicitent du travail fait par ce « grand professionnel » de l’audiovisuel qui a su donner une visibilité, une cohérence et une certaine notoriété à la chaîne. Ses liens avec le groupe Lagardère ? Faut-il vraiment se plaindre d’avoir avec soi un homme haut placé dans un groupe qui possède des radios, des journaux, des magazines dans lesquels il est si important d’apparaître quand on fait de la politique ?

Seuls les journalistes d’Europe 1 trouvent à redire à cet étrange mélange de fonction. En 2008, ils ont jugé un peu saumâtre qu’à quelques mois du renouvellement de son mandat à la tête de Public Sénat, le double président impose en plein journal une interview du… président du Sénat justement. Et de s’interroger sur l’actualité et l’acuité de ce brave Christian Poncelet que d’ordinaire les médias ne se disputent pas. C’est que, répond Jean-Pierre Elkabbach, l’homme est le « deuxième personnage de l’État » et effectuait, avec toute une délégation de sénateurs, une visite capitale en Chine qui, à n’en pas douter, restera dans l’histoire. Ce qui est sûr c’est qu’Elkabbach lui-même faisait partie de cette délégation en tant que président de Public Sénat et que le président d’Europe 1 était donc aux premières loges pour juger de l’intérêt du voyage de… son patron.

 

Vincent Quivy


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26 juillet 2012 4 26 /07 /juillet /2012 15:02

Social-Eco - le 25 Juillet 2012

Est-il encore possible de promouvoir Un « made in france » automobile ?

À partir de l’industrie automobile, un autre modèle de développement

Une tribune de Gabriel Colletis, universitaire, spécialiste des questions industrielles.

 

«Ils (les constructeurs français) produisent trop en France, ce qui leur coûte trop cher », aurait tranché un analyste financier à propos des difficultés de PSA et de Renault.

Il est remarquable de constater la quasi-unanimité avec laquelle les experts et autres analystes s’accordent sur le diagnostic des difficultés de PSA et celles de l’industrie automobile française en général : le groupe Peugeot Citroën serait trop français et aurait eu le grand tort d’avoir maintenu plus de la moitié de sa capacité de production dans l’Hexagone. Or, la France serait le pays des trente-cinq heures (avec l’Allemagne…), celui dont le coût de la main-d’œuvre et le manque de flexibilité empêcheraient de rester compétitif.

La cause est donc entendue : le salut passe par l’international et, s’il en est encore temps, un « choc de compétitivité » pour tenter de sauver ce qui reste de l’industrie française. Et si le diagnostic était tout simplement faux, fondé sur des bases approximatives, voire erronées ?

 

L’internationalisation marquée des groupes automobiles français


Contrairement à l’industrie automobile allemande, dont la production sur le territoire allemand (avec des coûts globalement comparables aux coûts en France) a progressé ces dernières années, la production automobile de Renault et de PSA en France est passée de plus de 3 millions de véhicules en 2004 à moins de 2 millions en 2011. Les constructeurs automobiles français ont augmenté de 57 % leur production mondiale entre 1997 et 2010 quand ils réduisaient celle sur le territoire hexagonal de 23 %.

 

Concernant les débouchés des deux groupes français et non plus leur production, la chute des ventes en volume des deux groupes français en Europe, si elle est incontestable, soulève la question de la qualité de leur offre mais doit aussi être mise en rapport avec le marasme dans cette zone minée par les plans d’austérité à répétition. Pour la France, d’après un économiste de l’OFCE cité dans le Monde (édition du 13 juillet), l’effet cumulé de ses propres mesures d’économies et de celles de ses partenaires commerciaux représenterait, en demande intérieure et extérieure, 2,8 points de PIB en 2012…

«La Chine, la Chine, la Chine», répètent à satiété les experts en stratégie, mais doit-on se satisfaire de l’enfoncement dans la crise du continent européen et ne doit-on pas, au contraire, réorienter sa trajectoire par des mesures de soutien de la croissance, voire par une politique qui oserait tenter un nouveau modèle de développement ? Précisément, l’industrie automobile peut être un des lieux où s’élabore un tel modèle.

 

Un «choc de compétitivité» ?


