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31 décembre 2015 4 31 /12 /décembre /2015 14:11
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31 décembre 2015 4 31 /12 /décembre /2015 14:07
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28 juillet 2015 2 28 /07 /juillet /2015 07:35

Ukraine/élections : "Nouveau coup de poignard dans le dos de la démocratie" (PCF)

Le PCF condamne avec force la décision prise par le ministre de la justice ukrainien Pavel Petrenko d’interdire au parti communiste d’Ukraine de prendre part aux processus électoraux.

Les communistes français apportent leur soutien à toutes les forces démocratiques du pays, dont le PC d’Ukraine, dans leur lutte contre ce nouveau coup de force porté à la démocratie par les autorités ukrainiennes. Ce décret témoigne de la faillite politique, économique et sociale dans laquelle se sont fourvoyés les oligarques de Kiev au détriment des intérêts de leur peuple et de l’unité du pays.

Comme l’a souligné le secrétaire général du PCU, Piotr Simonenko, ce décret, pris « dans l’urgence et la peur » et cette décision, visent à interdire « au peuple de pouvoir choisir ses représentants afin de lutter contre la politique d’appauvrissement », mais surtout, il a pour but d’ « interdire le droit de vote et d’empêcher de soutenir les idées de gauche ».

Le PCF soutient le PCU et son premier responsable dans sa détermination à participer aux prochaines élections locales en Ukraine prévues à l’automne prochain, d’autant que pour ce dernier le droit constitutionnel ne peut pas être modifié par un décret du ministre de la justice.

Rappelant que le PCU s’est toujours prononcé pour un règlement pacifique de la crise du Donbass, P. Simonenko a mis en garde contre la politique du pouvoir actuel qui ne peut conduire qu’ « à une dictature militaire » sans perspective.

Ce nouveau coup de poignard dans le dos de la démocratie est dans le droit fil des décisions d’avril dernier qui avait vu le Parlement voter des lois mettant « sur le même pied l’idéologie de la barbarie nazie et le communisme » et interdisant la production et l'utilisation publique de leur symboles, ce qui s’était traduit par une menace d’interdiction du PCU, alors que les collaborateurs du régime nazi étaient réhabilités.

Le PCF s’était alors élevé contre cette politique de « décommunisation » qui visait à « solder les comptes de la Seconde Guerre mondiale pour donner des gages aux partisans de l’adhésion de l’Ukraine à l’Otan et de la mise en coupe réglée des lois du FMI ». Et à « poursuivre, avec l’aide de mercenaires d’extrême droite, l’offensive dite anti-terroriste contre l’Est de l’Ukraine avec son cortège de victimes civiles et de destructions. ».

Cette décision-alors que les manœuvres militaires s’intensifient dans un pays en faillite- montrent l’incurie dont font preuve les autorités de Kiev pour oeuvrer à une application pleine et entière des accords de Minsk 2, qui respecte les droits et libertés fondamentaux de tous les ukrainiens. Le PCF appelle à une large mobilisation de la communauté internationale et de toutes les forces de progrès, pour que ceux-ci soient respectés.

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31 mai 2015 7 31 /05 /mai /2015 15:01

UE-Ukraine: la vérité se fraye un chemin

FRANCIS WURTZ, DÉPUTÉ HONORAIRE DU PARLEMENT EUROPÉEN

VENDREDI, 29 MAI, 2015

HUMANITÉ DIMANCHE

porochenko.jpg

AFP

La chronique de Francis Wurtz."La vérité se frayerait-elle son chemin à propos des responsabilités européennes dans la désastreuse crise ukrainienne ?"

Il y a un an et demi, nous étions souvent rangés du côté des « inconditionnels de Poutine » quand nous fustigions la politique de guerre froide menée par l’Union européenne ainsi que les illusions mensongères semées par certains de ses dirigeants en direction notamment du peuple ukrainien dans le cadre du « partenariat oriental »!

Rappelons la question que nous posions alors: « Quel objectif stratégique motive les dirigeants européens dans leur empressement à attirer l’Ukraine dans l’orbite de l’UE, alors même qu’ils n’envisagent nullement de consentir aux investissements lourds qui seraient nécessaires pour répondre aux attentes, et encore moins d’intégrer dans l’Union un État de 45 millions d’habitants au bord du défaut de paiement ? Réponse: créer une “ zone tampon ” face à Moscou et réduire sensiblement l’influence de la Russie dans l’ancien espace soviétique et, par là même, en Europe et sur la scène internationale. Quitte à diviser l’Ukraine, voire à la déstabiliser, et au risque de provoquer sur le continent des tensions d’une autre époque.

Cela ressemble fort à une grande manipulation. C’est tout le sens du “ partenariat oriental ” – lancé en 2009 sur l’insistance des dirigeants polonais – dont l’accord avec l’Ukraine devait être la pièce maîtresse. » (1)

Plusieurs milliers de morts plus tard, la stratégie aventureuse des dirigeants européens vient d’apparaître au grand jour à l’occasion du dernier sommet du « partenariat oriental » qui s’est tenu à Riga (Lettonie), les 21 et 22 mai, avec pas moins de 25 chefs d’État ou de gouvernement de l’UE, ainsi que les représentants des pays « partenaires » de l’Est, au premier rang desquels l’Ukraine.

« L’Union se retrouve sur la défensive », reconnaît « le Figaro », qui insiste sur le « coup d’arrêt » donné par les « 28 » aux « illusions » qu’ils avaient semées auprès des pays de l’ex-URSS (2). En clair, ils viennent de doucher leurs « partenaires » de l’Est en leur annonçant que, contrairement à un mirage qu’ils ont laissé se répandre pour amadouer ces peuples désorientés, il n’est pas question qu’ils adhèrent à l’UE.

« Le Monde », lui, convient aujourd’hui, à propos de la stratégie européenne à l’égard des Ukrainiens, que « la catastrophe a été de leur suggérer (sic) qu’ils devaient choisir entre l’Union et la Russie». Problème, selon notre fin analyste: l’idée du partenariat oriental « s’est fracassée sur deux pénibles réalités auxquelles ses auteurs, dans leur naïveté, n’avaient visiblement pas pensé (Re-sic!).

La première a été l’opposition immédiate de Moscou.(...) L’autre a tenu à la manière qu’a pu avoir l’UE de laisser entendre aux impétrants qu’ils étaient des candidats potentiels à l’adhésion». (3) Non seulement ces fausses promesses viennent-elles d’être très tardivement – et brutalement – démenties, notamment par Angela Merkel à Riga, mais les Ukrainiens découvrent qu ’« avec une récession qui frôle les 18 %, l’économie ukrainienne est dans un tel état de délabrement qu’elle fait plutôt figure de repoussoir à l’égard de l’UE », selon les mots d’un observateur bien au fait de la « vision » orientale des dirigeants européens (4). Même la libéralisation des visas d’entrée dans l’Union, qui paraissait acquise à l’Ukraine comme à la Géorgie à partir de 2016, restera finalement lettre morte. Un tout autre « partenariat » avec nos voisins de l’Est est à construire de toute urgence! Et d’abord avec l’Ukraine, vue comme une passerelle entre les deux grands acteurs du continent et non comme l’otage d’une bataille d’influences entre « l’Occident » et la Russie.

(*) Député honoraire du Parlement européen.

(1) Dans l ’« HD » du 23 décembre 2013.

(2) « Le Figaro » du 22 mai.

(3) L’éditorial du « Monde » du 24 mai.

(4) Pierre Avril dans « le Figaro » du 22 mai

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14 février 2015 6 14 /02 /février /2015 22:55

Ukraine, le coup d’état...

Dix-huit des meilleurs analystes nord-américains montrent ici que le 22 février 2014, place Maïdan à Kiev, après des mois de déstabilisation politique financée par les États-Unis et l’Union européenne, des groupes soutenus par l’Occident ont confisqué par un coup d’état flagrant le pouvoir d’un président démocratiquement élu. Des extrémistes néo-nazis, à l’avant-garde des manifestations, ont obtenu des ministères et d’autres postes importants dans le nouveau gouvernement non-élu. à cause de la couverture médiatique pro-Maïdan fortement influencée, sinon contrôlée, par les gouvernements occidentaux, les Européens ont généralement vécu ce changement de régime avec apathie. Ils semblent ne pas comprendre qu’il y a eu un coup d’état fasciste au coeur de l’Europe... et un coup d’état soutenu par leurs propres dirigeants. Comme en Libye, Syrie, Yougoslavie, Irak, etc., on a assisté en Ukraine au plus cruel sadisme masqué par une gigantesque puissance de feu médiatique occidentale : assassinats à Maïdan par des snipers d’élite néo-nazis maquillés en police d’État ; immolations vivantes au lance-flammes de fédéralistes pacifiques par des groupes néo-nazis téléguidés par la junte et maquillées en incendie à Odessa devant la police passive et complice ; officines déstabilisatrices de la CIA financées à hauteur de 5 milliards de dollars depuis 1991 et camouflées en ONG humanitaires « pro-démocratie », etc.

