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27 août 2014 3 27 /08 /août /2014 16:37

Il est de bon ton ces temps-ci de dresser des lauriers à Arnaud Montebourg pour son franc-parlé et sa détermination à s'opposer à la politique industrielle de François Hollande, bref, de prendre des risques avec un certain courage. Esbroufe, nuage de fumée ? Voyons ci-dessous un certain bilan de celui qui , désormais, (pour combien de temps) s'adjoint aux côté des "frondeurs" du PS.

Bruno Fornaciari

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Montebourg quitte Bercy : le bilan économique du ministre

Le HuffPost | Par Grégory Raymond

Publication: 25/08/2014 19h27 CEST Mis à jour: 25/08/2014 22h11 CEST

ÉCONOMIE - "Trublion", "grande gueule", "électron libre"... jamais les termes utilisés pour décrire Arnaud Montebourg n'auront été aussi proches de la réalité au terme de ce week-end tempétueux qui se conclut ce lundi par un départ du gouvernement pour le désormais ex-ministre de l'Economie et du Redressement productif. Il laisse dernière lui la marque d'un homme tenace, pour qui aucun combat n'est perdu d'avance. Mais aussi celle d'un communiquant hors pair.

Arrivé en mai 2012 avec la mission impossible de réindustrialiser la France, Arnaud Montebourg s'est démené pour donner un sens à sa fonction. On se rappelle de Florange, théâtre de son échec le plus retentissant, mais aussi de son rôle actif dans le dossier Alstom, plus favorable. On se rappelle également de lui posant fièrement en marinière, évoquant un destin présidentiel.

Mais à l'heure de faire les comptes, le ministre peut aujourd'hui regarder dans le rétro et faire l'inventaire de son action. Derrière ses coups de com' et ses coups de sang, quel est son véritable bilan économique? Tour d'horizon de ses dossiers et de ses slogans...

1. Florange, l'échec fondateur

Dans sa carrière de ministre, sa première épreuve est aussi son plus gros échec. Dans l'épisode qui l'oppose à Jean-Marc Ayrault, il manque (déjà) de quitter le gouvernement. Une démission rejetée par François Hollande. Le ministre voulait nationaliser les hauts fourneaux de Florange, le président et le premier ministre voyaient les choses autrement. "J'ai échoué dans un certains nombre d'épisodes, Florange en est un exemple", avait-il reconnu en octobre 2013 dans "Le Supplément" de Canal+ (ci-dessous).

"Parfois on se prend des portes en politique", rajoutait-il. "On se trompe, cela arrive, et il faut le reconnaître. J'ai failli décidé d'abandonner ma mission", après que son projet de nationalisation temporaire du site industriel eut été balayé.

Moins de deux ans après les faits, les engagements pris par le propriétaire Laskshmi Mittal auprès de l'Elysée ont été tenus. Aucun salarié n'a été licencié, tandis que 100 millions d'euros ont été investis par ArcelorMittal fin 2013. Même le leader syndical Edouard Martin est venu gonfler les rangs du PS aux Européennes.

2. Dailymotion: le retour de l'Etat actionnaire

Ce devait être la vente à l'Américain Yahoo! d'une des pépites françaises les plus prestigieuses. Mais c'était sans compter l'activisme d'Arnaud Montebourg. En tant que ministre du Redressement productif, il oppose une fin de non recevoir au géant du Web, mais surtout à Orange, propriétaire de la plate-forme de vidéos qui voulait vendre.

Pour l'Etat, qui détient encore 27% du capital d'Orange, pas question de céder plus de 50% de Dailymotion à Yahoo!. Arnaud Montebourg monte donc au créneau: "Je ne vais pas vous laisser vendre l'une des meilleures start-up de France", se serait-il emporté au cours de la rencontre entre la direction de Yahoo! et celle d'Orange. Cet épisode a notamment l'objet d'un affrontement par voie de presse avec le PDG de l'opérateur Stéphane Richard. À la fin, c'est le ministre qui l'a emporté.

Près d'un an et demi après les faits, Dailymotion cherche toujours un partenaire pour grandir. Microsoft s'était un temps positionné, mais ne souhaite pas investir seul. Canal+ voulait en prendre le contrôle, mais Orange ne veut pas offrir à son concurrent une participation majoritaire.

3. PSA: l'alliance avec la Chine sauve les meubles

"Dissimulation", "mensonges", "erreurs de stratégie"... Montebourg n'a pas eu de mots assez durs pour qualifier l'attitude de PSA, auteur d'un plan social de 8000 postes en France et de la fermeture de l'usine d'Aulnay-sous-Bois. Parallèlement, ce dossier est néanmoins une de ses grandes victoires. C'est sous sa responsabilité que l'entrée au capital du Chinois Dongfeng, mais surtout celle de l'Etat français, ont été validées.

Une quatrième usine PSA sera bientôt ouverte en Chine pour porter à un million la capacité de production. Au premier semestre, le constructeur a enregistré une hausse de 5,5% de ses ventes mondiales, dont 27,7% pour la seule Chine. En attendant, la prochaine génération de la C3 sera délocalisée en Slovaquie, réservant les modèles haut de gamme plus rentables à la France. Tout n'est pas si rose, donc.

4. Made in France: le rouleau compresseur de la com'

Depuis son arrivée à Bercy en mai 2012 au portefeuille du Redressement productif (et jusqu'à son discours de départ ce lundi), Arnaud Montebourg aura mis l'accent sur le nécessaire renouveau de l'industrie française, en voulant incarner le "patriotisme industriel". Un objectif symbolisé par l'image du ministre arborant une marinière Armor Lux en couverture du Parisien Magazine en octobre 2012, et défendu l'an dernier dans son livre La bataille du made in France.

Toujours sur le front de la communication, le trublion du gouvernement a également fait une belle promotion à Renault. Quelques jours avant la photo en marinière, le ministre apparaissait au volant de la Zoé électrique, s'improvisant super VRP de la marque au losange. "Elle est super bien et elle est fabriquée en France", claironnait-il à la sortie du conseil des ministre. Visiblement emballé par la présence des caméras de BFMTV dans la voiture, Arnaud Montebourg avait même demandé à son chauffeur de lui céder le volant. Un grand moment de communication.

En 2014, il participe également au tournage du documentaire Made in France, l'année où j'ai vécu 100% français, se mettant volontiers en scène aux côtés de l'auteur Benjamin Carle.

Made in France - Avec Arnaud Montebourg

Il sera également la voix d'un personnage de dessin animé diffusé prochainement sur Arte. Vêtu d'une marinière, il se bat contre la délocalisation d'un volcan chez l'Homme de Pékin. Cet épisode de Silex and the City montrera, comme d'habitude, des débats d'aujourd'hui transposés à l'âge de pierre.

Cette orgie de communication aura eu le mérite de définir clairement l'image de celui qui désormais se cherche un avenir. Elle en aura cependant excédé plus d'un et son objectif affiché, la promotion du Made in France, est loin d'être un succès incontestable comme le montre le point suivant...

5. Réindustrialisation: un pari perdu d'avance

Si Arnaud Montebourg est parvenu à obtenir son "anti-Florange" avec la reprise réussie de Rio Tinto (Savoie), son bilan de réindustrialisation reste néanmoins fragile. Il est surtout fait de "coups de com'", notamment avec le retour de Solex, sans grand effet sur l'emploi.

On se rappelle aussi de la résurrection de la fonderie Loiselet, une PME qui avait fermé son usine chinoise et rapatrié sa production en France. Mais le ministre est désormais moins prolixe sur le sujet. En décembre 2013, l'entreprise a fait faillite puis a été rachetée par des capitaux algériens. "La relocalisation mal maîtrisée a été la cause même du dépôt de bilan", a même expliqué l'un des nouveaux repreneurs.

Quant au retour au bercail des entreprises qui avaient pris le large, le mouvement reste marginal, et cela malgré les aides publiques. Depuis 2005, seuls 107 cas ont été observés, relève Le Monde, souvent de petite taille, selon le pointage effectué fin 2013 par l'Etat. De son côté, la société Trendeo a recensé seulement 70 emplois industriels créés en 2013 à la suite de relocalisations.