Avant d’évoquer quelques traits de ce modèle qui coïnciderait avec un renouveau du made in France, il convient de ne pas ignorer la proposition d’un « choc de compétitivité », qui consiste en un transfert des cotisations sociales des entreprises vers les ménages. Depuis 1984, la part des cotisations sociales employeurs dans la valeur ajoutée a diminué de sorte qu’on ne peut guère accuser ces cotisations d’être responsables des pertes récentes ou plus anciennes de compétitivité de l’économie française. Considérerait-on qu’il convient néanmoins de poursuivre dans cette voie, que la question qui se poserait alors serait : avec quel objectif ? Une baisse des prix ? Une telle réponse est peu probable car bénéficiant non aux producteurs mais à leurs clients, ce qui n’est pas vraiment dans l’intention des premiers ni dans les projets de ceux qui prônent ledit « choc de compétitivité ». L’enjeu ne saurait donc être autre que l’accroissement des marges dont il est régulièrement affirmé qu’elles sont insuffisantes. En résumé, une perte de revenu net des ménages et une augmentation de celui des entreprises, telle serait la perspective. Si tel est le cas, la question devient alors : à quelle fin proposer une restauration des marges ? Deux réponses peuvent être avancées. La première est qu’avec des marges plus élevées, les entreprises pourront mieux investir. La seconde est que ces marges remonteront vers les actionnaires sous forme de dividendes plus élevés. Si l’on en croit la dernière décennie, c’est malheureusement la seconde réponse qui est la plus probable : la part des dividendes dans la valeur ajoutée ou dans les profits n’a jamais cessé d’augmenter, au détriment des salaires comme des investissements. Un transfert de cotisations afin de donner un coût de fouet aux investissements ne peut donc être légitimement envisagé sans, au minimum, une réforme très importante et concomitante de la fiscalité clivant fortement l’impôt sur les bénéfices selon que ceux-ci sont réinvestis en France ou en Europe, ou distribués.

 

Les cinq dimensions d’un made in France dans l’automobile


La première dimension d’un made in France automobile est un repositionnement de l’offre française. Il ne s’agit pas tant de choisir entre des véhicules petits, de taille moyenne ou de grandes berlines, que de produire des véhicules de qualité, à forte valeur ajoutée. Ces véhicules doivent répondre aux besoins d’aujourd’hui, notamment en termes de sécurité, de consommation énergétique et de protection de l’environnement (le retard pris en matière de véhicule électrique ou hybride a de quoi interroger), de durabilité enfin (le tout-électronique qui impose des changements de systèmes complets et empêche les simples réparations de composants défectueux doit sans doute être remisé).

 

La deuxième dimension d’une reconquête industrielle dans l’automobile, très liée à la première, est un très fort investissement dans la formation professionnelle, les compétences des salariés et dans la R&D. Un des éléments, de ce point de vue, les plus inquiétants des décisions annoncées par PSA est la suppression en nombre important de postes dans la R&D. À quoi peuvent servir des marges plus importantes pour le groupe si celui-ci réduit ses investissements d’avenir ?

La troisième dimension du made in France dans l’automobile est la recomposition des relations au sein de la filière automobile. Les constructeurs français doivent résolument cesser de considérer leurs équipementiers et même leurs sous-traitants comme de simples fournisseurs auxquels on achète des volumes au prix le plus bas possible. La cotraitance doit se substituer à la sous-traitance et le prix ne doit plus être le discriminant principal du choix des équipementiers, qui doivent de leur côté s’engager à innover davantage.

 

La quatrième dimension d’un made in France automobile est un ancrage des activités automobiles dans les différents territoires de l’automobile en France. Cet ancrage ne peut se jouer centralement sur des considérations de coûts. Le risque, bien réel, serait celui d’une mise en concurrence des espaces aboutissant à d’éphémères localisations. L’ancrage territorial se joue sur la disponibilité de compétences dont les entreprises qui externalisent massivement ont de plus en plus besoin dans une perspective de proximité.

 

Enfin, mais ceci dépasse l’horizon de la seule industrie automobile, les acheteurs doivent eux-mêmes considérer que le prix n’est pas le critère central sur la base duquel le choix de l’achat d’une automobile doit être effectué. Les Français, espère-t-on, sont prêts à payer plus cher des produits fabriqués en France. Mais cela ne suppose-t-il pas que le pouvoir d’achat progresse et que l’on cesse de considérer que la hausse des revenus de ceux qui travaillent est impossible ou non souhaitable ?