Cependant, du développement même de cet affrontement mûrit une « vision politique » : dans le Donbass, le peuple qui pour survivre secoue le joug du libéral-fascisme, prend conscience du fait que l’alternative « ou bien mourir pour un oligarque russe ou bien mourir pour un oligarque ukrainien » n’est pas pertinente et se dépasse nécessairement en : s’approprier collectivement les biens productifs usurpés par les oligarques de toute obédience. Puisse alors ce « retour du réel et du rationnel » refluer comme un boomerang de Donetsk vers l’ouest et montrer aux pyromanes US/UE que désormais le roi est nu.

Ukraine, le coup d’Etat

STEPHEN LENDMAN (dir)

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13 février 2015 5 13 /02 /février /2015 21:29

Photos truquées de militaires russes en Ukraine: un sénateur US furieux

© AP Photo/ Sue Ogrocki

14:31 13.02.2015(mis à jour 20:05 13.02.2015)

Le sénateur républicain de l'Oklahoma James Inhofe a laissé éclater sa colère en apprenant que les photos "attestant" l'implication de troupes russes dans le conflit ukrainien, qu'il avait reçues puis fait publier dans les médias, étaient des faux.

© SPUTNIK. VALERY MELNIKOV

Donbass: aucune preuve de la présence militaire russe (diplomate)

Le sénateur a affirmé s’être vu remettre les photos en question par des députés ukrainiens en décembre. Après une vérification plutôt sommaire, ces "preuves à charge" ont été publiées par le journal en ligne conservateur Washington Free Beacon. Peu après, les lecteurs ont prouvé que ces photos avaient été faites dans d'autres "points chauds" plusieurs années auparavant.

Tout en reconnaissant son erreur, reprise par les médias, le sénateur Inhofe, ferme partisan des livraisons d'armes létales à l'Ukraine, prétend toutefois qu'il y a une "multitude d'autres preuves attestant que la Russie a fait des irruptions sur le territoire ukrainien à bord de chars T-72".



Lire la suite: http://fr.sputniknews.com/international/20150213/1014667494.html#ixzz3RevCseAa

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12 février 2015 4 12 /02 /février /2015 22:01

Moscou entre jeux d’influence et démonstration de force

Le retour de la Russie sur la scène diplomatique ne va pas sans grands écarts. Pressée par le basculement de l’Ukraine vers l’orbite occidentale, elle improvise une brusque reconquête de la Crimée. L’affirmation balourde d’intérêts légitimes révèle les limites de son pouvoir d’attraction, pourtant soigneusement entretenu depuis la chute de l’URSS au travers de coopérations à géométrie variable.

par Jean Radvanyi, mai 2014

En matière de politique étrangère russe, ce début d’année 2014 aura été marqué par deux événements capitaux. D’abord, les Jeux olympiques d’hiver de Sotchi, dont l’organisation a donné lieu dans les médias occidentaux à une vaste campagne critique du régime de M. Vladimir Poutine ; puis, alors que les Jeux s’achevaient, la crise ukrainienne. D’une certaine façon, ces deux moments forts représentent les deux facettes de la nouvelle politique étrangère du Kremlin : d’une part sa tentative de s’initier au soft power, la « puissance douce », et d’autre part le recours brutal et plus traditionnel aux rapports de forces.

Les Jeux de Sotchi visaient à montrer au monde que la Russie était capable d’organiser un événement planétaire majeur en utilisant les moyens les plus modernes, que ce soit pour la tenue des épreuves ou pour assurer la sécurité des participants dans une région — le Caucase — particulièrement sensible. Ils devaient permettre d’améliorer son image dans l’opinion publique internationale, élément essentiel du rétablissement de Moscou comme acteur majeur d’un monde multipolaire (1). Leur parfaite réussite, en dépit des échos déformés qui en sont parvenus au public occidental, n’a cependant pas entraîné les effets escomptés. Les grands médias n’ont eu aucun mal à susciter l’hostilité de l’opinion en mettant l’accent sur les incertitudes liées à la préparation des Jeux, et surtout en détaillant les lois répressives votées depuis le retour au pouvoir de M. Poutine : sur le contrôle des organisations non gouvernementales (ONG), sur le contrôle d’Internet, sur la « propagande homosexuelle »… Quelques concessions tardives — libération des membres du groupe des Pussy Riot et de l’oligarque Mikhaïl Khodorkovsky, promesse de ne pas harceler les homosexuels durant Sotchi… — n’y ont rien changé.

Tentatives de séduction ratées

Mais les Jeux resteront surtout marqués par leur coïncidence avec les événements sanglants de Maïdan, la place de l’Indépendance de Kiev, bientôt suivis par l’annexion militaire de la Crimée et par son intégration à la Fédération russe. La réaction totalement inadaptée du président ukrainien Viktor Ianoukovitch puis la série de décisions prises tant à Moscou qu’à Kiev et à Bruxelles ont fait basculer le monde dans une épreuve de force majeure, et déclenché une campagne russophobe sans précédent depuis des décennies (2). Avant même l’application de sanctions pour l’annexion de la Crimée, l’image du pays avait subi une détérioration que ne viendra compenser aucune mobilisation patriotique intérieure.

L’organisation des Jeux olympiques relevait de la mise en œuvre tardive, dans la panoplie des outils de la politique étrangère russe, de ce qu’on appelle communément le soft power — le pouvoir d’influence non coercitif, à la fois idéologique, culturel, scientifique. Dans une revue, en 2012, M. Poutine s’était lui-même exprimé sur ces techniques de « puissance douce », pour déplorer un retard dans ce domaine où excellent les grands pays occidentaux. La maîtrise du discours sur les événements, de leur interprétation, est en effet devenue aussi importante, dans l’arène internationale, que les faits eux-mêmes. Au passage, le président russe critiquait vivement la façon dont plusieurs pays, et en particulier les Etats-Unis, usaient de ces moyens pour faire pression sur d’autres Etats et pour leur dicter leurs choix. Il estimait que « l’activité de pseudo-ONG et d’autres structures cherchant, avec des aides extérieures, à déstabiliser tel ou tel Etat » était« inadmissible » (3).

En 2003 et 2004, les « révolutions colorées » en Géorgie et en Ukraine ont suscité un tournant dans la politique russe, tant sur le plan extérieur qu’intérieur, avec le vote de lois de plus en plus restrictives sur la liberté d’organisation et d’expression. C’est à cette période que la Russie commence à se préoccuper d’améliorer son image. Elle relance son réseau culturel et linguistique, avec le développement des Fondations Russkiy Mir (« Monde russe »), et tente de se gagner l’appui de la diaspora (4). Sa maîtrise de ces outils demeure cependant très imparfaite, et ses dirigeants continuent de recourir à des moyens plus traditionnels, en particulier les pressions économiques et militaires. Bien plus qu’un savoir-faire balbutiant en matière de communication, Fiodor Loukianov, rédacteur en chef de la revue Russia in Global Affairs, pointe du doigt la principale faiblesse de son pays : « Pour l’heure, la “puissance douce” manque de cette substance qui rendrait attractif le modèle de développement prôné par Moscou. » Alors que l’URSS pouvait s’appuyer sur un ferment idéologique et sur une offre stratégique alternative, « la Russie ne parvient pas à produire autre chose qu’un discours traditionaliste et conservateur, clairement opposé au progrès (5) ». D’ailleurs, précise Loukianov, « la Russie n’est pas l’Union soviétique. Elle ne prétend plus à une domination mondiale. Moscou définit seulement l’espace qu’il considère comme étant pour lui d’un intérêt vital, et dont l’Ukraine fait partie. Là, il entend agir sans faire de compromis (6). »

Dans ses rapports avec les ex-républiques soviétiques tentées de se rapprocher de l’Union européenne et de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN), la Russie n’a cessé de recourir à des sanctions économiques et douanières, comme lors des divers épisodes de la « guerre du gaz » avec l’Ukraine. Le site ukrainien Newsplot a publié en 2013 une carte détaillant quinze mesures de « guerre alimentaire » prises par Moscou contre ses voisins occidentaux entre 2005 et 2013 (7) : blocus des vins géorgiens et moldaves, des produits laitiers biélorusses, de la viande polonaise, du chocolat ukrainien, etc.

Et, depuis quelques années, la Russie n’hésite plus à résoudre certains conflits par les armes. En août 2008, c’est le président géorgien lui-même qui lui en a fourni l’occasion en bombardant la ville de Tskhinvali, en Ossétie du Sud, et la caserne de militaires russes qui s’y trouvait. La riposte a été vive. Les forces russes ont momentanément pris le contrôle de tout l’ouest de la Géorgie, et Moscou a reconnu l’indépendance des deux régions sécessionnistes de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud, rompant ainsi l’engagement pris en 1991 de respecter l’intégrité territoriale de la Communauté des Etats indépendants (CEI), qui regroupe d’anciennes républiques soviétiques. En mars 2014, à la suite des événements de Kiev, la Russie a pris l’initiative de placer la Crimée sous son contrôle militaire, avant de procéder à son annexion au terme d’un référendum organisé à la hâte.