6. Gaz de schiste: un parti pris énergique

Convaincu que la France est assise sur une montagne d'or (noir), le ministre s'est toujours battu en faveur de la prospection du gaz de schiste. Non pas que le gouvernement doive coûte que coûte chercher à exploiter ses réserves, mais qu'il cherche en revanche à élaborer un moyen non-polluant pour les extraire.

"La question de la recherche est toujours posée. Les Français aiment l'avenir, ils croient en l'innovation. Le problème du gaz de schiste, c'est qu'il est d'une pollution terrible. Si on règle ce problème, on peut rouvrir le débat", disait-il encore en février dernier, en arguant que le NFP (stimulant fluopropane) pourrait être une solution.

Fruit de tensions avec l'ex-ministre EELV Cécile Duflot, ce débat a mis le feu aux poudres avec la tête de l'exécutif. Sur le nucléaire, il déclare voir une "filière d’avenir", alors que le gouvernement s’est engagé sous l’impulsion des écologistes à réduire la part de l’énergie nucléaire de 75 à 50%.

7. Europe: une voix forte contre l'immobilisme bruxellois

Entre Arnaud Montebourg et Bruxelles, ça n'a jamais été une histoire d'amour. En juin 2013 il n'a pas hésité à s'en prendre à José Manuel Barroso, président de la Commission européenne, en le qualifiant de "carburant du Front national".

Dans le détail, il estime que "l'Union européenne ne bouge pas, elle est immobile, paralytique. Elle ne répond à aucune des aspirations populaires, sur le terrain industriel, sur le terrain économique, sur le terrain budgétaire, et finalement, ça donne raison à tous les partis souverainistes, j'allais dire anti-européens, de l'UE". Des propos qui lui donnent raison, notamment après les scores réalisés par le FN aux dernières élections européennes.

Le ministre est également l'un des premiers à s'émouvoir de l'euro fort, qui "annihile les efforts de compétitivité" en France. "Nous avons la zone la plus dépressive au monde et la monnaie qui s'apprécie le plus au monde. Cette situation est ubuesque. Nous devons ouvrir une bataille politique pour faire baisser l'euro. L'euro doit être au service de notre économie et de notre industrie. Il ne s'agit pas de le dévaluer mais de le ramener à un niveau raisonnable et supportable". Un an après ces déclarations, François Hollande a timidement repris cet argumentaire.

8. SFR: Montebourg pris en flagrant délit d'ingérence

La vente de SFR a été une autre saga au cours de laquelle la voix d'Arnaud Montebourg n'a pas été entendue. Quand Vivendi décide au mois de février dernier de vendre sa filiale mobile, les négociations s'engagent avec Numericable. Bouygues passe à l'attaque dans la foulée et trouve en Arnaud Montebourg un soutien de poids.

Le ministre de l'Économie, alors en charge du portefeuille du Redressement productif, énumère les griefs contre l'alliance SFR/Numericable, notamment le maintien du marché à quatre opérateurs néfaste pour l'emploi et le surendettement du futur groupe. Il fait même peser la menace d'un contrôle fiscal sur le président de Numericable Patrick Drahi.

Ignorant les remontrances du ministre et malgré une dernière offensive de Bouygues,Vivendi décide finalement de céder sa filiale à Numericable. Franchement déçu du résultat, il appelle désormais le nouvel ensemble à user du patriotisme économique dans le choix des fournisseurs. Un peu maigre.

9. Alstom: dernier coup d'éclat industriel

S’il faudra des mois avant la recomposition effective d’Alstom, Arnaud Montebourg tient là l'une de ses grandes victoires. Le ministre est parvenu à éviter le dépeçage d’Alstom, tout en préservant la souveraineté nationale de la France dans le secteur nucléaire. Et à l’inverse de Florange, il est enfin parvenu à imposer sa signature: entrée de l’Etat dans le capital (20%) et l'alliance avec un grand groupe étranger. Comme pour PSA.

Le revers de la médaille, c'est qu'il n'était pas du tout favorable à un rachat par General Electric. Soutien initial de l'Allemand Siemens, il s'est résolu à la victoire de l'Américain au dernier moment, en contrepartie de l'entrée de l'Etat au capital. Mais il confirme le retour de l'Etat stratège, après avoir obtenu une offre plus favorable aux intérêts français. Il est aussi à l'origine du décret sur l’acquisition d'entreprises stratégiques, permettant un veto du gouvernement.

10. Il est très apprécié par les grands patrons

Un temps honni par la classe patronale, le ministre a terminé avec les faveurs des capitaines d'industries. Outre Jean-Louis Beffa (ex-PDG de Saint-Gobain), l'un de ses visiteurs du soir favori, il s'est peu à peu offert le soutien de quelques gros bonnets comme Christophe de Margerie (Total) ou Claude Perdriel (SFA).

Son ton combatif séduit les entrepreneurs, comme l'a reconnu en mars Vincent Bolloré. "Je trouve qu'il donne une flamme, et dans une France où on est un peu dans la sinistrose, sa voix est sympathique", a affirmé le PDG du groupe Bolloré. Même Pierre Gattaz, le patron des patrons, l’affirme: "Ce que je trouve intéressant avec Arnaud Montebourg, c'est quand il s'occupe de la France de demain, des 34 filières de la Nouvelle France industrielle (...) il a beaucoup d'énergie dans ces domaines", a souligné le dirigeant du Medef, parlant d'un "élan vertueux".

"Il a le mérite d'avoir remis l'industrie au centre des débats", confiait en début d'année Jérôme Franz, président de la Fédération des industries mécaniques (FIM). "Il a une vraie connaissance des sujets et une implication personnelle", ajoutait Philippe Goebel, son homologue de l'Union des industries chimiques (UIC).

Ce discours dithyrambique survivra-t-il au départ du ministre? A quelques minutes de la démission du gouvernement, Geoffroy Roux de Bézieux (n°2 du Medef) a jugéqu'Arnaud Montebourg se "trompait d'époque" et prônait une "politique des années 1990". "Qu'il veuille (...) faire un peu le show de rentrée (...), très bien, ce qui compte c'est la déclaration du président de la République et de Manuel Valls", a-t-il ajouté.

Désormais écarté du pouvoir et des dossiers, il n'est donc pas certain qu'Arnaud Montebourg conserve son aura auprès des milieux patronaux.

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27 août 2014 3 27 /08 /août /2014 00:49
Emmanuel Macron, "l'hémisphère droit" de François Hollande

 

Par Odile Benyahia-Kouider

 

Inspirateur de la politique économique du président, le nouveau ministre de l'Economie impressionne, séduit et agace. Qui est ce surdoué de 36 ans qui fut philosophe puis banquier d'affaires ?

Le nouveau ministre de l'Economie, Emmanuel Macron, le 26 mars 2014 à l'Elysée. (Alain Jocard/AFP)

 

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(Article publié le 27 mars 2014)

Il est jeune. Il est beau. Il est brillant. Nommé en 2012, à 34 ans, secrétaire général adjoint de l'Elysée [poste qu'il a occupé jusqu'en juin 2014, NDLR], le nouveau ministre de l'Economie,Emmanuel Macron - "Manu" pour les intimes -, intrigue les puissants et passionne les médias. Et pour cause ! Cet inspecteur des Finances, sorti cinquième de la promotion Léopold Sédar Senghor de l'ENA, est l'inspirateur du nouveau cap économique de François Hollande.

 

A l'Elysée, l'homme qui se cache derrière le pacte de responsabilité, peu connu du grand public, ne cherchait pas à se mettre en avant. Mais il attisait la curiosité. Un jour avec les grands patrons, le lendemain à côté du président quand il discutait avec Angela Merkel ou Barack Obama. Il était partout. Dans les allées du pouvoir, on le surnommait le "vice-président" ou le "ministre bis de l'Economie". Certains le voyaient déjà à Bercy quand d'autres l'imaginaient en nouveau théoricien de la "deuxième gauche", une gauche réformiste devenue orpheline depuis le crash de Dominique Strauss-Kahn.

Quand Hollande a annoncé le 31 décembre [2013] des mesures favorables aux entreprises, les amis de "Manu" ont jubilé :

Signe de l'influence grandissante du conseiller qui murmurait à l'oreille du président ? Ou simplement l'évidence que Macron incarnerait la seule voie économique possible par temps de crise ?

