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9 juillet 2015 4 09 /07 /juillet /2015 01:09

Grèce. Pierre Laurent : « La solution est à portée de main, la France doit s'engager pour la rendre possible »

MERCREDI, 8 JUILLET, 2015

HUMANITE.FR

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L'intervention que Pierre Laurent, sénateur de Paris, à prononcé cet après-midi devant le Sénat à propos de la Grèce.

Monsieur le Premier Ministre,

Mesdames, Messieurs les ministres,

Chers collègues

Face au chantage et à l'injustice, le peuple grec a envoyé dimanche dernier un message d'espoir à toutes celles et ceux qui souffrent de l'austérité. Pour la deuxième fois en 6 mois, le peuple grec a exprimé sa soif de dignité, de démocratie et de liberté.

Il a voté sans céder à l'arsenal de pressions politiques, médiatiques, financières, aux chantages, aux tentatives de détournement de la question qui lui était posée.

Après 5 ans d'une austérité inhumaine, et je rappelle que vous avez tous voté ces mécanismes, 61 % des Grecs, ont dit « non » à une nouvelle baisse des retraites, à l'augmentation de la TVA sur les produits de consommation courante, à une nouvelle saignée d'austérité qui aurait affaiblie encore un peu plus leur pays.

Ils ont réaffirmé leur volonté: sortir de l'austérité et trouver une solution durable et profitable à la Grèce comme à l'ensemble des pays européens au sein de la zone euro.

En somme, ils ont conforté la démarche de négociation honnête et raisonnable qu'Alexis Tsipras n'a cessé de défendre sur la scène européenne depuis son élection.

Monsieur le Ministre, vous savez comme moi que cette démarche n'a pas été celle de ses partenaires, de la Commission européenne, de la Banque centrale européenne et du Fonds monétaire international qui pendant ces longs mois ont joué la faillite du pays, cherchant l'abdication politique de ces nouveaux dirigeants démocratiquement élus.

C'est l'ultimatum du FMI, alors qu'un accord était en bonne voie, qui a contraint le gouvernement grec à se tourner à nouveau vers son peuple.

Ce référendum a remis les pendules à l'heure face à ce coup de force larvé. Il a permis la reprise des négociations. Le fait est que certains gouvernements ne veulent pas qu'une politique s'écartant du dogmatisme libéral dominant puisse être expérimentée dans l'Union Européenne.

L'Europe, et non seulement la Grèce, est face à un choix qui concerne son avenir.

C'est un enjeu démocratique qui nous concerne tous.

Le débat n'est pas technique, car tous les ingrédients d'un accord viable sont sur la table. Comme l'a encore montré Alexis Tsipras ce matin au Parlement européen, le débat est politique.

Qui décide en Europe ?

Est-ce la finance qui gouverne, dicte sa loi ou les peuples ont-ils le droit de maîtriser démocratiquement l'utilisation du système monétaire et bancaire

Un peuple qui vote a-t-il voix au chapitre ou sommes-nous entrés dans la « forme d'inconnue » qui ressemble bien à une dictature de marché ?

De la réponse à ces questions, dépend notre avenir commun.

Français, Grecs, Européens, nous sommes tous concernés. Le Grexit serait irresponsable et serait d'ailleurs la solution la plus coûteuse et de loin pour tous. Nous ne pouvons pas en rester au maintient aveugle des règles qui nous ont déjà conduits à la catastrophe, elles ne sont un avenir ni pour la Grèce, ni pour la France, ni pour l'ensemble des peuples européens.

Dix ans après le Non des Français au Traité constitutionnel européen, les inventeurs de la démocratie, le berceau de notre civilisation, « Le petit peuple qui combat sans épée ni balle » du poète Yannis Ritsos, nous lancent donc un appel salutaire à repenser l'avenir de l'Europe. Ils s'adressent aujourd'hui à la France des Lumières, de la Révolution, de la Liberté, de l'Egalité et de la Fraternité, à la France solidaire, frondeuse, indépendante, résistante et intelligente.

Comme les dizaines de personnalités de gauche, et parfois même de droite, et du mouvement social, syndical, culturel qui ont pris parti pour le peuple grec,

comme les milliers de citoyens qui ont défilé dans notre pays en solidarité,

comme les 67% de Français qui déclarent nécessaires d'autres solutions que l'austérité, le groupe CRC considère que la place de la France est avec les Grecs, pour les sortir de l'impasse, mais aussi parce que la Grèce se bat aujourd'hui pour nous tous, contre les irresponsables qui ont mené l'Europe à la catastrophe ET contre ceux qui en profitent pour vendre leurs camelote populiste et nationaliste.

Le débat n'oppose pas pro et anti européens. Il oppose les dogmatiques de l'ordre libéral, des partisans de la destruction de l'Europe comme le FN et ses alliés, à ceux qui veulent comme Alexis Tsipras, comme nous, comme les syndicalistes allemands, retrouver le chemin d'une Europe solidaire.

L'Europe d'Alexis Tsipras, est celle du progrès social et écologique, de la solidarité et de la démocratie, de la coopération consentie et du respect des choix démocratiques, c'est la nôtre.

C'est à ce peuple debout et à cette idée de l'Europe que la France doit s'allier dès maintenant et jusqu'au bout.

Nous aurions souhaité, monsieur le Premier Ministre, que notre parlement s'exprime sur un mandat de négociations, comme cela se fait dans plusieurs pays démocratiques, dont la Grèce.

Cela aurait peut-être empêché des fautes politiques comme l'éviction du Ministre des finances de la République Hellénique, lors de l'Eurogroup samedi dernier, et la signature par Michel Sapin du texte inhumain instaurant la fin du programme de financement d'urgence des banques grecques, provocant la fermeture de celles-ci, alors même que le Président de la République nous assurait de sa détermination à trouver un accord le lundi précédent.

La France n'a rien à gagner au double langage, à l’ambiguïté, à la faiblesse.

L'heure est au choix et à une parole forte de la France dans ce moment crucial.

Il ne suffit plus de répéter que des propositions responsables doivent être mises sur la table par les Grecs. Elles le sont. La France doit maintenant user de tout son poids pour conclure un accord rapide sur ces bases.

Pour rejeter le Grexit, maintenir la Grèce dans la zone Euro, en s'opposant à toute stratégie visant à sa sortie, en usant si nécessaire de notre droit de veto.

Pour engager sans tarder les discussions sur la restructuration de la dette grecque, et plus généralement des Etats européens, jusqu'à proposer la tenue, pourquoi pas à Paris, d'une conférence européenne de la dette.

Pour soutenir le gouvernement Grec dans les nécessaires réformes pour une fiscalité plus juste et une lutte renforcée contre la corruption, en refusant de nouvelles mesures d'austérité visant de manière indiscriminée la population grecque déjà exsangue.

Pour appuyer un grand plan d'investissements européen destiné à financer le redressement de l'économie productive et la transition écologique.

La BCE en a les moyens. Depuis janvier, elle crée chaque mois 60 millions d'euros avec l'objectif d'aller jusqu'à 1 140 milliards au lieu de les injecter sur les marchés financiers, elle doit mobiliser son formidable pouvoir de création monétaire à travers un fond de développement économique, social et écologique européen, démocratiquement géré.

La Grèce mais aussi tous les européens qui souffrent de l'austérité pourraient en bénéficier.

Monsieur le ministre, la solution est à portée de main. La France doit s'engager sans faiblir pour la rendre possible.

Pierre Laurent, sénateur de Paris.

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BRUNO FORNACIARI

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