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26 juillet 2012 4 26 /07 /juillet /2012 14:56

Une de l'Humanité du jeudi 26 juillet 2012

Social-Eco - le 26 Juillet 2012

Editorial Par Jean-Paul Piérot

Les salariés, le grand absent du plan Montebourg

Dans l'éditorial de l'Humanité, ce jeudi, Jean-Paul Piérot estime que "le plan préparé par Arnaud Montebourg ne convainc guère d’emblée, quant aux moyens qu’il mobilise, sur sa capacité à faire face tout à la fois à l’urgence sociale et à l’ampleur du défi du redressement". "Faudrait-il laisser les salariés de PSA seuls face au plan social et parler de voiture propre ?" se demande-t-il.


On aimerait tant pouvoir souscrire à l’appréciation formulée par Jean-Marc Ayrault, qui voit dans le plan présenté hier à l’Élysée « un acte extrêmement important qui s’inscrit avec une très grande détermination dans le redressement de la filière automobile », et le premier ministre d’ajouter qu’il faut « faire face aux urgences, celles des plans sociaux »

 

. À peu près au même moment et non loin de là, près des Champs-Élysées, les salariés de PSA manifestaient leur colère et eux aussi leur grande détermination à ne point capituler sur le champ 
de bataille d’Aulnay, mais aussi de Rennes et des secteurs 
de la recherche visés par le plan social le plus grave 
qu’ait subi la filière depuis bien longtemps.

 

Or, c’est là où le bât blesse, le plan préparé par Arnaud Montebourg ne convainc guère d’emblée, quant aux moyens qu’il mobilise, sur sa capacité à faire face tout à la fois à l’urgence sociale et à l’ampleur du défi du redressement. Si l’on doit admettre les différences de tempo entre un plan s’inscrivant dans le moyen et le long terme et la nécessité de stopper immédiatement une hémorragie, ce second point semble tout simplement oublié.

 

Faudrait-il que les 8 000 suppressions d’emplois – derrière les chiffres il y a des destins d’hommes et de femmes, des familles fragilisées – fussent passées par pertes et profits dans les projets du groupe, et qu’en même temps l’on s’attelle au développement de la voiture propre et énergiquement économe ?

 

Ce serait véritablement inacceptable. Les salariés du constructeur automobile ne se trompent pas de cible quand ils dénoncent la famille en or Peugeot et Philippe Varin qui veut les sacrifier pour payer ses propres choix stratégiques. Ils ont marqué un point en obtenant la désignation d’un expert, ce qui leur donnera un laps de temps supplémentaire pour amplifier leur combat.

 

Mais l’État doit-il se tenir à l’écart du débat qui oppose la direction aux syndicats ? Ce n’est en tout cas pas l’opinion de Marie-George Buffet, députée PCF/Front de gauche de Seine-Saint-Denis, qui invite la majorité parlementaire de gauche à légiférer sans tarder pour donner des outils aux représentants des salariés.

 

En effet, le volet relatif aux droits des salariés apparaît comme le grand absent du plan. Comment faire respecter la « pérennisation des sites » qu’évoque le dispositif, si les salariés ne peuvent réellement pas avoir droit au chapitre ? À ce propos, l’issue du conflit autour du site d’Aulnay donnera une indication utile sur la capacité et la volonté du gouvernement à traduire ses engagements en actes. Le mécanisme de soutien, par le système de bonus-malus, à la production de véhicules moins polluants, hybrides ou électriques n’aura des effets positifs sur la production française qu’à la condition que les constructeurs hexagonaux investissent plus fortement dans la recherche, la formation et l’emploi, faute 
de quoi les primes prévues renforceront les comptes 
de Nissan et de Toyota, déjà bien engagés dans 
ces nouvelles technologies.

 

Le plan présenté par Arnaud Montebourg laisse donc des questions ouvertes, auxquelles il faudra bien préciser des réponses de gauche. La droite, qui avait consenti plusieurs milliards d’aide sans contreparties, réclame aujourd’hui plus de « compétitivité », et à l’instar de Luc Chatel, « plus de souplesse dans le droit du travail » pour faire baisser les coûts de production (c’est-à-dire 
les salaires et l’emploi) mais ne dit mot sur les dividendes. On mesure combien le débat sur le redressement de la branche de l’automobile ne peut être circonscrit au bonus-malus.