Trop habile pour assumer la paternité du "tournant" social-démocrate du président, le conseiller n'en a pas moins été identifié comme "l'hémisphère droit" de François Hollande, celui qui prône 50 milliards d'économies. Par opposition à son "hémisphère gauche", symbolisé à l'époque par Aquilino Morelle, 51 ans, l'homme qui avait soufflé à François Hollande la formule "cet adversaire sans nom, c'est le monde de la finance" et suggéré de taxer à 75% les super-riches.

Bien entendu, l'ex-conseiller politique du président réfutait toute "guéguerre idéologique" entre Emmanuel Macron et lui : "Neurologiquement, il n'y a qu'un seul cerveau, celui du président de la République. C'est lui seul qui décide."

Bombardé porte-parole de l'Elysée en février 2014, Aquilino Morelle avait aimablement proposé au "Nouvel Observateur" de jouer les duègnes en faisant descendre le jeune conseiller dans son vaste bureau jouxtant celui du président. La conversation devrait rester "off", exigeait-il. La scène était croquignolesque. Morelle le gauchiste tentant de joindre Macron le droitier sur son portable. Une fois, deux fois, trois fois... Mais le benjamin ne décrochait pas. Il a horreur qu'on le siffle.

Depuis qu'il est devenu la cible de l'aile gauche du PS, il se fait encore plus rare. Après les annonces de janvier [2014], Marie-Noëlle Lienemann pilonnait sur toutes les antennes le mauvais génie de François Hollande, promoteur d'une politique de l'offre "suicidaire". A ses yeux, Macron est l'un de ces technocrates biberonnés à la finance qui trustent les postes au coeur de l'Etat avant de partir "pantoufler" dans le privé. Ces attaques laissent le "Mozart de l'Elysée" totalement froid. "Les spartakistes, on les aura !", a-t-il répondu à un ami inquiet.

Certes, il a été associé gérant de la banque Rothschild, qui a fait de lui un petit millionnaire. Mais l'argent, prétend-il, n'a jamais été sa motivation première. Sinon il n'aurait pas accepté de diviser son salaire par dix pour travailler au Château.

Installé [jusqu'en juin 2014] au quatrième étage du palais de l'Elysée dans l'ancien bureau de François Pérol, conseiller économique de Nicolas Sarkozy, ex-Rothschild lui aussi, dont le parachutage à la BPCE (Banque populaire-Caisses d'Epargne) est entre les mains de la justice, Emmanuel Macron avait accroché au-dessus de la cheminée la couverture du roman d'Albert Simonin "Le cave se rebiffe". Un manifeste.

Lors de sa prise de fonction, le conseiller a été surpris, selon ses proches, par "l'invraisemblable lourdeur protocolaire de cette maison gérée comme une sous-préfecture". Il a dû s'y faire. Gardes du corps, personnel aux petits soins, cela fait partie du décorum.

Tous les jours de la semaine, souvent week-end compris, il a passé dix-huit heures à instruire des dossiers économiques, mais aussi à préparer les sommets européens et le G20. Il voyait défiler tout ce que la République compte d'importants : les ministres, le directeur du Trésor (souvent), le directeur de l'Agence des Participations de l'Etat (tous les samedis matin), les patrons (fréquemment), les journalistes (un peu), les éditeurs (qui tentaient de lui arracher la promesse d'écrire ses Mémoires). Le conseiller du prince n'avait accepté cet enfermement que dans la mesure où il pouvait contribuer à faire "avancer la France". "Sinon, je ne resterai pas deux ans", lâchait-il d'emblée à ses interlocuteurs.

Comme son mentor Jacques Attali, grand collectionneur de sabliers, Emmanuel Macron est obsédé par le temps qui passe. Peut-être est-ce lié au fait que ses intimes, des sexa aux nonagénaires, sont beaucoup plus âgés que lui. Michel Rocard, Serge Weinberg, Jean-Pierre Jouyet ou encore l'éditeur Bernard Fixot. Le sherpa de Hollande aime les gens qui ont de l'expérience, de la profondeur et des histoires à raconter. S'il n'a conservé aucun copain d'enfance ou de lycée, il a gardé en revanche le contact avec sept joyeux lurons de Sciences-Po et de l'ENA, qui occupent aujourd'hui des postes clés au coeur de la République.

Entre eux, ils se nomment les "académiciens", en raison de leurs innombrables réunions à l'Académie de la Bière, une brasserie située à deux pas de l'ENA, à Strasbourg. Le souvenir des soirées karaoké au Bunny's Bar où "Manu s'illustrait par ses interprétations de Mike Brant, Brassens, Moustaki ou Jean-Jacques Goldman" les rend nostalgiques. Le petit garçon modèle semblait rattraper le temps des boums perdues, lui qui avait une préférence marquée pour la lecture et le piano (3e prix du conservatoire d'Amiens). Les "académiciens" ont gardé l'image d'un camarade passionné par la politique au sens large.

Aujourd'hui professeur d'économie à l'université de Nantes, Marc Ferracci, un ami de Sciences-Po, se souvient qu'"il discutait beaucoup des inégalités". Tous deux ont été conviés par Emmanuel Macron à participer au groupe de travail de La Rotonde (du nom de son restaurant fétiche à Montparnasse) pour préparer le programme économique du candidat Hollande en 2012.

Sous la coupe sage et les costumes de flanelle qui lui donnent un petit air de notable de la IVe République, Emmanuel Macron est un ovni. Issu d'une famille de médecins - parents professeurs au CHU d'Amiens (père neurologue, mère pédiatre), frère radiologue, soeur néphrologue -, le gamin élevé chez les jésuites a toujours été un boulimique de la connaissance. Philosophie, littérature, politique, économie, histoire, relations internationales, tout l'intéressait.

Lauréat du concours général de français, élève de khâgne B/L (lettres et sciences sociales) au prestigieux lycée Henri-IV, il n'est en revanche pas tout à fait normalien, contrairement à ce qu'il laisse entendre. En réalité, admissible sur la liste complémentaire, il a été autorisé à suivre les cours de l'ENS Fontenay-Saint-Cloud. Une blessure d'orgueil.

Normalien ou pas, Emmanuel Macron impressionne par sa culture, son assurance "sans arrogance" (selon François Henrot, associé-gérant chez Rothschild) et sa capacité d'empathie. En deux ans, le surdoué au contact facile et à l'humeur égale a su se rendre indispensable. Quand Angela Merkel fait de la résistance sur l'union bancaire, c'est lui qu'on appelle à la rescousse. Quand il faut débloquer le dossier PSA, c'est lui aussi. Lui encore quand les patrons cherchent une oreille compatissante pour se plaindre des 75% et de la taxe de 3% sur les dividendes.

Le "Jiminy Cricket social-démocrate" de François Hollande n'a pas toujours été porté aux nues. Il a eu sa traversée du désert. Ceux qui l'adulent aujourd'hui lui reprochaient hier de ne "pas peser bien lourd" dans le système Hollande. Certes, il tutoie le président, mais il a mis du temps à le convaincre de prendre ce "tournant" qu'il préfère qualifier d'"approfondissement".

Dans "le Pouvoir", une plongée à l'Elysée tournée au long de l'année 2012 par Patrick Rotman, on voit le conseiller se faire rabrouer par un président cassant et maussade quand il suggère de donner aux Français des perspectives jusqu'en 2020.

Emmanuel Macron a eu besoin de temps pour imposer ses vues. Il n'a pas, avec Hollande, la proximité des vieux compagnons de route. Le jour de la victoire de François Mitterrand, il n'avait pas 4 ans. Quant à la défaite de Lionel Jospin, un marqueur pour la promo Senghor, il l'a vécue à distance. Le 21 avril 2002, l'apprenti haut fonctionnaire faisait son stage de l'ENA à l'ambassade de France au Nigeria.

Le jeune ambitieux n'a fait la connaissance du premier secrétaire du Parti socialiste qu'en 2008. Entre eux, cela a tout de suite fait tilt.Macron admire Hollande pour "son intelligence, sa capacité à jouer sur plusieurs claviers, son endurance, son indifférence à ce que l'on pense de lui". Hollande dit de Macron :

Sur le fond, les deux hommes partagent les mêmes convictions. En France, on semble découvrir la fibre sociale-démocrate de François Hollande ! Les Allemands, eux, ne sont pas surpris. "Je n'ai jamais vu de grandes différences entre les socialistes français et les sociaux-démocrates allemands", déclarait l'ex-chancelier Gerhard Schröder au "Nouvel Observateur", en mars dernier, en marge d'une conférence à l'ambassade d'Allemagne. François Hollande n'a-t-il pas initié, en 1983, le mouvement des "transcourants" et adhéré au club Témoin de Jacques Delors aux côtés de Ségolène Royal, Jean-Yves Le Drian, Jean-Pierre Jouyet et Pascal Lamy ?