Dédain de l’Union européenne

Le Kremlin ne cache nullement les raisons de ce nouveau recours à la force. Et le défi qu’il lance ainsi au monde dépasse de loin le problème ukrainien. De fait, il réclame une remise à plat de l’ensemble des règles régissant la sécurité internationale. Sa position, exprimée clairement par M. Poutine lors de la quarante-troisième conférence sur la sécurité à Munich, le 10 février 2007, tient en quelques points. Moscou n’accepte plus le double langage de certains Etats occidentaux, qui présentent des règles internationales comme immuables tout en les enfreignant chaque fois que cela les arrange.

Profitant de l’affaiblissement de la Russie après l’éclatement de l’URSS et la dissolution du pacte de Varsovie, certains dirigeants américains ont pensé pouvoir établir la domination d’une superpuissance unique : la leur. Mais, depuis, le monde a évolué. Il convient donc de renégocier les bases de la sécurité en y associant pleinement les nouveaux pôles de puissance, en particulier les Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud). Enfin, il faut admettre que la Russie a elle-même des intérêts stratégiques légitimes et qu’elle peut les défendre, comme l’ont toujours fait les Etats-Unis et les principaux Etats occidentaux dans leurs diverses zones d’influence.

En proposant en 2008 à l’Ukraine et à la Géorgie d’entrer dans l’OTAN, ou en négociant avec Kiev, fin 2013, un accord d’association avec l’Union européenne, les dirigeants américains ou européens contribuaient au refoulement des intérêts de la Russie sur ses propres frontières, et ils en étaient parfaitement conscients. Une partie des dirigeants américains, rejoints par ceux d’Etats européens comme la Pologne ou la Suède, n’ont jamais abandonné la stratégie énoncée en son temps par Zbigniew Brzezinski (8).

Pour M. Sergueï Karaganov, l’un des conseillers de politique extérieure du président Poutine, face au risque de voir l’Ukraine entrer dans l’OTAN, avec la perspective que l’Alliance atlantique récupère le port de Sébastopol, « la Russie devait défendre ses intérêts d’une main de fer (9) ». En annexant la Crimée et en massant des troupes près des frontières orientales de l’Ukraine, elle signifie aux dirigeants occidentaux qu’elle est sortie de sa période d’affaiblissement et qu’elle défendra ses intérêts stratégiques, quoi qu’il lui en coûte en termes de relations diplomatiques ou commerciales. Mais en a-t-elle réellement les moyens ?

Jusqu’à une période récente, elle était surtout tournée vers l’Europe, partenaire traditionnel majeur tant de ses échanges culturels et humains que de ses relations économiques. En 2013, l’Union européenne était encore le premier client et fournisseur de son commerce extérieur. Toutefois, partageant avec la Turquie le privilège d’être un Etat à cheval sur les continents européen et asiatique, elle montre depuis longtemps son intérêt pour une complémentarité entre ses deux façades, l’une continentale, à l’ouest, et l’autre maritime, dans la zone Pacifique.

Ce dessein n’est pas nouveau : il avait percé dès avant la fin de l’URSS, en 1986, dans le discours de M. Mikhaïl Gorbatchev à Vladivostok. Boris Eltsine puis M. Poutine ont poursuivi les efforts pour dynamiser cette relation asiatique. Et plusieurs facteurs concourent aujourd’hui à une relance de cette stratégie de rééquilibrage.

Le plus évident est l’impressionnant dynamisme de la zone Pacifique. La Russie espère voir cet essor favoriser, grâce à des coopérations et à des investissements, le redémarrage de son économie. C’est pour cette raison que M. Poutine a organisé en 2012 à Vladivostok le forum de la Coopération économique Asie-Pacifique (Asia-Pacific Economic Cooperation, APEC), dont son pays est membre depuis 1998. Ce regain d’intérêt traduit aussi une prise de conscience de la crise aiguë que traverse l’Extrême-Orient russe : sa population ne cesse de diminuer depuis la fin des années 1980 (l’ensemble de cette vaste région a perdu plus de 20 % de ses habitants), au risque de laisser cette façade stratégique démunie face à des régions chinoises très dynamiques.

Autre élément déterminant de la rhétorique du grand rééquilibrage : la détérioration des relations avec les institutions européennes, qui, tout en s’élargissant à l’est, imposent leurs propres règles comme cadre obligé des relations avec les Russes, en particulier dans le domaine-clé de l’énergie. En plus des programmes successifs proposés à certains membres de la CEI dans le cadre de la politique européenne de voisinage, dès 2004, puis du partenariat oriental, lancé en 2009, l’Union s’est efforcée de diminuer sa dépendance pétrolière et gazière envers la Russie en diversifiant ses approvisionnements. Moscou s’est adapté à ces évolutions en réorganisant ses circuits d’exportation vers l’ouest (construction des gazoducs North Stream et Blue Stream, projet South Stream sous la mer Noire), mais a aussi transféré vers l’Asie une partie de ses échanges. La Chine est ainsi devenue en 2011 son premier partenaire commercial.

C’est là un élément essentiel de la crise actuelle : profondément divisée quant à la conduite à tenir face à son grand voisin oriental, l’Union européenne n’a jamais accepté de discuter réellement de cette relation pourtant fondamentale. Elle n’a pas envisagé une stratégie globale de développement et de sécurité pour une « grande Europe » incluant la Russie. Critiquant certaines formules proposées par Moscou, Bruxelles a préféré s’en tenir à une politique de mise à distance. Parallèlement, l’attribution d’un rôle nouveau à l’OTAN, de plus en plus intégrée à la stratégie américaine, a renforcé la méfiance du Kremlin. Cette attitude, manifestée par l’Europe au moment où ses institutions et son économie entraient dans une crise profonde, a conforté la position de ceux qui prônent un rapprochement accéléré avec les nouvelles puissances asiatiques et la mise en veilleuse des relations avec une Union affaiblie, incapable de tracer une voie distincte de celle de Washington.

Nationalisme à double tranchant

Toutefois, ce basculement, souvent brandi comme un épouvantail et présenté comme un moyen de faire pression sur les Européens, pose quelques difficultés, tant techniques qu’organisationnelles. Il faut d’abord surmonter un grave déficit d’infrastructures en matière d’énergie, de transports ou de logement dans ses régions orientales. Moscou semble en avoir enfin pris la mesure, puisque a été créé un ministère du développement de l’Extrême-Orient ; mais beaucoup d’experts doutent de l’efficacité de cette mesure : les besoins financiers sont énormes, et les dépenses extravagantes du sommet de Vladivostok, en 2012, ne laissent pas présager un usage efficace des investissements. Certes, on voit surgir le début d’un réseau de transport d’énergie vers le Pacifique (projet d’oléoduc Sibérie orientale - océan Pacifique, en anglais Eastern Siberia - Pacific Ocean Oil Pipeline, ESPO), mais la Russie accuse un certain retard dans les techniques de gaz liquéfié. Elle ne pourra pas avant longtemps songer à reporter vers l’Asie le volume d’hydrocarbures qu’elle livre à l’Europe.

Si la Chine se dit prête à fournir une partie des capitaux pour réduire ces retards, ses achats de matières premières ne peuvent qu’enfoncer davantage la Russie dans son rôle de simple fournisseur de produits primaires, et différer encore sa modernisation. Par ailleurs, l’extrême centralisation des pratiques fédérales tend à bloquer les initiatives locales. Nombre de régions revendiquent de plus en plus ouvertement une autonomie de décision, seule à même, selon eux, d’assurer un vrai redémarrage économique. Or, de toute évidence, le système poutinien ne s’engage pas dans cette voie (10).

Autre difficulté : l’incapacité de Moscou à impulser des relations positives entre les Etats de l’espace postsoviétique. Alors que la CEI n’est jamais devenue ce marché commun oriental sous domination russe dont rêvait Eltsine en 1991, les tentatives du Kremlin pour consolider un noyau d’Etats qui lui soient fidèles ne peuvent que surprendre par leur caractère hésitant.

Ont été créés, dans la plus grande des confusions terminologiques et organisationnelles, pas moins de quatre ensembles économiques emboîtés : Union douanière, Espace économique unique, Communauté économique eurasiatique (en anglais Eurasec) et zone de libre-échange au sein de la CEI, sans compter l’Union économique eurasiatique, proposée dès 1994 par le président kazakh Noursoultan Nazarbaïev, qui devrait être établie en 2015. Toutes ces organisations s’articulent autour d’un noyau commun constitué de la Russie, de la Biélorussie et du Kazakhstan. S’y adjoignent, selon les cas, trois ou quatre Etats d’Asie centrale (l’Ouzbékistan n’est au mieux qu’observateur), et parfois, par exemple dans la zone de libre-échange, la Moldavie et l’Ukraine.