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26 juillet 2012 4 26 /07 /juillet /2012 14:53
PSA : Les communistes du 93 répondent présents au faux plan du gouvernement

Les organisations syndicales de PSA appelaient à un rassemblement ce 25 juillet, devant le siège parisien de Peugeot, pour peser sur les discussions du comité central d’entreprise, auquel se sont jointes des délégations de salariés de la RATP, d’Air France et de Sanofi. Pierre Laurent, secrétaire national du Parti Communiste, Hervé Bramy, secrétaire fédéral, Gilles Garnier, co-président du groupe Front de gauche au conseil général, et les communistes de Seine-Saint-Denis ont répondus présents à cet appel.

 

L’unité des organisations syndicales et la présence massive des salariés de PSA, a permis d’arracher une « petite victoire ».

 

Un cabinet d’expertise indépendant a été nommé pour vérifier la réalité des difficultés évoquées par l’entreprise Peugeot et proposer des solutions alternatives au licenciement de 8000 salariés et à la fermeture de l’usine d’Aulnay. Le déclenchement du plan de licenciements est bloqué jusqu’à la remise de ce rapport d’expertise. Philippe Varin, PDG de PSA, a beau verser des larmes de crocodile sur de prétendues pertes de PSA au premier semestre 2012, il ne fera pas oublier les 450 millions d‘euros de richesse qu’il a dilapidé en 2011 en rachat d’actions et en versement de dividendes aux actionnaires.

 

Pour sa part, le gouvernement Ayrault a annoncé ses premières pistes de soutien à la filière automobile. L’achat massif par l’Etat de véhicules électriques et hybrides, et l’augmentation du bonus écologique permettront d’ouvrir la voie vers une nouvelle ère industrielle pour les constructeurs automobiles.

 

Mais les propositions d’Arnaud Montebourg passent à côté des attentes légitimes des salariés de l’automobile. Un plan qui omet le maintien des emplois et la pérennisation du site d’Aulnay est un faux plan !


Les communistes demandent un moratoire immédiat contre tous les licenciements et l’interdiction des licenciements boursiers.

 

Hervé Bramy, secrétaire départemental du PCF

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26 juillet 2012 4 26 /07 /juillet /2012 13:34
PSA : Déclaration de Jean-Michel Ruiz, Secrétaire départemental du PCF du Val d'Oise

Déclaration de Jean-Michel Ruiz, Secrétaire départemental du PCF présent au rassemblement des salariés de Peugeot à Paris

omme nous le disions dès le début du conflit, les suppressions d’emplois chez Peugeot et l’annonce de la fermeture du site d’Aulnay vont avoir des conséquences désastreuses pour notre département. Si des centaines de Valdoisiens travaillent directement à Aulnay, ils sont bien plus nombreux encore à être salariés dans des entreprises assurant la soustraitance pour ce grand groupe en produisant des sièges, des filtres à air, des airbags…

En tant que responsable départemental du PCF, j’ai participé aujourd’hui à la délégation de notre Parti, conduite par notre Secrétaire national, Pierre Laurent, qui est allée porter son soutien aux milliers de salariés rassemblés devant le siège social de PSA à Paris.
Si la nomination d’un expert repousse provisoirement la machine à licencier, la bataille doit s’intensifier. La motivation des salariés donne de l’espoir à ce combat.

Je demande expressément aux députés du département, en particulier à ceux de la majorité présidentielle :
- d’exiger que le projet de loi déposé par les députés du Front de gauche interdisant les licenciements boursiers soit mis en urgence à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. En effet, que dire lorsque l’on sait que les 200 millions versés en 2011 aux actionnaires de PSA équivalent quasiment à la masse salariale de PSA/Aulnay.
− de refuser la théorie qui met en avant comme cause des difficultés de l’industrie automobile en France, le coût du travail : le coût horaire de main d’oeuvre dans la construction automobile est environ de 40.6 euros en France contre 43.8 euros en Allemagne. Ce qui pose problème c’est la part des richesses produite, toujours plus importante, versée aux actionnaires. Par contre, il faut, en France, dépenser beaucoup plus pour sécuriser l'emploi, la formation, la recherche, les salaires, avec les investissements matériels nécessaires. Simultanément, il faut pénaliser les délocalisations et la croissance financière. Pour cela, nous proposons une fiscalité « intelligente », incitative au développement national, anti-délocalisation et anti-placements financiers;

Fédération PCF du Val-d’Oise

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BRUNO FORNACIARI

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