Intellectuellement Emmanuel Macron appartient à une gauche plus modérée que libertaire. Cela n'exclut pas les "transgressions" sur le plan sociétal. A l'âge de 17 ans, il est tombé amoureux de Brigitte, professeur de français de vingt ans son aînée et mère de famille, qui animait le club théâtre du lycée privé La Providence d'Amiens. Pour étouffer le scandale, le mineur a dû fuir à Paris, où il a fait sa terminale à Henri-IV. Le jeune homme qui a épousé sa belle en 2007 à l'hôtel Westminster du Touquet revendique le bonheur d'être six fois "grand-père" des petits-enfants de sa femme.

Son ancrage à gauche, il le doit à ses proches, et notamment à sa grand-mère, disparue l'année dernière, à laquelle il vouait un culte. Enfant, l'aîné de la fratrie Macron avait choisi de vivre "en garde partagée" - c'est son expression - entre ses parents et sa grand-mère, cette directrice de collège, élevée par des parents illettrés.

"Libéral", Macron ? Lui préfère se dire "réaliste". Il est un Michel Rocard relooké XXIe siècle.

L'autre icône du sherpa de Hollande, c'est le philosophe Paul Ricoeur, dont il a été l'assistant pour la rédaction de son dernier ouvrage, publié en l'an 2000 - le plus abouti -, "la Mémoire, l'histoire, l'oubli". Une rencontre mémorable.

Après une maîtrise de philosophie sur "le Fait politique et la représentation de l'histoire chez Machiavel", Emmanuel Macron a rédigé un mémoire de DEA sur "l'Intérêt général. Lecture et principes de la philosophie du droit de Hegel", sous la direction du philosophe Etienne Balibar. Il bifurque ensuite vers la haute fonction publique.

Depuis lors, le trentenaire qui a déjà connu quatre vies - philosophe, inspecteur des Finances, banquier d'affaires, et conseiller du prince - n'a jamais cessé de réfléchir à l'exercice du pouvoir. En 2011, il a publié dans la revue "Esprit" une analyse du décalage entre le discours et l'action politique intitulée "les Labyrinthes du politique" ("Esprit", mars-avril 2011). Il y met en exergue la difficulté de concilier les impératifs de court terme et la nécessité des réformes à long terme. Après deux années passées au coeur de la machine d'Etat, Emmanuel Macron n'en retirerait pas une ligne.

Cela explique, selon lui, la rapide disgrâce dans laquelle Nicolas Sarkozy puis François Hollande sont tombés.

Début 2014, à Matignon comme à Bercy, on tentait de minimiser le rôle d'Emmanuel Macron auprès du président. Jean-Marc Ayrault ne mettait pas en doute l'intelligence du numéro deux de l'Elysée. "Nous avons tous fait le même diagnostic sur la situation et la nécessité de faire un rattrapage", soulignait le Premier ministre d'alors au "Nouvel Observateur", rappelant qu'il avait "présenté un pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi dès le mois de novembre 2012".

Quant à Pierre Moscovici, il louait dans son dernier ouvrage, "Combats" (Flammarion,2014), "le talent, l'inventivité et l'humanité" de l'ex-secrétaire général adjoint, un homme qui "ira loin". Mais, en privé, l'ancien ministre de l'Economie qualifié de "transparent" par les patrons s'offusquait d'être traité en inférieur. "L'histoire jugera", plaidait-il. Théoriquement le strausskahnien aurait dû être le porte-étendard du changement de cap économique de la France. Tout comme Ayrault, si proche des sociaux-démocrates allemands. Mais c'est "le petit Macron", comme le surnomme Alain Minc, qui a ramassé la mise.

L'intéressé n'ignore pas combien cette position peut susciter de jalousie et de rancoeurs. Récemment l'un de ses visiteurs, personnalité en vue de l'establishment parisien, l'a affublé du sobriquet "Macaron" : "Sucré à l'extérieur et mou à l'intérieur" ...

En offrant Bercy à son ancien conseiller, François Hollande oublie une de ses promesses de campagne : tout ministre doit avoir reçu l'onction des urnes. Au ministère de l'Economie, Emmanuel Macron pourra poursuivre sa réflexion sur ce que doit être la gauche au XXIe siècle. Rêve-t-il d'atteindre le sommet du pouvoir ? François Hollande, son patron, a attendu d'avoir 57 ans pour devenir président. Emmanuel Macron en a aujourd'hui 36. La route est encore longue.

Odile Benyahia-Kouider – Le Nouvel Observateur

 

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26 août 2014 2 26 /08 /août /2014 20:38

Elysée: Emmanuel Macron, l'ex-banquier qui murmure à l'oreille de François Hollande

Par Corinne Lhaïk, publié le 15/05/2013 à 18:03, mis à jour le 26/08/2014 à 19:17

Brillant, sympathique, charmeur, l'ex-secrétaire général adjoint de l'Elysée, Emmanuel Macron, a les convictions de la gauche libérale. Mais les prudences de François Hollande l'ont obligé à la patience. Voici le portrait que L'Express en fait en mai 2013, un peu plus d'un an avant qu'il ne devienne ministre de l'Economie.

Francois Hollande parle avec le ministre de l'Economie Pierre Moscovici, son conseiller Aquilino Morelle, Philippe Leglise Costa (à gauche) and Emmanuel Macron à l'Elysée, le 31 juillet 2012.

C'est un dîner comme Paris sait les mitonner. Des banquiers, des communicants, des conseillers de ministre... de droite et de gauche. Nous sommes à la fin de 2008, Nicolas Sarkozy dirige la France, tandis que François Hollande a pris le sombre corridor qui mène aux oubliettes de l'Histoire. Il n'est plus premier secrétaire du PS et les socialistes commencent à regarderDominique Strauss-Kahn avec les yeux de Chimène.

Autour de la table, deux hommes font connaissance en parlant politique. "En 2012, ce sera François Hollande, je mise sur lui", dit le premier au second, qui le prend pour un fou. En Bourse, on appelle cela "acheter à la baisse" et il n'est pas étonnant que ce hollandais précoce soit directeur à Rothschild & Cie Banque. Il se nomme Emmanuel Macron. Moins de quatre ans plus tard, le 15 mai 2012, il devient, à 34 ans, secrétaire général adjoint de la présidence de la République.

Très vite, Macron se fait remarquer. Par son âge, un objet de curiosité - il fréquente l'école primaire à l'époque où Laurent Fabius habite Matignon. Par son parcours, une hyperbole de l'excellence: en sixième, il connaît déjà les racines grecques et latines de la langue française (1). Par ce supplément d'âme qu'il donne à son CV d'énarque en tâtant de la philosophie - il est un temps l'assistant de Paul Ricoeur - et de la politique - il milite dans le Pas-de-Calais dans les années 2000.

Emmanuel Macron, 35 ans, grand-père...

Par sa vie personnelle, pas banale. Quand il dit qu'il va rejoindre ses petits-enfants en week-end, le trentenaire ne parle pas de ses enfants en bas âge, mais bien de ses petits-enfants. En réalité, ceux de sa femme, vingt ans de plus que lui et mère de trois grands adultes. Cette professeure de français enseigne dans une institution religieuse réputée de la capitale. "Elle est de ces profs dont les élèves se souviennent longtemps, parce qu'elle leur a donné le goût de la littérature", relate l'un de ses collègues.

Avant d'entrer à l'Elysée, il a demandé à avoir la main sur l'économie, le social et l'Europe.

REUTERS/Bertrand Langlois/Pool

Ces derniers temps, Emmanuel Macron est dans la peine: en avril, il a perdu sa grand-mère. Une passion. A 5 ans, le petit Amiénois demande à vivre avec cette directrice d'école. En pratique, elle l'élève autant que ses parents, tous deux médecins. Cet enfant de la bourgeoisie et de la province, formaté par les jésuites et les écoles de l'élite, n'a pas le cynisme de son profil. Il est (encore?) protégé par son enthousiasme, voire sa naïveté, et par son humour. A l'Elysée, pendant les réunions ennuyeuses - et il y en a -, il envoie des SMS aux autres conseillers, ceux qu'il aime bien, pour croquer une situation ou moquer un personnage. Il en expédie aussi à 2 heures du matin: le Mozart de l'Elysée dort de quatre à cinq heures par nuit, par obligation, par inclination.