Mais aucune de ces structures ne fonctionne réellement, en grande partie à cause des exigences contradictoires de Moscou, qui tient surtout à préserver sa liberté d’action et son contrôle sur des Etats qu’il considère comme relevant de sa sphère d’influence. Cette attitude a pour principal effet que chacun de ces pays, afin de desserrer l’étau des pressions russes, multiplie les relations avec des acteurs tiers influents : Etats-Unis, Europe, Chine, Iran... Les Etats d’Asie centrale semblent recourir de plus en plus aux partenariats avec la Chine comme moyen de diversifier leurs échanges, bien au-delà de l’Organisation de coopération de Shanghaï (OCS), où ils se retrouvent avec leurs deux puissants voisins. Une chose paraît claire : ce millefeuille organisationnel traduit la difficulté de la Russie à définir un nouvel équilibre dans ses relations avec ses voisins désormais indépendants. Et la crise ukrainienne pourrait bien lui compliquer encore la tâche.

M. Poutine a cru bon d’accompagner l’annexion de la Crimée d’une mobilisation sans précédent autour de la défense des compatriotes russes séparés de la mère patrie lors de l’éclatement de l’URSS. Avec ses attaques contre quelques opposants, qualifiés, comme aux pires moments de l’époque soviétique, d’« agents de l’étranger », la campagne médiatique organisée dans tout le pays rappelle de bien mauvais souvenirs. Sur le moment, elle a permis de réunir l’immense majorité de la population autour de son président, qui semble ainsi prendre sa revanche sur le mouvement de l’hiver 2011-2012 (11). Mais les effets à plus long terme pourraient être redoutables, tant à l’intérieur du pays que sur ses marges.

Plusieurs régions de la Russie (le Caucase, la Volga, mais aussi la Sibérie) sont peuplées de minorités actives et traversées par des mouvements antagonistes, de l’islamisme radical à l’autonomisme régional, très critique de la dérive centralisatrice du régime. Nul ne peut prédire comment s’y traduira ce sursaut de nationalisme. Le pouvoir autoritaire actuel semble à l’abri de ces forces centrifuges ; mais qu’en sera-t-il en cas d’affaiblissement ultérieur, que celui-ci provienne d’une simple transition politique ou d’une nouvelle crise économique ?

Même les alliés s’inquiètent

Cependant, c’est sans doute à l’extérieur que l’annexion de la Crimée pourrait avoir les conséquences les plus déstabilisatrices. L’Estonie et la Lettonie comptent encore dans leur population près de 25 % de Russes (souvent apatrides). Le référendum organisé en Crimée y a été perçu comme une menace, de même qu’en Moldavie — où sévit le conflit de la Transnistrie — et au Kazakhstan, dont tout le nord demeure largement russophone. Depuis 1991, M. Nazarbaïev, le président kazakh, s’est toujours comporté comme un allié indéfectible de Moscou. Ses successeurs se montreront-ils aussi dociles ? Après la sortie de la Géorgie de la CEI, en 2008, puis celle de l’Ukraine, annoncée dès le 19 mars 2014, un simple écart critique d’Astana marquerait la faillite de plus de vingt années de tentatives des Russes pour réaménager à leur guise ce qu’ils appelaient au début des années 1990 leur « étranger proche ». Certes, l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC) se maintient (12) ; mais cette structure militaire, aujourd’hui réduite, poursuit des objectifs limités.

On a pu voir le premier signe d’un isolement diplomatique de Moscou le 27 mars dernier, lors du vote à l’Organisation des Nations unies de la résolution condamnant l’annexion de la Crimée : parmi les Etats « amis », seules l’Arménie et la Biélorussie ont voté contre. La Chine s’est abstenue, de même que le Kazakhstan. Le Kirghizstan et le Tadjikistan n’ont même pas pris part au vote (13).

Au-delà des cris de victoire des manifestants russes saluant le retour de la Crimée au sein de la mère patrie, l’annexion pourrait bien se révéler une victoire à la Pyrrhus.

Jean Radvanyi

Professeur à l’Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco), codirecteur du Centre de recherches Europe-Eurasie (CREE). Auteur de Retour d’une autre Russie, Le Bord de l’eau, Lormont, 2013.

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12 février 2015 4 12 /02 /février /2015 10:22
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7 février 2015 6 07 /02 /février /2015 09:37

Le blog de Segesta3756

THÉMATIQUES DU BLOG

Crise Ukraine . Donbass . OTAN .crise ukrainienne . fascisme . guerre civile Donbass . guerre civile Ukraine .nazisme . nettoyage ethnique Donbass .vol MH17

La question ukrainienne, la Russie et le droit international - par Robert Charvin

05 FÉVRIER 2015 | PAR SEGESTA3756

Robert Charvin est Professeur Émérite de l'Université de Nice-Sophia-Antipolis et Doyen Honoraire de la Faculté de Droit et de Science Politique de Nice. Très investi dans le mouvement alter-mondialiste il a animé divers cercles de soutien international, tant à Nice, qu'au niveau national et international. Il a également été conseiller général des Alpes-Maritimes. Il est actuellement membre du Conseil exécutif de l'association Nord-Sud XXI. Il est auteur d'ouvrages universitaires et littéraires. (source wikipedia, v. bibliographie). Parmi ses textes disponibles sur le web, on peut trouver "La guerre ango-américaine contre l'Iraq et le droit international - Apocalypse Now" de 2003, ainsi que "L'intervention en Libye et la violation de la légalité internationale : un retour à la pseudo "morale internationale" du 19e siècle" de 2012.

Toujours au sujet de la crise ukrainienne, il a publié au mois de mars de l'année dernière un important essai intitulé La question ukrainienne : une étape dans le processus de déconstruction du droit international par les puissances occidentales

Robert Charvin

3.02.15 - Les médias occidentaux ont profondément malmené l'information au sujet de la crise ukrainienne, présentée non comme essentiellement l'implosion de l’État et de la société ukrainienne, mais comme un affrontement entre Kiev, l'Union Européenne, les États-Unis d'une part et la Russie d'autre part. Ils semblent s'être interdit d'envisager une solution négociée et diplomatique, et condamnent sans nuance la Russie de V. Poutine, en retrouvant les accents de la « guerre froide » qui avait disparu à l'époque de B. Eltsine. Les mêmes médias se sont peu attardés sur la nature ambiguë de la « révolution » très peu « démocratique » de Kiev, reprenant à leur compte les accusations portées contre les rebelles de l'Est, qualifiés de « terroristes », après avoir accusé la Russie « d'expansionnisme ».

Dans les faits et très vite, les États-Unis et l’Union Européenne ont procédé à une escalade antirusse sous couvert d’une « indignation » à l’encontre d’une « ingérence » russe attentatoire à la souveraineté de l’Ukraine. Ils avaient pourtant exercé de fortes pressions depuis des années (particulièrement en 2004 lors de la « révolution orange », puis en 2008, lors du Sommet de Bucarest avec une invitation à entrer dans l’OTAN, etc.) et lors des manifestations de Maïdan (1).



Les médias occidentaux n’ont jamais pris en compte le fait que le gouvernement contesté (quelle que soit sa mauvaise « qualité ») était légalement en place à la suite des élections de 2010 jugées régulières par les observateurs internationaux et que la veille de son renversement par un coup d’état, un accord avait été conclu entre le président ukrainien, l’opposition et les ministres des Affaires étrangères de France, d’Allemagne et de Pologne et soutenu par la Russie (étaient décidés des élections anticipées, le retour à la Constitution de 2004 et la formation d’un gouvernement d’union nationale).


On peut s’interroger sur « l’innovation » historique que représente l’appui donné par le monde occidental aux « révolutions » de certains pays et donc sur la nature des « révolutions » ainsi soutenues.



Prenant visiblement leurs informations auprès de l’OTAN, les grands médias occidentaux ont appuyé immédiatement le gouvernement insurrectionnel ukrainien qualifié de « démocratique », en dépit de sa composition faisant une place importante au parti d’extrême droite Svoboda et malgré ses premières mesures hostiles aux russophones de Crimée et de l’Est.



Le « soft power » euro-américain qui s’est ainsi manifesté une fois de plus en Ukraine, comme cela avait déjà été le cas pour les ex-républiques soviétiques, l’avait emporté sans aucune prise en compte de la légalité, (du droit constitutionnel comme du droit international) et de la sociologie du peuple ukrainien.



En effet, nul ne remet en cause explicitement le principe de l’égale souveraineté des États ni celui de la non-ingérence dans les affaires intérieures de chaque État. Or, les États occidentaux pratiquent activement, lorsqu’ils l’estiment utile, l’ingérence sous toutes ses formes et sous les prétextes les plus divers : avec le recours à la force armée contre l’Irak, la Libye ou la Côte d’Ivoire, par exemple, avec les moyens politiques et financiers donnés à certaines forces (notamment les Frères Musulmans) lors des « printemps arabes » et aux pro-occidentaux lors des différentes « révolutions » dans les ex-Républiques soviétiques.



