+ VIDEO. Selon le rapport de l'ONG Oxfam, l'année 2017 a connu un accroissement record du nombre de milliardaires. Au total, 42 personnes détiennent autant que les 3,7 milliards de personnes les plus pauvres.

Toujours plus. Thème récurrent de ces deux dernières années au sein des institutions multilatérales internationales, les inégalités se sont encore accrues l'an dernier. C'est l'un des constats du rapport publié lundi par  Oxfam , confédération internationale de 20 organisations. A la veille de l'ouverture du  Forum mondial de Davos placé sous le thème « créer un futur partagé dans un monde fracturé », l'ONG met une fois de plus les pieds dans le plat.

 
 

« Le nombre de milliardaires a connu l'année dernière sa plus forte hausse dans l'histoire. En douze mois, les richesses de ce groupe d'élite ont augmenté de 762 milliards de dollars. » Sur les dix dernières années, les salariés ordinaires ont vu leurs revenus augmenter de 2 % en moyenne par an. Dans le même temps, la fortune des milliardaires a augmenté de 12 % par an.

Chiffres révisés

En dépit des critiques qui lui ont été adressées l'an dernier sur la  méthodologie de calcul, Oxfam a procédé de même cette année. Elle se réfère à l'almanach de la richesse globale du Crédit Suisse qui assimile la richesse au patrimoine. Aux actifs d'une personne sont soustraites ses dettes, sans prendre en compte des sources de revenus comme le salaire.

 

Cette comptabilité « fait qu'un retraité allemand qui a contracté un prêt pour s'acheter, par exemple, une voiture, est plus pauvre que les fermiers du Burundi qui eux n'ont pas le luxe d'emprunter », avait souligné le quotidien allemand « Süddeutsche Zeitung ». Pour Oxfam, cette distorsion a peu d'impact sur la trajectoire globale de la concentration des richesses.

42 personnes détiennent aujourd'hui à elles seules autant que les 3,7 milliards de personnes les plus pauvres

Néanmoins, le Credit Suisse, par la collecte de nouvelles données fiscales sur la Chine et, dans une moindre mesure, sur l'Inde et la Russie, a affiné ses statistiques. D'après ses nouvelles données, 42 personnes détiennent aujourd'hui à elles seules autant que les 3,7 milliards de personnes les plus pauvres. Avec ses nouvelles données chinoises, indiennes et russes, Oxfam a recalculé que 61 personnes, et non plus 8, détenaient à elles seules autant de richesses que les 50 % les plus pauvres en 2016. La trajectoire est toujours vers plus de concentration puisqu'en 2009, c'étaient 380 personnes qui détenaient autant que les 50 % les plus pauvres.

image: https://www.lesechos.fr/medias/2018/01/22/2146950_les-inegalites-de-richesse-se-sont-encore-creusees-lan-passe-web-0301185208755.jpg

Les inégalités de richesse se sont encore creusées l\'an passé
Héritage, monopole et connivence

Derrière ces chiffres choc, l'ONG juge que les niveaux actuels d'inégalités extrêmes dépassent de loin ce que le talent, le travail et la prise de risque peuvent justifier. « Les grandes fortunes sont bien plus souvent le produit d'un héritage, d'un monopole ou de relations de connivence avec les gouvernements. »

Très souvent, poursuit le rapport, « des sommes toujours plus importantes sont reversées aux actionnaires fortunés, exerçant une pression constante sur la main-d'oeuvre ».

Evasion fiscale

La fortune des plus riches est souvent optimisée par des pratiques d'évasion fiscale.

 
 

Professeur assistant à l'Université de Californie à Berkeley depuis 2015, l'économiste français Gabriel Zucman a calculé, dans le cadre de ce rapport de l'ONG, que le montant de l'évasion fiscale des 1 % les plus riches atteint 200 milliards de dollars.

L'évasion fiscale des 1 % les plus riches atteint 200 milliards de dollars

Pour Manon Aubry, porte-parole d'Oxfam, « ces chiffres vertigineux démontrent que le boom des milliardaires n'est pas le signe d'une économie florissante, mais le symptôme d'un système économique défaillant qui enferme les plus vulnérables dans la pauvreté et porte aussi atteinte à la prospérité économique de toutes et tous, comme le reconnaissent de plus en plus d'institutions multilatérales comme le Fonds monétaire international (FMI) ou l'OCDE ».