A l'Inspection des finances (2004-2008), il ne se signale pas uniquement par un rapport sur la gestion de la trésorerie de l'Etat. Il fait rire ses camarades. "Il était mon voisin de bureau et, quand je rentrais de mission, j'allais le voir pour décompresser", raconte Sébastien Proto, le jumeau de Macron. Elèves de la promotionLéopold Sédar Senghor de l'ENA (2004), ces deux-là alternent cabinets et banque d'affaires. La gémellité s'arrête là où commence la politique: "Je suis de droite, sarkozyste, il est de gauche", affirme Proto, qui a travaillé avec Eric Woerth et Valérie Pécresse. Les deux hommes ont échangé beaucoup de textos durant la campagne. Ils continuent à se voir et à "se faire la bise".

La Sarkozie l'a dragué en 2007, en vain

Macron aurait pu, lui aussi, embrasser la Sarkozie, qui l'a sollicité en 2007. "Mais il avait choisi la gauche, confirme un ancien conseiller de l'ex-président, bien que, intellectuellement, je ne voie pas très bien ce qui nous sépare. Du moins en matière économique." Il n'est pas étonnant que deux tenants d'une gauche pétrie de réalisme, Jean-Pierre Jouyet, ami de Hollande, etJacques Attali, recruteur du jeune François en 1981, l'aient repéré. Jouyet l'encourage à travailler pour Hollande. Attali aussi, qui l'a présenté au futur président au cours d'un dîner, en 2007, et le choisit pour être rapporteur général adjoint (puis membre) de sa Commission pour la libération de la croissance française. Un concentré d'expertises et d'ego que l'intelligence analytique de Macron réussit à harmoniser.

Au milieu des années 2000, le jeune technocrate produit quelques notes pour l'équipe de DSK. Il est de nouveau sollicité à la fin de 2010. En vain. Il appartient alors à la petite troupe qui se réunit tous les lundis matin du côté du Trocadéro, dans l'appartement parisien d'André Martinez, camarade d'HEC de François Hollande. Puis, de juillet à décembre 2011, il anime un cénacle d'experts et d'économistes, le groupe de la Rotonde, qui rapporte tous les quinze jours au candidat.

Je n'irai pas à l'Elysée pour faire des vieux trucs (Emmanuel Macron)

Déjà, on parle de lui comme du futur secrétaire général adjoint de l'Elysée. Sûr de sa valeur, il n'acceptera pas moins. Il veut avoir la main sur l'économie, le social et l'Europe, triptyque indissociable selon lui. Au début de mai 2012, il s'est déjà renseigné: le passage de Rothschild à l'Elysée n'est pas contraire aux règles déontologiques. La feuille de route est dans sa tête: redresser les comptes publics et retrouver de la compétitivité, y compris à coups de réformes dites libérales, qui font hurler la moitié des socialistes.

Marché du travail plus flexible, mise sous conditions de ressources des allocations familiales et des remboursements maladie, lutte contre les "rentes de gauche", celles de la fonction publique. Mais il croit aussi que l'on peut augmenter les impôts et qu'"une société respire mieux quand chacun réussit selon ses mérites et quand l'Etat est présent dans les moments durs de la vie". En mai 2012, il annonce à un proche: "Je n'irai pas à l'Elysée pour faire des vieux trucs."

La Macron-économie, c'est quoi?

C'était il y a un siècle. Depuis, l'apprenti du pouvoir a compris la différence entre un rapport de la commission Attali et la politique version Hollande. "Certains jours, il s'en accommode, d'autres, il s'impatiente", dit l'un de ses amis. Pourtant, les grands choix vont dans son sens. La réduction de la dépense publique est engagée, comme la bataille de la compétitivité, certains excès fiscaux du début du quinquennat sont corrigés (mode de paiement de la taxe à 75% sur les très riches, fiscalité des plus-values mobilières), la flexibilité du marché du travail est lancée à travers la loi qui transpose un accord des partenaires sociaux. Macron s'y implique, rencontrant Jean-Claude Mailly, secrétaire général de Force ouvrière, à plusieurs reprises pour le convaincre de grogner avec parcimonie contre ce texte qu'il a refusé de signer.

Le secrétaire général adjoint joue aussi, avec succès, un rôle protecteur des patrons d'entreprises publiques tour à tour menacés: Carlos Ghosn (Renault), Stéphane Richard (France Télécom), Henri Proglio (EDF) et, tout dernièrement, Jean-Paul Bailly (La Poste). Il est enfin le metteur en scène et le pédagogue de la stratégie de redressement des finances publiques, en particulier auprès de Berlin: plaider que la France respectera l'objectif de retour des déficits publics au-dessous de 3 % du PIB, mais plus lentement que prévu.

Dans le film Le Pouvoir, il émerge quand les autres se signalent par leur silence ou leur déférence.

J.-C. Coutausse/Divergence

La Macron-économie semble à l'oeuvre, mais il faut un entomologiste très minutieux pour la déceler, tant les piétinements divergents des Ayrault, Moscovici, Montebourg, Le Foll ou Duflot brouillent les pistes. Peu de ministres portent le message de cette social-démocratie chère au secrétaire général adjoint. Si le premier d'entre eux s'en revendique, son expression est couverte par un président soucieux d'équilibres politiques.

Macron semble d'autant plus isolé que le naufrage de Jérôme Cahuzac l'a privé d'un allié. Les deux hommes se connaissent depuis 2008, Macron fait partie de ceux qui ont réconcilié le député de Lot-et-Garonne avec le candidat Hollande. "Pourtant Cahuzac se sentait mal aimé de l'Elysée, Macron y était sa seule attache", note un ministre. En décembre, quelques jours après les révélations de Mediapart, le conseiller de Hollande confie: "Je crois ce qu'il dit, c'est mon ami.". Aujourd'hui, il conjugue cette amitié à l'imparfait.

Ce que François Hollande pense de lui...

La Macron-économie existe, mais François Hollande n'est pas homme à s'en remettre à un seul inspirateur. Il n'est pas Nicolas Sarkozy, pour qui Xavier Musca, secrétaire général adjoint puis secrétaire général, était le grand chambellan de l'économie. Et Emmanuel Macron n'a ni l'expérience administrative et politique ni la stature internationale d'un Xavier Musca, qu'Angela Merkelreconnaissait et appréciait. D'ailleurs, en Hollandie, les conseillers n'ont pas de vie propre.

C'est un bon élément, original et créatif (François Hollande)

C'est donc à titre exceptionnel que le président a accepté de parler de Macron à L'Express: "C'est un bon élément, original et créatif." Les deux hommes s'aiment bien, ils partagent le goût des bons mots et la détestation des conflits. Mais, à l'Elysée, Macron n'est pas un enfant unique. S'il s'entend bien avec Aquilino Morelle, conseiller politique, il doit cohabiter avec Philippe Léglise-Costa, spécialiste des questions européennes, diplomate aussi discret que Macron est solaire. Et avec Pierre-René Lemas, le secrétaire général.Entre ce préfet, soucieux de préserver la France telle qu'elle est, et l'inspecteur des finances, qui la rêve telle qu'elle devrait être, le courant ne passe pas vraiment.

Dans le film de Patrick Rotman Le Pouvoir, sorti en salles le 15 mai, un seul collaborateur émerge quand les autres se signalent par leur silence ou leur déférence: Emmanuel Macron intervient avec naturel, insiste pour que le président donne de la profondeur à son action et se projette en 2020. Il parle avec familiarité d'Angela Merkel: "Elle veut danser le tango avec toi et elle pense que c'est elle qui doit mettre la jambe droite. Nous, on pense pareil."

>> Lire aussinotre critique du documentaire de Patrick Rotmansur la première année de François Hollande à l'Elysée, Le Pouvoir

Macron écrit aussi de longues notes pour le chef de l'Etat, afin de préciser sa pensée, notamment sur la social-démocratie. Dans les réunions avec ministres, il lui arrive de presser son patron de réduire les dépenses. "Ah oui, mais il faut dire lesquelles!" rétorque le président.