Le processus interventionniste est plus ou moins standard : à l’occasion d’une crise interne, les forces occidentales instrumentalisent le conflit et l’internationalisent afin d’en récupérer le bénéfice économique et stratégique. L’objectif est d’ouvrir le marché aux grandes firmes privées (par exemple, dans le domaine énergétique) et d’occuper de nouvelles positions stratégiques au profit de l’OTAN.



Ils se dispensent au contraire d’intervenir et vont jusqu’à bloquer toute interposition, par exemple celle de l’ONU, lorsqu’il s’agit d’assister un allié, comme Israël ou de s’opposer à une révolution réellement populaire comme au Bahreïn en s’associant à l’Arabie Saoudite.



La crise ukrainienne s’inscrit dans le cadre de cette stratégie globale : l’isoler des autres crises et en faire un phénomène sui generis, comme le font les propagandistes occidentaux, ne correspond pas à la réalité. En faire une manifestation d’un impérialisme russe de retour et accuser l’État russe d’obsession paranoïaque, alors que c’est l’OTAN qui tente en permanence d’élargir sa zone d’intervention en intégrant dans son orbite successivement des États aux frontières de la Russie (2), c’est procéder à une inversion des faits. Dans la crise ukrainienne, c’est l’Union Européenne et les États-Unis qui sont à l’offensive alors que la Russie n’est que réactive.



La part du droit n’est, à l’évidence, que minime dans la crise ukrainienne. Mais il est paradoxal de prétendre que les États occidentaux, en la circonstance, sont les défenseurs d’une légalité internationale qu’ils invoquent par ailleurs si rarement, l’instrumentalisant parfois ou l’ignorant souvent.


L’effondrement de l’URSS a révélé clairement ces pratiques occidentales. Les États-Unis et l’Union Européenne ont eu, durant les années 1990, en raison de l’extrême faiblesse de la Russie de B. Eltsine, l’illusion de pouvoir imposer une « gouvernance globale » à leur profit. Après avoir dû supporter la bipolarité durant la « guerre froide » et les dispositions « perturbatrices » de la Charte des Nations Unies (égalité souveraine des États, non-ingérence, etc.), les pouvoirs publics et privés d’Occident ont cru pouvoir bénéficier d’un monde « unipolaire », en mesure de refuser la solution multilatérales du droit international, particulièrement dans le domaine de la résolution des conflits et du droit économique.



A partir des années 1990, nouvelle phase d’hégémonie occidentale, jusqu’à la renaissance de la Russie et la montée en puissance de la Chine, les États occidentaux se sont attachés à déconstruire le droit international, à créer des espaces marchands hors de toute souveraineté étatique, à tenter de transformer le système normatif légal en une vague « morale » internationale proche de celle du XIX° siècle (par exemple, en restaurant la vieille conception théologique de la « guerre juste »), en distinguant parmi les États, pourtant tous membres des Nations Unies, ceux qui étaient « éligibles » au droit international et ceux qui ne l’étaient pas (par insuffisance « démocratique »), rejetant le principe fondamental de l’universalisme de la Charte. Le tout accompagné de la perversion de diverses notions du droit international (« l’humanitarisme », « le sécuritaire », les droits de l’homme, etc.). C’est l’antiterrorisme qui a servi de « clé de déverrouillage » du droit international « gênant », mais c’est la volonté d’une « gouvernance globale » de l’économie mondiale qui est l’objectif poursuivi.



En effet, le déclin relatif du pouvoir économique et financier des États-Unis à l’échelle mondiale, conjugué à leur messianisme traditionnel et à leur complexe de supériorité, encouragé par l’alignement fréquent des États européens (voir, par exemple les négociations du Traité transatlantique) est un facteur essentiel du recours direct ou indirect à la violence afin de sauvegarder une position encore hégémonique.



Avec l’appui de certains États tels que la Pologne ou les Républiques baltes (dont certaines orientations sont souvent néofascistes, renouant avec leur histoire pré-soviétique), l’hostilité antirusse est réapparue face à une Russie reprenant progressivement sa place de grande puissance européenne. Dans le sillage de l’histoire traditionnelle de l’Europe, la Russie n’est tolérée que lorsqu’elle est affaiblie. La reconstruction de l’État russe avec la présidence Poutine est assimilée à une « menace » contre l’Occident qui considère que les avancées de l’OTAN dans l’environnement russe immédiat sont la « bonne » réplique, ainsi qu’un système de sanctions visant l’économie russe, en lieu et place de la négociation et de la conciliation.



S’il est difficile de qualifier cette nouvelle phase des relations Est-Ouest, ouverte avec la crise ukrainienne, de nouvelle « guerre froide », car il ne s’agit plus d’un affrontement antagonique entre deux modes de production, on peut qualifier cette crise de « guerre tiède », par procuration. Le gouvernement de Kiev, assisté par l’Union Européenne et les États-Unis, se refuse depuis son installation à toute négociation réelle avec les populations de l’Est de l’Ukraine : l’accord du 17 avril 2014 vite « oublié » visait le désarmement des forces en présence (il y a aujourd’hui plus de 5.000 victimes de l’affrontement), l’accord de cessez-le-feu de Minsk du 5 septembre 2014 lui-même n’a pas été pris en compte, tout comme le Mémorandum du 20 septembre envisageant le retrait des combattants étrangers. Le plan présenté par le Président Poutine, lors de son voyage en Mongolie, n’a pas été examiné : il s’agissait pourtant de préparer un accord politique entre Kiev et les insurgés de l’Est, comprenant un arrêt des combats, le départ de l’armée des villes, l’arrivée d’une force onusienne d’interposition et la création de couloirs humanitaires.



Pour Kiev, comme pour les Occidentaux, il n’est plus question de faire jouer « la responsabilité de protéger » les civils, alors qu’ils considèrent cette responsabilité comme un principe coutumier du droit international (il a joué à Benghazi contre l’État libyen et en Côte d’Ivoire, pour éliminer le régime Gbagbo) (3).



La seule réponse des États-Unis et de l’Union Européenne est l’alourdissement des sanctions économiques et politiques contre la Russie, tandis que celle de Kiev est de refuser tout dialogue sur une solution politique (par exemple, fédérale) avec les insurgés de l’Est et de bombarder les populations civiles (4).



Les positions de la Fédération de Russie vis-à-vis du droit international sont duales. La Russie reprend à son compte le droit positif en essayant de lui donner une effectivité que les États-Unis, au contraire, remettent en cause. Elle réplique parfois en se fondant sur des positions antérieurement prises par les Etats occidentaux eux-mêmes.



Elle ne participe pas à la déconstruction du droit international parce qu’elle n’y a aucun intérêt : elle a au contraire besoin par exemple du respect de la souveraineté nationale de chaque État, consacrée par la Charte des Nations Unies, dans la phase de réorganisation qu’elle traverse et du rapprochement avec la Chine et l’Asie. Elle est de plus en plus hostile aux pratiques spéculatives qu’autorise le droit international des affaires, jouant notamment sur le prix des matières premières, le pétrole en particulier. A l’inverse des pouvoirs privés occidentaux, la Russie a besoin de la paix et d’un ordre économique international régulé.



Elle récuse l’idéologie du « cas par cas », développée par les États-Unis, source d’une insécurité juridique généralisée et des interprétations d’une extrême « souplesse » et souvent de mauvaise foi (5) des puissances occidentales, réticentes à l’égard du multilatéralisme.



Malgré l’embargo qu’elle subit, la Russie entend ni rompre avec les Puissances occidentales ni tenter d’exercer sa propre hégémonie : cette ligne est, par exemple, illustrée par sa participation active au projet ITER, édifiant un réacteur thermonucléaire expérimental (installé à Cadarache) révolutionnant la fission nucléaire, porteur d’un grand avenir pour tous.



En bref, à l’agressivité de Kiev, des États-Unis et de l’Union Européenne, la réponse russe est politique et diplomatique. La Russie sait qu’il n’y a pas d’avenir pour l’Europe sans la Russie qui, pour sa part, souhaite encore ne pas se priver de l’Europe. Les puissances occidentales et leurs alliés d’Europe de l’Est sont hostiles à cette multipolarité car elle implique « plus de Chine et plus de Russie » (6). La Russie est au contraire favorable à un monde multipolaire qui est la meilleure garantie du maintien de la paix et d’une plus grande effectivité du droit international.