Rien n'échappe à ce faux débonnaire qu'est François Hollande. "Tiens, on t'a beaucoup vu", remarque-t-il, lorsque son conseiller apparaît dans des articles. Et quand il apprend - très vite - que Macron vient de partager un petit déjeuner avec un grand patron étiqueté sarkozyste, il interroge: "Que faisais-tu chez lui?" Ces incartades et escapades sont constatées, mais tolérées, car utiles: "Macron est le lien avec une certaine économie que l'on n'aime pas, mais avec laquelle il faut composer", dit un PDG.

Macron est le lien avec une certaine économie que l'on n'aime pas (un PDG)

A quoi sert la Macron-économie? A calmer les patrons. Ils entrent, vibrants d'espoir, dans le bureau du secrétaire général adjoint, ils en sortent des étoiles plein la tête. "Vous êtes d'accord avec lui à 100%, cela en est même troublant", soupire l'un de ces visiteurs. Et après? Rien ou pas grand-chose à leurs yeux. Ils ne voient pas les dépenses publiques se réduire, malgré les promesses, ils redoutent de nouvelles hausses d'impôts. Laurence Parisot est l'une des rares à plaider en sa faveur. "Les patrons sont trop gourmands, Emmanuel est un précieux relais de la voix des entreprises. Il a été le premier, dès juin, à comprendre les exigences de la compétitivité", dit la présidente du Medef.

Trop politique pour les patrons, trop libéral pour les politiques...

La Macron-économie est donc condamnée à la suspicion: trop politique pour les patrons, trop libérale pour les politiques. Le secrétaire général adjoint, c'est son rôle, navigue entre ces mondes. Environ tous les deux mois, il continue de réunir le groupe de la Rotonde à l'Elysée. Il consulte ses aînés de l'Inspection des finances. Avant de choisir la banque d'affaires - il entre chez Rothschild en septembre 2008 -, il avait sondé Alain Minc, l'un des parrains de cette institution. Qui lui indique le chemin de la finance privée, avec ce commentaire: tu gagneras de l'argent et la liberté de faire ensuite de la politique.

Il interroge aussi Xavier Musca, qui lui donne l'avis inverse, préférer le service public. Marque de courtoisie, Macron téléphone à ce dernier après que Jean-Marc Ayrault a annoncé, le 23 mai 2012, que Xavier Musca ne serait pas nommé à la tête de la Caisse des dépôts. Les contacts n'ont pas cessé : de l'Elysée, Macron téléphone encore à Musca pour lui demander son avis au moment de la crise chypriote, en mars.

Passer de la banque à l'Elysée et vice versa, c'est très sarkozien... (Emmanuel Maurel)

Les ministres qui le connaissent l'aiment bien. Pierre Moscovici, sans surprise; plus curieusement, Arnaud Montebourg, alors que les deux hommes, c'est un euphémisme, ne sont pas tout à fait sur la même ligne. Avec Marisol Touraine, il prend un petit déjeuner environ tous les mois. Il a fait connaissance avec Cécile Duflot lors d'un déjeuner, en février, organisé par le directeur du cabinet de la ministre du Logement, Manuel Flam.

Pascal Canfin, lui, est encore surpris que Macron l'ait soutenu dans un combat peu orthodoxe: affecter une partie du produit de la taxe sur les transactions financières au développement des pays pauvres et non au seul désendettement de la France. Tous ne tombent évidemment pas sous le charme: Emmanuel Maurel, chef de file, au PS, du courant Maintenant la gauche, se dit gêné par ce parcours typique d'une "oligarchie qui passe de la banque à l'Elysée et vice versa; c'est très sarkozien".

Président de la République dans vingt ans?

La banque, l'argent... Partageant un café avec Macron dans le bureau de celui-ci, un conseiller de l'Elysée ressent un choc en découvrant le montant du tiers provisionnel dû par son hôte - l'imprimé fiscal traîne sur la table : une somme à six chiffres ! Macron n'est pas resté assez longtemps chez Rothschild pour devenir riche à millions, mais il a très bien gagné sa vie en 2011 et pour les cinq premiers mois de 2012: 900 000 euros (550 000 après charges et impôts), à comparer à ses 156 000 euros annuels aujourd'hui, rémunération identique à celle du président de la République. L'ex-banquier ne paie pas l'ISF (à partir de 1,3 million d'euros).

A un ami il avait confié qu'il ne resterait pas plus d'un an ou un an et demi à l'Elysée. Et après? La politique? Les uns le verraient bien ministre de Hollande, mais la mode est aux poids lourds de la politique. D'autres suggèrent un retour vers la banque, la direction d'une grande entreprise. Jacques Attali fait plus simple: président de la République dans vingt ans. La rumeur dit que l'ancien conseiller de François Mitterrand cherche déjà le Macron de Macron!

(1) Témoignage de sa professeure d'histoire cité par , le 17 mai 2012.

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26 août 2014 2 26 /08 /août /2014 19:46

Les seize mercenaires de l’austérité

Mardi, 26 Août, 2014

LA COMPOSITION DU GOUVERNEMENT VALLS II CONSACRE LA LIGNE AUSTÉRITAIRE ULTRA-MINORITAIRE AU PS.

Crédit:

Aurélien Faidy

L’exécutif a présenté, hier soir, son nouveau gouvernement. La nomination, au ministère de l’Économie d’Emmanuel Macron, ancien banquier d’affaires, pour succéder à Arnaud Montebourg, brutalement remercié, sonne comme une provocation.

Manuel Valls a confirmé, ce mardi soir, le cap austéritaire de son nouveau gouvernement, composé des hollandistes les plus fi dèles et de l’aile droite du Parti socialiste. Dans la soirée, le secrétaire général de l’Élysée, Jean-Pierre Jouyet, ex-ministre de Nicolas Sarkozy, a donc annoncé les nominations signifi catives de Najat Vallaud-Belkacem au ministère de l’Éducation nationale et de la technocrate Fleur Pellerin à la Culture. C’est Emmanuel Macron, l’ ex-banquier d’aff aires passé chez Rothschild, qui succède à Arnaud Montebourg comme ministre de l’Économie, de l’Industrie et du Numérique. Un symbole provocateur du commando austéritaire de choc que le premier ministre a souhaité mettre en place à quelques jours d’un Conseil européen crucial et de l’université d’été du PS, désormais au bord de l’implosion. Car la plupart des personnalités de gauche qui avaient contribué à la victoire de François Hollande en 2012 s’opposent désormais ouvertement aux fondamentaux des choix politiques de l’exécutif. La majorité, qui s’était déjà rétrécie en mars avec le départ des ministres écologistes, est aujourd’hui réduite à peau de chagrin. Les candidats ne se sont pas bousculés au portillon de Matignon et, en dépit de ses efforts, Manuel Valls n’est pas parvenu à débaucher des personnalités de gauche. « Mettre un financier à l’Industrie alors que notre pays a souffert de la mainmise de la finance n’est pas un bon signe », a réagi le député PS Jean-Marc Germain, quand Pierre Laurent s’inquiète que « l’exécutif s’enfonce dans une impasse dangereuse pour la France »

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26 août 2014 2 26 /08 /août /2014 06:51

Laurent (PCF) dénonce "une politique plus droitière que jamais"

AFP le 26/08/204

on vi

Pierre Laurent, secrétaire national du Parti communiste français, a jugé mardi que la composition du nouveau gouvernement de Manuel Valls consacrait "une politique plus droitière que jamais".

Estimant que la liste du nouveau gouvernement présenté mardi est "un échec", Pierre Laurent a regretté que la "politique annoncée" soit "plus droitière que jamais, symbolisée par l'arrivée d'Emmanuel Macron, homme-clé des banques et de la finance". "L'exécutif s'enfonce dans une impasse dangereuse pour la France", ajoute-t-il dans un communiqué.

"La politique Hollande-Valls n'obtient aucun résultat", accuse le secrétaire national du Parti communiste qui insiste: "le nouveau gouvernement va amplifier cette politique, l'échec est programmé d'avance".

"La France peut gravement dévisser. L'autoritarisme et la brutalité comme méthode de gouvernement ne feront qu'accélérer cette grave crise politique", prévient-il.