L’intégration de la Crimée dans la Fédération de Russie ne constitue pas une violation de la légalité internationale si l’on se réfère à la fois à la situation ukrainienne lorsqu’elle a été réalisée et aux pratiques occidentales. Les autorités de Kiev, issues de la révolte de Maïdan, ne sont pas fondées à invoquer la légalité ukrainienne. Elles ne peuvent, en effet, en ayant renversé le gouvernement légal, en ayant destitué le chef de l’État, sans respect de la loi constitutionnelle en vigueur et après avoir « épuré » la Cour Constitutionnelle, se prévaloir à propos de la Crimée, où s’était institué un autre pouvoir de fait, de la loi fondamentale simplement parce qu’elle servirait leur cause. La régularité du référendum d’autodétermination organisé par les autorités de la « République autonome de Crimée » a été peu contestée parce que peu contestable. L’intervention de militaires russes a été évoquée comme une ingérence extérieure : elle n’avait pas à l’être car cette présence résultait d’accords conclus en 1997 et 2010, valides jusqu’en 2042. La disparition des autorités légales à Kiev et les premières décisions prises ouvertement antirusses justifiaient même les mesures de sécurité des nouvelles autorités de Crimée assurant la protection des populations civiles locales. Leur droit à l’autodétermination fonde le droit à la sécession et au retour dans la patrie-mère. En effet, le transfert en 1954 de la Crimée sur décision de Khrouchtchev (pour des raisons politiciennes de direction de l’URSS) était totalement artificiel, alors que sa réintégration à la Russie est réellement conforme à la volonté de la grande majorité. (7) La soi-disant finalité « pro-démocratique » de la « révolution » de Maïdan n’efface pas son caractère illicite, sauf si l’on en revient à l’archaïque conception du « droit public de l’Europe » de la fin du XVIII° siècle et du XIX° siècle, qui prétendait être celui des « nations civilisées » dont seraient exclues abusivement la Russie et la population de Crimée !



De plus, les États européens sont très mal placés pour considérer le caractère illicite du référendum de Crimée. En effet, les pouvoirs « libéraux » de France et des Pays-Bas en 2005, de l’Irlande en 2009 n’ont pas hésité à annuler les résultats des référendums organisés dans leur pays respectif pour la seule raison que leur résultat ne correspondait pas à leurs objectifs, en faisant adopter par le Parlement ce qui avait été décidé par les citoyens !



La licéité de ces annulations est légalement des plus contestables : certains ont pu parler de forfaiture. De même, lorsque l’Union Européenne a interdit au gouvernement grec, en 2011, de mettre en œuvre sa décision d’organiser un référendum qui risquait d’aller à l’encontre des décisions européennes, elle a aussi manifesté d’un autoritarisme légalement suspect. La confusion en matière d’interprétation de ce qu’est la « démocratie » et le respect de la légalité, ainsi que le peu de cas reconnu à la volonté populaire empêchent le procès que l’Occident aurait voulu intenter à propos de la Crimée contre la Russie.



La doctrine américaine favorable à l’autodétermination des peuples sous « domination aliénante » se retourne contre l’Occident. La Catalogne, l’Écosse, l’Italie du Nord, les peuples autochtones en Amérique du Nord et du Sud (et non plus seulement certaines populations du Sud) peuvent demain multiplier les sécessions plus ou moins stimulées par la recherche d’un espace marchand globalisé favorable aux firmes transnationales et à la volonté des États-Unis de préserver leur statut de superpuissance unique (8).



Ce chaos introduit par les États-Unis et leurs alliés au cœur du droit international devient une source d’insécurité pour tous, et ce n’est pas la diplomatie russe qui en est à l’origine !

La question des provinces de l’Est de l’Ukraine est d’une autre nature que celle de la Crimée, bien que les russophones y soient largement majoritaires. Au sein de l’Ukraine, ils constituent une forte minorité.



Le procès fait à la Russie pour ingérence dans les régions de Donetsk et de Lougansk ne peut être déclaré recevable sans examen, comme on le fait dans l’Union Européenne et aux États-Unis. La position de la Russie est fondamentalement réactive, alors que Kiev et ses alliés (États-Unis, Union Européenne) sont radicalement offensifs. La Russie n’a aucun intérêt à mettre en cause l’intégrité de l’Ukraine, bien qu’elle ne puisse pas politiquement ne pas apporter son soutien aux Russophones qui le réclament. C’est pourquoi la diplomatie russe, exprimée par le Ministre S. Lavrov, est orientée en permanence vers la conciliation et la recherche d’une solution « raisonnable » pour les parties au conflit.



Une fraction de l’intelligentsia occidentale (V. Havel, Habermas, D. Vernet, par exemple) a soutenu l’intervention de l’OTAN contre la Yougoslavie, puis celle en faveur des Kosovars contre la Serbie, au nom de la protection des populations en dépit du principe de l’intégrité territoriale et sans l’accord du Conseil de Sécurité. Le « droit des peuples » devait l’emporter, pour le bien légitime de la « société civile internationale » et parce que, selon le professeur A. Cassese, « la situation était en dehors du droit » !



Ce coup de force contre la souveraineté serbe, aboutissant à la sécession du Kosovo, a été, de surcroît, couvert par l’ONU (résolution 1244), sans considération de sa minorité serbe, rom ou turque, avec le soutien de l’Union Européenne dont les États membres ont été laissés libres de procéder à la reconnaissance diplomatique du Kosovo (9).



Comment les États occidentaux peuvent-ils à la fois soutenir la sécession du Kosovo et dénoncer avec virulence les revendications des républiques populaires de Lougansk et de Donetsk, assistées par la Russie (10) ?



Comparée à l’interventionnisme euraméricain massif au profit de Kiev, l’assistance russe est limitée. Elle ne s’est pas démentie malgré la radicalité de la politique suivie par Kiev, stimulée par ses alliés polonais et baltes (11) et surtout par les États-Unis. C’est ainsi que le Parlement de Kiev(12) s’est prononcé pour une adhésion rapide à l’OTAN et une révision constitutionnelle supprimant les dispositions fixant un statut de « non-aligné » entre la Russie et l’Occident. Il a adopté une loi ouvrant le capital des entreprises énergétiques aux firmes occidentales (13). Kiev a interrompu tous les services publics et stoppé le versement de toutes les prestations sociales pour les populations de Lougansk et de Donetsk.



Le Président Porochenko (14), quant à lui, ne semble envisager qu’une solution militaire pour « régler » les relations de Kiev et des populations russes de l’Est, sans considération pour les dommages subis par les populations civiles (15).



La diplomatie russe, pour sa part, insiste depuis le début de la crise, sur le fait qu’une solution de type fédéral s’impose, si l’option est de maintenir l’intégrité territoriale de l’Ukraine.



La Russie n’a cessé de multiplier les propositions de négociation depuis le premier accord de Genève du 17 avril 2014 (avec les États-Unis, l’Union Européenne et les Ukrainiens), malgré la politique de sanctions économiques immédiatement décidée par les États-Unis et l’Union Européenne, en dépit des conséquences négatives pour l’économie ukrainienne qui a besoin de la coopération avec les deux parties.



La solution la plus rationnelle pour l’Ukraine, s’il s’agit de concilier le droit des peuples et l’intégrité territoriale, est la mise en œuvre d’un système fédéral, au nom de la protection des minorités, proposition défendue avec insistance par la Russie(16).



Les demandes russes de cessez-le-feu entre les forces de l’Est et celles de Kiev accompagnent en permanence les propositions de solution à plus long terme (à Genève en avril 2014, à Minsk en septembre 2014, lors de la présentation du Mémorandum du 20 septembre 2014, lors du voyage du Président Poutine en Mongolie, etc. Pour « calmer le jeu », la Russie a même proposé à Kiev des livraisons de gaz à un prix inférieur à celui pratiqué jusque-là.



Plus globalement, la diplomatie russe appelle depuis 2008 à un « Helsinki 2 », c’est-à-dire la conclusion d’un nouveau traité paneuropéen de sécurité. Les États-Unis et l’Union Européenne, malgré leurs contradictions (17), soutenus par une forte campagne médiatique, se contentent de refuser toutes les propositions considérant que la seule réalité est « l’expansionnisme » russe. Le secrétaire américain, Mac Cain, n’hésite pas à dénoncer « l’impérialisme » de la Russie et le Parti républicain à appeler au « réarmement moral » contre la Russie. « La Russie n’est plus un partenaire » (18), proclame le Secrétaire Général de l’OTAN, redevenue le « levier offensif de la vieille lutte contre la Russie », comme il l’était contre le communisme (19).



Le processus de « guerre froide » (bien que la notion soit discutable) délibérée semble se développer et le monde occidental semble se refuser à admettre qu’il n’y a pas de paix possible en Europe sans la Russie.



En fait, selon un modèle stratégique pratiqué partout par les puissances occidentales, les revendications identitaires et sociales d’une partie de l’Ukraine sont assimilées à une ingérence impériale de la Russie. Le conflit civil est instrumentalisé en affrontement international, comme si la Russie avait une totale maîtrise des comportements et des décisions de Lougansk et de Donetsk (20). Délibérément, les États occidentaux prennent prétexte de la crise ukrainienne pour tenter d’affaiblir l’économie russe, victime de la spéculation mondiale sur le pétrole. Cette politique du « pire », (l’économie occidentale est, avec moins de perspectives que l’économie russe, et en crise profonde depuis 2008), a les aspects d’une fuite en avant. Les réactions internes qui se produisent en Europe, comme par exemple les bouleversements de la société grecque (21), impliquent des manœuvres de diversion. Les problèmes sécuritaires et l’antiterrorisme ne suffisent pas ; la détermination d’un « ennemi » défini, comme la Russie, est idéologiquement « efficace ».