Pierre Laurent prédit que "ce gouvernement sera incapable de rassembler les Français, la gauche et même les socialistes, pour renouer avec les exigences d'une politique de redressement national".

La "colère (des communistes) est d'autant plus grande que des solutions et des forces existent pour une autre politique", affirme le sénateur de Paris.

Pierre Laurent appelle ainsi "tous ceux qui refusent ce cap suicidaire" à "entrer en action, débattre et agir en commun, rassembler la gauche et le peuple pour construire une autre politique" . Il donne rendez-vous à la Fête de l'Huma les 12, 13 et 14 septembre.

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25 août 2014 1 25 /08 /août /2014 17:59

Une "crise de régime" menace un Hollande qui "se coupe le bras gauche"

AFP le 26/08/2014 à 02:56

Les éditorialistes n'ont pas de mots assez durs mardi pour qualifier la cacophonie gouvernementale, véritable "crise de régime", d'un François Hollande qui se "coupe le bras gauche" et doit saisir "la dernière chance" de "sauver son quinquennat".

Jean-Francis Pécresse, dans Les Echos, insiste sur "la longue, spectaculaire litanie des crises politiques jalonnant ce quinquennat depuis l'affaire Cahuzac jusqu'au divorce avec les écologistes", estimant que "si l'exécutif ne change pas de braquet, le pays est condamné à vivre longtemps encore en régime de crise. Et pourquoi pas en crise de régime".

Alexis Brézet (Le Figaro) soutient que la France a déjà atteint ce stade: "sur fond de défiance abyssale et de désastre économique, comment ne pas reconnaître dans ce gouvernement devenu fou, ce Parti socialiste fracassé, cette majorité en charpie, tous les ingrédients d'une crise de régime dont les conséquences sont encore incalculables", écrit-il.

La stratégie présidentielle consistant à maintenir le cap d'une politique controversée et d'évincer les ministres qui protestent est pour Le Monde "la dernière chance du président de sauver son quinquennat" et pour le couple de l'exécutif c'est "l'heure de vérité : ont-ils la majorité de leur politique ?"

"Rien ne doit dépasser, alignement total", s'énerve Patrick Apel-Muller dans l'Humanité après le débarquement des mutins. "François Hollande et Manuel Valls ont rapidement et brutalement sanctionné les deux ministres, Arnaud Montebourg et Benoît Hamon, qui avaient finalement dit tout haut ce que pensent une majorité d'électeurs de gauche : l'austérité mène le pays dans le mur..."

"Chacun ou presque sait maintenant que les critiques d'Arnaud Montebourg envers l'austérité européenne sonnent juste", renchérit Laurent Joffrin (Libération). Et de toute façon, "avec ou sans Montebourg, il faudra répondre aux questions qu'il a posées. L'autorité est nécessaire dans un gouvernement. Elle ne saurait toujours rimer avec austérité."

En se séparant de ministres réclamant une politique plus sociale, Arnaud Montebourg (Economie), Benoît Hamon (Education) et Aurélie Filippetti (Culture), Hollande "se coupe le bras gauche", ironise Hervé Favre (La Voix du Nord).

"En agissant ainsi, François Hollande et Manuel Valls prennent évidemment un risque: celui de cristalliser un bloc d'opposition à gauche où les +frondeurs+, désormais fédérés autour d'Arnaud Montebourg, feraient la jonction avec les écologistes et le Front de gauche", souligne Guillaume Goubert (La Croix). Mais "le pouvoir exécutif dispose encore d'une carte: celle de la menace de dissolution en cas de blocage des institutions".

Car, relève l'éditorialiste du quotidien catholique, "aucun parlementaire de gauche ne peut souhaiter aujourd'hui retourner devant les électeurs tant serait grande la déroute".

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25 août 2014 1 25 /08 /août /2014 02:32

Pierre Laurent appelle la gauche au rassemblement pour "construire un projet politique alternatif "

pierre Laurent

Lundi, 25 Août, 2014

Pierre laurent

Crédit:

AFP

Après la démission du gouvernement le Secrétaire National du PCF estime que "l'échec sera une nouvelle fois au rendez-vous" et appelle à la mobilisation pour une véritable alternative à gauche.

"La démission du gouvernement Valls est un terrible constat d'échec. La politique mise en oeuvre depuis cinq mois n'obtient aucun résultat.

La France s'enfonce dans la crise parce qu'elle s'enfonce dans l'impasse de l'austérité, de la baisse des salaires et du pouvoir d'achat, des cadeaux sans contrepartie aux dividendes et au capital. Incapable de rassembler les Français, la gauche et même les socialistes sur cette politique, Manuel Valls vient pourtant de recevoir le mandat du Président de la République de persévérer avec une équipe à sa botte, plus droitière encore.

L'autoritarisme et la fuite en avant sont donc la seule ligne de conduite de l'exécutif. L'échec sera une nouvelle fois au rendez-vous. Il n'est pas possible de laisser faire car le prix à payer pour le pays est déjà et sera plus lourd encore.

Devant tant de dogmatisme et d'inconscience, de mépris pour les électeurs, les paroles critiques, si justes soient-elles, ne suffiront pas.

Le temps est venu pour tous ceux qui refusent ce cap suicidaire d'entrer en action, de débattre et d'agir en commun, de rassembler la gauche et le peuple pour construire une autre politique, avec une autre équipe, décidée à renouer avec les exigences de redressement social et de justice fiscale, de lutte contre les gâchis de la finance, de créations d'emplois utiles aux services publics, au logement, à l'industrie et à la transition écologique, de refondation démocratique de la République.

J'appelle dans tout le pays à la convergence et à la mobilisation contre les mauvais coups qui s'annoncent, et à la construction d'un projet politique de gauche alternatif."

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19 août 2014 2 19 /08 /août /2014 07:52

Le pacte de responsabilité est la bonne solution, juge Gattaz

  • Reuters/Reuters - La France peut sortir du marasme économique grâce au pacte de responsabilité mais il faudra aller plus loin en faisant sauter des verrous, comme les seuils sociaux, pour retrouver une croissance …plus

PARIS (Reuters) - La France peut sortir du marasme économique grâce au pacte de responsabilité mais il faudra aller plus loin en faisant sauter des verrous, comme les seuils sociaux, pour retrouver une croissance forte, a déclaré lundi le président du Medef.

Pierre Gattaz estime que "la France peut rebondir" dans un billet posté sur son blog quelques jours avant les universités d'été du mouvement patronal, les 27 et 28 août, où le Premier ministreManuel Valls fera une intervention très attendue.

"Redisons-le: le pacte est la bonne solution, la politique de soutien à la compétitivité des entreprises est la bonne solution", répond-il à ceux, notamment à l'aile gauche du Parti socialiste, qui veulent rompre avec la politique de l'offre lancée par François Hollande et plutôt stimuler la demande.

"Sur ce point, le gouvernement fait ce qu'il faut et va dans la bonne direction. Pour une fois, reconnaissons-le!"

Le président de la principale organisation patronale française apporte ainsi son soutien à Manuel Valls, qui a déclaré dans une interview au Journal du dimanche qu'il était "hors de question de changer" de politique.

"Le pacte de responsabilité et ses 41 milliards de baisse du coût du travail vont véritablement entrer en oeuvre maintenant", a dit le Premier ministre en fustigeant "certains à gauche qui tiennent des propos irresponsables".

Pierre Gattaz s'en prend à ceux -syndicalistes et députés de la gauche du PS- qui estiment que les entreprises bénéficient grâce au pacte de "cadeaux" qui pourraient être mieux utilisés en les injectant dans le pouvoir d'achat.

"On nous dit que le 'pacte est mort'", écrit-il. "Sauf que pour mourir, il faut commencer à vivre."

Or, rappelle-t-il à l'instar du gouvernement, les baisses de charges prévues par le pacte n'entreront en vigueur qu'en 2015 et n'ont donc pas encore pu produire leurs effets.

SEUILS SOCIAUX ET TRAVAIL DU DIMANCHE

Le président du Medef estime que cela ne suffira pas puisqu'elles ne feront que compenser les 40 milliards d'euros de charges supplémentaires imposées selon lui aux entreprises depuis 2011 et qui "minent la compétitivité des entreprises".

"Il faut aller au-delà. Il faut peser sur des leviers qui peuvent relancer la croissance et qui ne sont pas budgétaires (on les connaît tous: les seuils, le travail le dimanche et le soir, les verrous sectoriels, etc.)", ajoute-t-il.

Il s'agit là de pistes sur lesquelles le gouvernement s'est lui aussi engagé à travailler.

Des négociations vont s'ouvrir en septembre sous l'égide du gouvernement pour réviser les seuils sociaux de salariés au-delà desquels les entreprises se voient imposer des obligations sociales, une réforme rejetée par les syndicats et le PS.

La réforme des professions réglementées, par laquelle le ministre de l'Economie Arnaud Montebourg entend rendre 6 milliards d'euros de pouvoir d'achat aux Français, ainsi que des mesures d'encouragement à la construction de logements, qui ne redémarre pas, sont également à l'ordre du jour.

Le ministre des Finances, Michel Sapin, a quant à lui exhorté lundi sur RTL le patronat à prendre ses responsabilités en assumant des risques grâce au pacte.

"Ces décisions ne sont pas encore prises, mises en oeuvre, mais il faut que les entreprises prennent leurs responsabilités, les moyens commencent à leur être redonnés, elles savent que ça va continuer, elles peuvent prendre leurs décisions, leurs risques", a-t-il expliqué.

(Yves Clarisse, édité par Chine Labbé)

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2 mai 2014 5 02 /05 /mai /2014 10:10

Manuel Valls est passé sur l'autre rive en assumant une politique de droite (Olivier Dartigolles)

A la tribune de l'Assemblée nationale, le Premier ministre a répondu à la fronde de députés socialistes par quelques aménagements cosmétiques mais l'affront à notre pays, aux familles, aux fonctionnaires et aux retraités est assumé crânement.

Pour la première fois sous la V° République, un chef de gouvernement issu d'une majorité parlementaire de gauche défend une politique dont la droite et le patronat avaient rêvé sans jamais espérer aller aussi loin, aussi brutalement.

Un âge d'or pour les entreprises, sans contre-partie, payé sur le dos du monde du travail et des plus fragiles. Une hémorragie de 50 milliards d'euros dans la dépense publique et sociale pour moins de service public, de solidarité et d'égalité de traitement, le dynamitage en règle de la protection sociale et de la démocratie locale.

Il n'y aura pas « d'apaisement » avec une telle orientation comme y invite M.Valls mais une aggravation rapide et dangereuse de la crise politique, sociale et économique. « Ce qui empêche d'installer la confiance », c'est une politique de droite alors que le changement, en 2012, avait été annoncé à gauche. Le premier ministre lui est passé sur l'autre rive en assumant une politique de droite : celle d'une austérité à perpétuité.

Olivier Dartigolles, porte parole du PCF

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25 avril 2014 5 25 /04 /avril /2014 17:28

Les contours du Pacte de responsabilité et de solidarité

24/04/2014

La présentation du Programme de stabilité 2014-2017 a permis de préciser les contours du Pacte de responsabilité et de solidarité, destiné à accélérer la reprise en soutenant massivement l'investissement et l'emploi ainsi que le pouvoir d'achat des plus modestes.

AFP

Accélérer la reprise, c'est la raison d'être du Pacte de responsabilité et de solidarité. C'est un choix stratégique qu'a fait le président de la République, grâce à une analyse lucide de la situation.

Michel Sapin, le 23 avril 2014

Annoncé par le président de la République le 14 janvier dernier puis présenté par Manuel Valls le 8 avril lors de sa déclaration de politique générale, le Pacte de responsabilité et de solidarité est structuré autour de plusieurs piliers : des allègements supplémentaires de cotisations patronales ; la modernisation du système fiscal et la baisse de la fiscalité pour les entreprises ; la simplification des procédures administratives ; des engagements en matière d’emploi (les "contreparties") ; des mesures de solidarité en faveur du pouvoir d’achat des ménages, notamment des plus modestes.

  • Une poursuite de l’allègement du coût du travail : le Pacte de responsabilité et de solidarité prévoit une amplification de la baisse du coût du travail afin de répondre à un double objectif : favoriser la création d’emploi et améliorer la compétitivité de notre économie et sa capacité à exporter.
    En 2015, le coût du travail au niveau du Smic sera réduit avec l’exonération des cotisations patronales versées aux Urssaf, hors cotisations d’assurance chômage, et par une révision du barème des allègements existants jusqu’à 1,6 fois le Smic.
    A partir du 1er janvier 2016, les cotisations famille seront abaissées de 1,8 point, pour les salaires compris entre 1,6 et 3,5 Smic. Au total, les allègements supplémentaires sur les salaires inférieurs à 1,6 Smic s’élèveront à près de 4,5 milliards d'euros, ceux sur les salaires supérieurs à 1,6 Smic s’élèveront également à 4,5 milliards d'euros.
    Les cotisations familiales seront également réduites à hauteur de 1 milliard pour les indépendants.
    Compte tenu de la montée en charge du CICE - le crédit d'impôt compétitivité emploi c'est déjà 12 milliards d'aides aux entreprises versées pour 2014 -, le coût du travail sera bien allégé de 30 milliards d'euros d'ici à 2017, soit un montant comparable à celui des cotisations famille, conformément à l'engagement du président.

  • Une modernisation du système fiscal des entreprises : le Pacte prévoit une modernisation et une réduction de la fiscalité des entreprises pour favoriser leurs investissements. La contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S), payée par environ 300 000 entreprises, sera supprimée d’ici à 2017, avec une première réduction équivalente à 1 milliard d'euros en 2015 sous la forme d’un abattement, ce qui permettrait d’exonérer deux tiers des contribuables actuels dès la 1ère année. Au total, cette suppression représente plus de 6 milliards d'euros brut qui seront restitués aux entreprises.
    La contribution exceptionnelle sur l’impôt sur les sociétés sera également supprimée en 2016 et le taux normal passera de 33,3 % actuellement à 28 % en 2020 avec une première étape dès 2017.
    Enfin, afin de simplifier le cadre fiscal, plusieurs dizaines de taxes à faible rendement seront supprimées. Cette réforme de la fiscalité favorisera la croissance et l’emploi et, à terme, la fiscalité des entreprises aura baissé de 10 milliards d'euros en 2017.

  • Un agenda de simplification renforcé : le mouvement de simplification de la vie administrative des entreprises sera accentué, pour réduire les procédures et faciliter la prise de décision. La loi d’habilitation du 2 janvier 2014 a d’ores et déjà permis au Gouvernement de légiférer par ordonnances, notamment pour alléger les obligations comptables pour les PME. D’autres mesures de simplification seront prises dans les prochains mois, notamment en suivant les recommandations du Conseil de la simplification qui passera en revue les dix actes clé de la vie des entreprises. Ce conseil, dirigé par le parlementaire Thierry Mandon et le chef d’entreprise Guillaume Poitrinal, aura également pour fonction de suivre les réalisations du programme de simplification et l’évaluation de ses résultats. Le 14 avril, le Conseil a présenté 50 nouvelles mesures de simplification.

  • L’emploi et la modernisation du dialogue social : en contrepartie du Pacte, les entreprises s’engageront en termes d’emploi (notamment des jeunes), de formation professionnelle et de qualité de l’emploi. Ces contreparties, présentées dans leurs grandes lignes dans l’accord conclu entre les partenaires sociaux le 5 mars dernier, doivent être précisées lors de négociations à venir dans chaque branche professionnelle.

Le Pacte de solidarité : 5 milliards en faveur des ménages modestes

Le Pacte, c'est aussi d'ici à 2017 des mesures de solidarité favorables au pouvoir d’achat des plus modestes pour un montant équivalent à 5 milliards d'euros :

  • à compter du 1er janvier 2015, un dispositif de réduction des cotisations salariales, dégressif jusqu’à 1,3 Smic, permettra aux salariés d’accroître leur salaire net d’environ 500 euros par an au niveau du Smic ;

  • dès 2014, une première mesure favorable aux ménages modestes sera engagée. Il s'agit de réduire l'imposition des ménages situés en bas du barème de l'impôt sur le revenu. 500 millions d'euros seront ainsi redistribués dès cette année via le prochain collectif budgétaire qui va corriger la loi de finances 2014. "Trop de foyers modestes sont entrés dans l'impôt ces deux dernières années, il faut faire des corrections", a expliqué Michel Sapin.

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BRUNO FORNACIARI

HPIM3303

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