En fait, en raison de l’inertie (plus ou moins complice) de l’OSCE, du Conseil de l’Europe, et de la paralysie de l’ONU, les puissances occidentales et les quelques pays européens ayant un rapport historique émotionnel et hostile à la Russie mènent une politique aventuriste pour laquelle le droit n’a qu’une très faible part.


La situation chaotique qui en résulte et qui s’inscrit dans la vague de déstabilisation généralisée menace toutes les parties en cause : sa maîtrise tend à échapper aux acteurs ainsi engagés, tandis que le droit international se trouve placé dans un état « comateux » (22).

Notes :1) Sont par exemples venus appuyer les manifestants de Maïdan, le ministre canadien des Affaires étrangères, une Secrétaire d’État adjointe des États-Unis, des personnalités françaises, etc. sans parler de l’aide financière de certaines organisations occidentales.

2) Il faut se rappeler les réactions des États-Unis à l’envoi de missiles soviétiques à Cuba et la proximité d’une Troisième guerre mondiale qui en a résulté.

3) On peut rappeler aussi le soutien occidental apporté aux Islamistes de Tchétchénie, surtout lors de la seconde guerre menée et gagnée par le pouvoir fédéral (lors de la première guerre perdue par B. Eltsine, « l’indulgence » était la règle). A Paris, par exemple, les « Comités Tchétchénie » ont bénéficié, au nom des droits de l’homme, de moyens divers, y compris médiatiques, pour discréditer le pouvoir russe. L’hostilité à la Russie l’emporte sur le combat contre les djihadistes. Les appels du Ministre des Affaires étrangères S. Lavrov pour « faire bloc … et donc combattre de manière coordonnée, sans politique des deux poids deux mesures » n’ont pas été entendus. La position occidentale demeure en effet incohérente : elle combat contre l’E.I en Irak, mais la tolère en Syrie par hostilité à Damas ; elle collabore avec le Qatar et l’Arabie Saoudite, qui participent au financement des Islamistes et reste pour le moins indifférente aux menaces en Tchétchénie, dans le Caucase et les différents territoires musulmans de la Russie.

4) On constate l’extrême discrétion des médias occidentaux sur les attaques de l’armée ukrainienne contre les provinces de l’Est, et notamment l’impact des bombardements des villes. Lorsqu’ils en parlent, ils ne font que reproduire les « informations » fournies par Kiev : les responsables sont toujours les « terroristes » de l’Est et leurs alliés russes.

5) On peut rappeler l’interprétation des résolutions 1970 et 1973 du Conseil de Sécurité concernant la Libye, la préfabrication artificielle de prétendues normes coutumières comme la « légitime défense préventive », les pratiques de la Cour Pénale Internationale très éloignées d’une authentique justice pénale internationale mettant fin à l’impunité des criminels de guerre, etc., les manipulations onusiennes telle que l’inertie de certaines « forces de paix » en raison des pressions américaines (en République Démocratique du Congo, par exemple, elles sont présentes sans la moindre efficacité depuis dix ans, tandis que la rébellion est soutenue par l’Ouganda, pro-américain), etc.

6) La très occidentaliste Th. Delpech (Politique Internationale. Été 2003) développe cette analyse soulignant à l’appui de sa thèse que l’Occident est « un îlot de paix, de prospérité et de démocratie » ! Les néoconservateurs américains ont la même position au nom de la « morale ». Dès 2005, sans même citer les problèmes que soulèvent les avancées des États-Unis et de l’OTAN, T. Delpech, membre de l’Institut international d’études stratégiques de Londres et chercheur au CERI (Paris), écrit, en mettant en cause la seule Russie : « … sans l’Ukraine le rétablissement de la domination de Moscou sur les États qui se sont émancipés en 1990 est impossible. Sans elle, la Russie ne peut plus songer à la restauration de l’empire ». Comme le rappelait Z. Brezinski, il faut choisir entre la démocratie et l’empire. On ne peut avoir l’un et l’autre. La clé serait que pour V. Poutine (discours du 25 avril 2005) la chute de l’URSS est « la plus grande catastrophe géopolitique du siècle » (p. 205).

7) T. Delpech ose même écrire : « Quant au désordre, voire la guerre, il est parfois nécessaire pour rendre la justice possible » (p. 320). Cf. L’ensauvagement. Le retour de la barbarie au XXI° siècle. Grasset. 2005.

8) Voir P-M de la Gorce. « Washington et la maîtrise du monde ». Le Monde Diplomatique. Octobre 1994, qui précise longtemps avant la crise ukrainienne que l’objectif fondamental des États-Unis est la « dislocation de l’URSS » et d’empêcher le « retour vers la Russie des pays devenus indépendants : l’Ukraine, la Biélorussie ou éventuellement d’autres encore » (rapport Wolfowitz et rapport Jeremia. 1992-1993).

9) Voir P. Claret (ss direc.) Kosovo : entre légalité et légitimité. La balkanisation en marche ? Fondation Varenne. Bruylant. 2009.

10) La France est très mal placée pour invoquer le principe de l’intégrité territoriale lorsqu’on observe la politique suivie vis-à-vis des Comores en 1974, par exemple, où elle a organisé un référendum dont les résultats ont été comptabilisés « île par île », ce qui a conduit à détacher Mayotte, intégrée ultérieurement (2009) à la République Française, malgré l’avis contraire de l’État comorien et des Nations Unies.

11) Le ton employé par Adam Michnik, directeur du journal polonais « Gazeta Wyboreza », est révélateur, à propos de la crise ukrainienne : « Poutine est un soviétique... Il ne tient pas compte de l’Histoire. Il touche aux frontières ! », in Télérama. 21.05.2014.

12) Le Parlement ukrainien a été élu malgré 48% d’abstentions auxquelles il faut ajouter les 7 millions d’électeurs de l’Est qui n’ont pas pris part au scrutin. Dans les faits, la « majorité » représente moins de la moitié de la population ukrainienne.

13) Toutes les critiques « anti-oligarques » qui ont été portées contre l’ancien régime ukrainien peuvent être portées contre le nouveau pouvoir de Kiev : ce sont d’autres oligarques qui gouvernent réellement le pays.

14) Le Président ukrainien a été élu avec 54% des voix soit moins de 30% des citoyens ukrainiens.

15) On peut s’étonner de l’indifférence de fait pour les quelques 5.000 victimes (en majorité des Russes de l’Est) que l’affrontement armé a entraîné. La « responsabilité de protéger » n’est pas invoquée en la circonstance ni par Kiev ni par les États occidentaux, ni par les ONG occidentales.

16) Le vice-chancelier allemand s’est prononcé, bien que sa voix ait été étouffée, pour la fédéralisation de l’Ukraine. Il est vrai que c’est l’Allemagne qui a le plus besoin de relations pacifiques avec la Russie (les échanges représentent 80 millions de dollars (300.000 emplois en dépendent) et il y a 6.000 entreprises russes en Allemagne.

17) Toute crise fait apparaître des contradictions entre les États-Unis et l’Union Européenne. La question ukrainienne soulève à nouveau la réclamation de plus en plus vive des États-Unis à l’égard des États européens de prendre davantage en charge le coût des activités de l’OTAN ; elle est aussi l’occasion pour les États-Unis de peser davantage sur les négociations en vue de créer le marché transatlantique ainsi que sur la désignation du prochain Secrétaire Général des Nations Unies, etc.

18) Selon la formule du professeur J. Geronimo. L’Humanité Dimanche. 6-12/2/2014.

19) En 2009, A.F. Rasmussen, Secrétaire Général de l’OTAN, déclarait « vouloir convaincre le peuple russe.... que l’OTAN n’est pas un ennemi de la Russie » et qu’il y a « beaucoup d’intérêts communs comme par exemple le contre-terrorisme ». Mais le Secrétaire Général de l’OTAN rappelait déjà l’intention d’intégrer la Géorgie et l’Ukraine dans l’organisation politico-militaire, conformément à la volonté unilatérale des Occidentaux. Cf. Le Monde.fr. 4.08.2009.

20) Malgré certaines revendications, la Russie n’a jamais répondu favorablement à une intégration, comme ce fut le cas pour la Crimée. Les offensives répétées des forces armées de Kiev contre les localités de l’Est de l’Ukraine entraînant en retour des opérations (comme celle de Marioupol en janvier 2015), l’enchaînement des violences des deux parties et la dégradation de la situation ne peuvent être, quelles que soient les accusations, endossées par la Russie !

Le Ministre des Affaires Étrangères russe S. Lavrov a rappelé encore le 25 janvier lors d’un entretien avec J. Kerry, responsable de la diplomatie des États-Unis que « la Russie était prête à mettre tout en œuvre pour pousser les parties ukrainiennes à un règlement pacifique ». Cf. L’Humanité. 26.1.2015

21) Nicos Kotzias, ministre des affaires étrangères grec du parti Syriza, modifie radicalement la position de la Grèce vis-à-vis de l’Ukraine : « Je pense qu’il ne peut y avoir d’autre solution …... que la mise en place d’une réforme démocratique du pays. Je défends pour ma part l’idée d’une Ukraine fédérale... La guerre n’est jamais une bonne solution ». L’Humanité. 28.1.2015.

22) L’intervention humanitaire russe en Ukraine a donné lieu, elle-même, à des protestations de Kiev et du Ministre français L. Fabius qui a cru devoir préciser « qu’elle pouvait dissimuler une action militaire » ! De la part de la France, qui a inventé « l’ingérence humanitaire » qui a permis de d’occulter toutes les subversions, l’accusation est grossière : elle ne fait que démontrer l’usage intensif du principe des « deux poids, deux mesures » !

Source :Investig'Action

http://www.michelcollon.info/La-question-ukrainienne-la-Russie.html

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7 janvier 2015 3 07 /01 /janvier /2015 21:52

Mercredi 7 janvier 2015

L'UKRAINE, FER DE LANCE DU FASCISME EN EUROPE ?!

Marche aux flambeaux fasciste à Kiev pour le Nouvel an : 5 000 manifestants celebrent le collaborateur ukrainien Bandera

Marche aux flambeaux fasciste à Kiev pour le Nouvel an : 5 000 manifestants celebrent le collaborateur ukrainien Bandera

Article AC pour http://www.solidarite-internationale-pcf.fr/

L'Europe nouvelle est en marche à Kiev. Elle défile dans des marches aux flambeaux, célèbre les héros de la collaboration avec le nazisme, exacerbe le nationalisme tout en prêtant allégence à une Europe capitaliste qui détruit le cadre national qui rend possible la résistance à ce nouvel ordre barbare. L'Ukraine constitue une maquette effrayante de l'Europe nouvelle.

Selon les organisateurs, ils étaient 5 000. Pour la police, entre 2 et 3 000. Les images de la fête du Nouvel an à Kiev sont loin de la légèreté du reste du monde. Point de confettis, de lunettes, de voeux aussitôt oubliés, mais de bien pesants portraits, drapeaux, torches, slogans.

Une insoutenable pesanteur pour fêter le 106 ème anniversaire de Stepan Bandera, dont le portrait est brandi par les manifestants, éclairé par les torches qui donnent à la scène un effrayant parallèle avec d'autres temps et lieux de l'histoire.

L'Ukraine aux Ukrainiens, Bandera, reviens ! : l'Europe nouvelle en marche

Considéré par les nationalistes comme un héros national, l'anti-communisme de Bandera couplé à sa russophobie et son anti-sémitisme dans son nationalisme intégral l'a conduit à collaborer avec les Nazis en 1941, et à organiser des pogroms de vaste ampleur à la tête de l'Organisation des nationalistes ukrainiens (OUN).

Ce 1er janvier, les drapeaux bleus et jaunes (ceux de l'Ukraine, avant de l'OUN, maintenant arborés par le parti fasciste Svoboda) cotoient les bannières rouge et noir (celle de l'Armée insurrectionnelle ukrainienne de Bandera après 1941, aujourd'hui de la formation néo-nazie Secteur droit).

Les slogans ne souffrent guère d'ambiguité sur la teneur de la marche :"l'Ukraine aux Ukrainiens", "Bandera reviens, et remets de l'ordre dans tout cela!", ainsi que le désormais habituel : "Gloire à l'Ukraine, gloire aux héros!".

Le slogan, qui avait celui de Bandera et qui a été repris par les indignés à crânes rasés de Maidan.

"Nous allons gagner cette juste guerre. Dieu est avec nous" (Porochenko)

Le leader de Svoboda, Oleg Tyanhybok ne s'y est pas trompé. Avant le défilé, il confiait à la presse ukrainienne que "le gouvernement actuel est venu au pouvoir avec les slogans de Bandera, il doit maintenant suivre ses idées".

Tyanhybok a aussi réclamé que Bandera soit rétabli dans le titre de "héros national ukrainien". Un titre que lui avait octroyé Iouchtchenko en 2010 et qui avait été retiré par Ianoukovitch en 2013, quelques semaines avant qu'íl soit renversé.

La marche aux flambeaux avait comme un parfum de procession, les slogans reflétaientun esprit de croisade.

Ce ne sont pas seulement les "Gloire à la nation, mort à l'ennemi!" entendus dans le cortège, mais aussi les récurrents appels à lutter contre Moscou, souvent rapproché dans la rhétorique de Svoboda au judéo-moscovisme.

Même le président-roi du chocolat Porochenko, lors de son message du Nouvel an a lancé un appel mystique : "Nous allons bien gagner cette guerre patriotique car elle est juste, pour nous. La vérité est de nôtre côté. Dieu est avec nous".

Gott mit uns. Ce genre de proclamations a de quoi faire frémir ce qui garde une conscience historique. La Russie s'est empressée de dénoncer le défilé, alors qu'un journaliste russe s'est fait agressé par les manifestants à Kiev.

"Quelque chose de pourri en Ukraine, en Europe" pour le président tchèque

Ainsi, l'envoyé russe pour les droits de l'Homme au Ministère des Affaires étrangères Konstantin Dolgov : "Les marches aux flambeaux en Ukraine démontrent quón continue à avancer sur la voie nazie ! Et c'est au coeur de l'Europe civilisée".

Compte tenu de ses intérêts géopolitiques, c'est de bonne guerre. Cela n'empêche pas la Russie de soutenir des forces d'extrême droite dans certains pays d'Europe.

Même le président tchèque, Milos Zeman, a exprimé ses doutes sur ce qui se passe en Ukraine, en des termes forts. Pour lui, la marche aux flambeaux de Kiev lui rappelle l'Allemagne d'Hitler. Et pour lui il y a quelque chose de "pourri" dans le fait que ni l'Ukraine ni l'UE ne la condamne.

"Il y a quelque de chose de pourri en Ukraine", confiait-il à la radio F1 : "J'ai vu cette vidéo de la manifestation à Kiev, et les manifestants brandissaient des portraits de Stepan Bandera. Cela m'a rappelé Reinhard Heydrich".

Heydrich était un des architectes de l'Holocauste et Gouverneur du Reich pour les territoires correspondant à l'actuelle République tchèque.

"La parade même était organisée à la manière des marches aux flambeaux nazies, avec les participants qui criaient : 'Morts aux Polonais, aux Juifs et aux communistes sans pitié", a développé Zeman.

Le président tchèque concluait en soulignant qu'il y avait quelque chose de pourri dans le fait que l'Union européenne ne condamne pas ces actions : "N'oubliez pas que Bandera est considéré comme un héros national en Ukraine, son image flotte à Maidan, sa statue se trouve à Lvov. En réalité, c'était un assassin de masse".

L'anti-communisme, vecteur privilégié pour la réhabilitation des collabos

Un même scepticisme se retrouvait dans les mots des responsables du Centre Simon Wiesentahl (CSW). Pour le directeur du Bureau de Jérusalem, Ephraim Zuroff :

"Les responsables de l'Holocauste sont les dernières personnes sur terre qui méritent d'être glorifiées, peu importe leurs vertus nationalistes. Ce phénomène, si courant dans l'Europe de l'est post-communiste, en particulier en Ukraine et dans les pays baltes, montre clairement que ces pays ne remplissent pas pleinement les obligations d'une véritable démocratie."

Le Centre Simon Wiesentahl développe l'analyse en dénoncant une marche qui est un bon exemple de trois phénomènes séparés :

"la dissimulation ou la minimisation du rôle des collaborateurs nazis locaux dans les crimes de l'Holocauste ; la promotion d'une équivalence entre crimes nazis et crimes communistes ; et glorification des combattants de la liberté anti-communistes (les nouveaux héros de ces pays), qui étaient des collaborateurs locaux, participant aux crimes de la Shoah".

L'anti-sémitisme viscéral de ces formations d'extrême-droite ne les empêche pas de trouvercomme un de leurs principaux soutiens financiers le millardaire israélo-ukrainien Igor Kolomoiksy – qui se revendique comme juif dans l'espace public –, bailleur de Secteur droit comme des formations para-militaires néo-nazies en Ukraine orientale.

Tel-Aviv a même mis en place une "ligne ouverte" avec ces formations pour dialoguer avec les forces d'extrême droite et désamorcer leur anti-sémitisme, ou mieux, le distinguer de l'anti-sionisme.

Cela a visiblement plutôt marché. Lors de l'offensive israélienne sur Gaza, l'organisation néo-nazie Secteur droit a organisé des rassemblements en solidarité avec ... l'Etat israélien. Anti-sémitisme et pro-sionisme peuvent décidément aller de pair.

Il y a quelque chose de pourri en Ukraine. Il y a surtout quelque chose de pourri en Europe. Les mots du président tchèque résonnent comme un avertissement lucide au vu de la dérive droitière, chaque jour plus manifeste en Ukraine.

Mercredi 7 janvier 2015

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BRUNO FORNACIARI

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